Introduction

On recourt de plus en plus aux systèmes d’épandage par écoulement direct de fumier liquide, car ils facilitent le transfert et l’épandage des matières liquides. Comme dans le cas de tous les systèmes effectuant le pompage sous pression de matières liquides, une défaillance de l’équipement peut toujours se produire. Dans une telle éventualité, la capacité d’arrêter rapidement le système de pompage permet bien souvent de réduire considérablement le volume de fumier qui risque d’être rejeté dans le milieu naturel.

La présente fiche technique décrit les dispositions du Règlement de l’Ontario 267/03 pris en application de la Loi de 2002 sur la gestion des éléments nutritifs, tel qu’il a été modifié (le « Règlement »), ainsi que celles du Protocole de gestion des éléments nutritifs (le « Protocole ») qui s’appliquent à l’utilisation de pipelines de fumier et de systèmes d’épandage de fumier à l’aide de boyaux traînés.

Systèmes à écoulement direct : caractéristiques physiques

Un système d’épandage par écoulement direct de fumier liquide comporte une pompe et un pipeline qui acheminent le fumier de la structure d’entreposage ou du réservoir de transfert jusqu’au lieu de l’épandage (figure 1). Le système fonctionne généralement sous de hautes pression, c’est-à-dire d’au moins 1035 kilopascals (KPa) ou 150 livres par pouce carré (psi), et de débits élevés de plus de 2270 litres/minute ou 500 gallons/minute.

Faites glisser l'applicateur de fumier à tuyau à l'aide d'un outil Aerway pour appliquer du fumier sur une culture de blé d'hiver.
Figure 1. Rampe d’épandage par écoulement direct.
Photo offerte par Aerway

Les pompes sont habituellement mues par la prise de force du tracteur ou par un moteur stationnaire à l’emplacement du réservoir de fumier. En quittant la pompe, le fumier s’écoule dans un pipeline de 10–20 cm (4–8 po) de diamètre (un tuyau ou un boyau non perforé) qui transporte le fumier jusqu’au champ. Une fois dans le champ, le fumier circule dans un tuyau flexible ou un boyau rigide de 8,25–12,7 cm (3,25–5 po) de diamètre qui est traîné derrière le tracteur. Le fumier parvient à la tête de distribution de l’épandeur à l’arrière du tracteur et est épandu en pleine surface ou injecté à grand débit (mais à basse pression, pour réduire les coûts de pompage).

Le fumier peut être pompé sur de très longues distances. Un système d’envergure (un tracteur de 300 hp et une pompe intégrée à la structure d’entreposage) peuvent pomper le fumier sur une distance pouvant aller jusqu’à 3,2 km (2 milles). Ces longues distances peuvent rendre la surveillance plus difficile. Les vitesses de pompage plus élevées peuvent par ailleurs tourner en catastrophe s’il advenait une défectuosité du système.

En vertu de l’article 50 du Règlement, il ne doit pas s’écouler plus d’une minute entre le moment où une panne est décelée et l’arrêt complet de la pompe. Une minute peut paraître peu de temps, mais aux débits élevés qui caractérisent les systèmes à écoulement direct, un écoulement concentré sous pression peut avoir des effets désastreux.

Habituellement, en cas de panne du pipeline, l’effluent ne tardera pas à s’accumuler et à former un écoulement qui se dirigera vers le point le plus bas, qui peut être un fossé, un puisard ou une voie d’eau.

S’il fallait 10 minutes pour arrêter le système, un pipeline de 15 cm (6 po) de diamètre pompant 2273 litres/min (500 gallons/min) risquerait de rejeter 22 730 L, soit 5000 gal de fumier dans l’environnement.

Structure temporaire, système d’épandage par écoulement direct : matières et dispositions

Dans certains cas, le champ peut être trop éloigné de l’emplacement de la structure d’entreposage permanente pour qu’un pipeline constitue une solution pratique ou même envisageable. La solution de rechange consiste alors à transporter le fumier en bordure du champ à l’aide de camions-citernes et à entreposer temporairement le fumier dans un réservoir de transfert ou de ravitaillement au champ. De là, un système de pompage approvisionnera le système d’épandage par boyau traîné.

La plupart des agriculteurs ne peuvent justifier un tel investissement dans de la machinerie, mais ce système est couramment utilisé par les épandeurs à forfait qui épandent du fumier liquide ou des matières de source non agricole. Habituellement, le réservoir de transfert ou de ravitaillement contient au moins une fois et demi la capacité d’une citerne (soit en général entre 27 000 et 45 000 L [6–10 000 gal imp] par citerne) et est constamment ravitaillé au fur et à mesure que les camions-citernes arrivent sur place. Selon l’endroit, les matières liquides sont transférées du camion-citerne routier à un réservoir de transfert ou de ravitaillement, par pompage, et parfois, par gravité.

