Introduction

Le fumier est une excellente source d’éléments nutritifs pour les végétaux. Toutefois, lorsqu’il est épandu en trop grandes quantités, il présente certains dangers pour l’environnement. La présente fiche technique décrit comment évaluer les superficies d’épandage requises et offre des options aux producteurs en matière de gestion du fumier, dans les cas où les superficies disponibles à la ferme sont insuffisantes.

Calcul des superficies d’épandage requises

On doit prendre en compte un certain nombre de paramètres pour calculer les superficies d’épandage qui sont requises pour une unité agricole donnée.

En vertu du Protocole 2012 de gestion des éléments nutritifs associé au Règl. de l’Ontario 267/03, l’unité agricole comprend le bien-fonds et les installations qui sont associées à l’exploitation agricole.

La suite infonuagique d’outils de planification agricole du MAAARO, AgriSuite, aide les exploitants agricoles à établir les données relatives à chacun des paramètres suivants en vue de prendre de meilleures décisions :

Paramètre 1 : Valeur nutritive des fumiers à épandre

La valeur nutritive du fumier varie beaucoup selon l’espèce animale (tableau 1). La meilleure façon de connaître la valeur nutritive du fumier est de le faire analyser par un laboratoire accrédité, qui dosera l’azote (N), le phosphore (P), le potassium (K) et la matière sèche. Pour obtenir un échantillon représentatif de fumier liquide, prélever des échantillons dans un réservoir dont on a préalablement agité le contenu pour obtenir un dosage précis de sa composition. Pour obtenir un échantillon représentatif de fumier solide, prélever des échantillons à plusieurs endroits dans le tas. On peut trouver les concentrations moyennes d’éléments nutritifs pour différentes espèces d’animaux d’élevage dans AgriSuite.

Tableau 1. Unités nutritives (UN*) pour différents types d’animaux
Type d’animalNbre d’animaux par UN
Vache laitière de grande taille0,7
Bovins à l’engraissement3
Porcs à l’engraissement6
Agneaux lourds20
Poulets – poulettes pondeuses500

*L’unité nutritive (UN) décrit la quantité de fumier requise pour donner à l’engrais une valeur de remplacement correspondant au moindre de 43 kg d’azote ou de 55 kg de phosphore en tant qu’éléments nutritifs. Par exemple, le fumier produit par trois bovins d’engraissement représente 1 UN.

Paramètre 2 : Rotation culturale prévue

Les cultures ont des besoins différents en éléments nutritifs. Quels sont les éléments nutritifs requis par les cultures composant la rotation actuelle? Est-ce que les épandages de fumier peuvent répondre à ces besoins?

Paramètre 3 : Composition actuelle du sol, type de sol et topographie

Si le sol est déjà riche en éléments nutritifs, l’ajout d’éléments additionnels par l’épandage de fumier pourrait être limité. L’analyse d’un échantillon de sol est le meilleur moyen de connaître la composition de ce dernier. Le type de sol et la topographie du terrain peuvent aussi restreindre la capacité du sol à recevoir du fumier en raison des risques plus élevés de contamination des eaux de ruissellement dans les sols où le taux d’infiltration est faible et dans les terrains en pente abrupte.

Paramètre 4 : Proximité de cours d’eau ou de zones écologiquement sensibles

Afin de réduire les risques de contamination, on ne peut pas épandre de fumier en deçà d’une certaine distance des eaux de surface ou des puits. Ces distances de retrait doivent être prises en compte dans le calcul des superficies d’épandage disponibles

Distances de retrait en Ontario

  • 100 m (328 pi) des puits municipaux
  • 15 m (50 pi) des puits forés ou 30 m (100 pi) de tout autre type de puits
  • 3 à 60 m (10 à 200 pi) de la rive des cours d’eau de surface. Cette distance de retrait dépend d’un certain nombre de facteurs, tels que la méthode utilisée pour incorporer le fumier dans le sol, la pente à proximité du cours d’eau et la valeur de l’indice phosphore (voir la fiche technique du MAAARO, Détermination de l’indice phosphore dans un champ)

La Partie VI du Règlement précise les distances de retrait à respecter pour les unités agricoles visées par la Loi. Par ailleurs, il est recommandé de déterminer les distances de retrait en fonction de l’indice P, même dans les cas où le règlement ne l’exige pas.

De plus, sauf en sols organiques, le Règlement exige la création d’une bande tampon de 3 m (10 pi) en bordure des cours d’eau qui traversent ou longent les champs où des éléments nutritifs sont épandus, ainsi que l’élaboration