Un choix judicieux de l’emplacement de la structure d’entreposage temporaire par rapport aux puits et aux voies d’eau est primordial si l’on veut réduire au minimum les risques en cas de défaillance du système.

Systèmes à écoulement direct : obligations des opérateurs

L’article 50 du Règlement est très clair sur les exigences imposées aux opérateurs de tels systèmes. Dans tous les cas, qu’il y ait un ou deux opérateurs pour faire fonctionner le système, le ou les opérateurs doivent avoir une vue dégagée du bien-fonds sur lequel les matières sont épandues (boyau traîné, pompe, conduites d’alimentation, etc.). Ils doivent avoir la possibilité de couper l’alimentation en moins d’une minute une fois qu’un problème se présente.

On trouvera ci-dessous un résumé des exigences précisées dans le Règl. 267/03, art. 50.

Deux opérateurs

  • Deux personnes doivent être présentes en tout temps.
  • Elles doivent être à même de communiquer immédiatement à l’aide de radios ou d’autres appareils électroniques.
  • Une personne doit avoir une vue dégagée de la superficie destinée à recevoir l’épandage, tandis que l’autre doit se tenir assez près du système pour pouvoir l’arrêter en l’espace d’une minute si le premier opérateur l’informe d’une situation problématique.

Un seul opérateur

  • Une personne peut épandre le fumier si elle a une vue dégagée de la superficie destinée à recevoir l’épandage.
  • La personne doit pouvoir arrêter la pompe en l’espace d’une minute si elle constate une situation problématique.
  • La personne peut aussi utiliser un dispositif de télécommande pour arrêter la pompe; le système doit être conçu pour s’arrêter automatiquement en l’espace d’une minute s’il ne reçoit plus de signal du dispositif de télécommande.

Il est recommandé d’installer sur tout épandeur un débitmètre de bord précis et fiable. Le débitmètre est monté sur l’épandeur avant l’unité de distribution (voir la figure 2a). Un dispositif d’affichage (voir la figure 2b) peut être installé à bord du tracteur pour permettre à l’opérateur de surveiller facilement le débit tout en roulant. Un opérateur attentif sera à même de détecter la moindre variation de débit qui pourrait indiquer une fuite ou d’autres problèmes, et de prendre les mesures correctrices adaptées à chaque situation. Le débitmètre présente en outre l’avantage d’accroître l’efficacité de l’opération d’épandage en veillant à ce que les taux d’application voulus soient respectés si la vitesse d’avancement au sol est modifiée.

montre l'affichage numérique monté dans la cabine du tracteur qui est connecté au débitmètre de liquide sur l'unité d'application
Figure 2a. Débitmètre sur barre d’outils.
Photo offerte par Nuhn Equipment
montre le débitmètre installé sur la conduite d'alimentation en fumier de l'unité d'épandage de fumier avec un fil allant jusqu'à la cabine du tracteur.
Figure 2b. Dispositif d’affichage dans la cabine du tracteur
Photo offerte par Nuhn Equipment

À l’heure actuelle, il n’existe pas d’autres dispositifs fiables à installer sur le distributeur ou à d’autres endroits pour détecter des anomalies. L’uniformité du fumier varie considérablement au fur et à mesure du pompage; les variations de pression qui surviennent pourraient laisser croire à tort que le système fonctionne mal ou en en panne. Il est donc déconseillé de s’en remettre à un manomètre pour détecter les fuites.

Le système doit être équipé d’une vanne de coupure qui réduit d’abord graduellement le débit avant l’arrêt, et d’une vanne de démarrage progressif. Ces dispositifs ont pour effet de prévenir le phénomène du coup de bélier, provoqué par un arrêt ou un démarrage brutal de l’écoulement dans un système sous pression.

Dispositifs d’arrêt automatiques ou télécommandés

Une radiotélécommande à bord du tracteur est recommandée pour gérer convenablement un système tout écoulement direct. La radiotélécommande envoie un signal numérique à un récepteur (voir la figure 3) à la pompe à fumier (ce dispositif n’est pas à sécurité intégrée) qui commande le débit. Le conducteur du tracteur qui fait fonctionner le matériel d’épandage a en tout temps la complète maîtrise de la situation.

montre l'unité réceptrice montée sur le moteur de l'unité de pompe. Le récepteur contrôle un interrupteur à solénoïde qui est connecté à l'accélérateur du moteur. L'interrupteur à solénoïde accélère ou ralentit le moteur de la pompe selon les besoins en fonction du signal de l'opérateur de l'applicateur. Dans le pire des cas, tout le carburant est coupé vers l'unité de pompage.
Figure 3. Organe récepteur commandant la vitesse du moteur de la pompe.
Photo offerte par Vanden Bussche Irrigation

Le système le plus rudimentaire possède trois boutons sur le dispositif de commande :

  • Bouton 1 fait tourner la pompe au ralenti afin de permettre au conducteur du tracteur de tourner aux extrémités du champ et de faire d’autres manœuvres lorsqu’un faible débit est nécessaire.
  • Bouton 2 fait accélérer la pompe quand le tracteur recommence l’épandage.
  • Bouton 3 commande l’arrêt de la pompe au réservoir d’entreposage (situations d’urgence).

Il existe aussi un dispositif à sécurité intégrée qui assure un lien constant entre le tracteur et la pompe. Un signal audible d’envoi ou de réception se fait entendre à chaque extrémité pour aviser les opérateurs que le système est en marche. Si, pour une raison ou une autre, l’opérateur ne reçoit aucun message, la pompe s’arrêtera automatiquement.

Dans certains cas, les signaux d’avertissement du dispositif à sécurité intégrée peuvent créer de l’interférence. Par exemple, un signal automatique d’envoi ou de réception peut retarder la réaction de l’opérateur qui serait en train d’envoyer le signal d’arrêter ou de ralentir la pompe.

Déversement de fumier causé par un système à écoulement direct

Même quand le matériel fonctionne bien et est utilisé correctement, des accidents peuvent survenir et des déversements sont toujours possibles.

Voici des exemples de déversements :

  • fuites dans la conduite de distribution dues, entre autres, à des ruptures, à des déconnexions et à des raccords endommagés;
  • perte de la capacité d’arrêter le système;
  • circulation de véhicules sur le pipeline;
  • pipeline accroché et emporté par des travaux dans les champs ou sur la ferme;
  • appui des tuyaux (pour passer au-dessus ou en dessous d’objets) cédant sous l’influence des vibrations.

Voici les « pratiques optimales » recommandées :

  • inspecter régulièrement tous les éléments et les pipelines pour voir s’ils sont usés;
  • soumettre le système à des opérations d’entretien périodiques;
  • être prêt à réagir aux imprévus.

Le Règlement exige de l’exploitant qu’il se dote d’un plan d’urgence pour parer aux éventualités où il aurait à manipuler le fumier. Le plan d’urgence a pour but de réduire au minimum les conséquences fâcheuses d’éventuels déversements, comme la contamination de l’eau et la destruction des poissons. Comme des accidents peuvent survenir, il faut savoir quelles mesures prendre en cas de déversement. Les déversements de fumier peuvent être coûteux et difficiles à nettoyer.

Le fait de s’être doté d’un plan d’urgence et de le mettre en œuvre quand il le faut est une façon de faire preuve de diligence raisonnable. On témoigne ainsi qu’on fait tout ce qui est possible pour réduire au minimum les répercussions environnementales d’un déversement et les coûts de nettoyage potentiels de même que les responsabilités qu’un déversement peut engendrer.

Entreprises d’épandage à forfait utilisant des systèmes à écoulement direct

Formation et certification

En vertu de l’article 107 du Règlement, un entrepreneur faisant l’épandage à forfait de matières prescrites est tenu d’obtenir un permis d’épandage commercial de matières prescrites avant le 31 décembre 2005. Les employés des entreprises qui font l’épandage à forfait de matières prescrites doivent obtenir un permis de technicien en épandage d’éléments nutritifs avant le 31 décembre 2006. Les producteurs qui épandent du fumier sur leur propre bien-fonds n’ont pas besoin de suivre la formation prévue par le Règlement. Toutefois, il est conseillé à quiconque épand du fumier de suivre la formation quand l’occasion se présente.

L’assurance-responsabilité est une considération impor¬tante pour toute personne qui épand du fumier. En géné¬ral, les producteurs bénéficient d’une garantie globale aux termes de la police d’assurance qu’ils ont pour leur ferme.

Auparavant, les épandages étaient réalisés soit par des agriculteurs soit par des entreprises à forfait. Cette distinction devient floue depuis que les grosses exploi¬tations transportent du fumier sur la voie publique sur des distances de plus en plus grandes.

Toutes les personnes qui épandent du fumier doivent rencontrer leur courtier ou leur agent d’assurance et lui expliquer clairement ce que comporte l’épandage, que celui-ci soit réalisé sur une propriété adjacente ou beaucoup plus loin à l’aide de pipelines ou de citernes. Les primes d’assurance seront établies en fonction du risque en jeu, mais la protection sera à jour et complète.

Avis de non-responsabilité

Les renseignements dans cette fiche technique sont fournis à titre d’information seulement et ne devraient pas être utilisés pour déterminer vos obligations légales. Pour ce faire, consultez la loi pertinente. Si vous avez besoin de conseils juridiques, consultez un avocat. En cas de contradiction entre l’information fournie dans la fiche technique et toute loi applicable, la loi a préséance.

Cette fiche tecnique a été rédigée par Daniel Ward, ingénieur, environnement rural, MAAARO, et révisée par Robert Chambers (retraité), structures et matériel des fermes por-cines et avicoles, unité du génie et de la technologie, MAAARO.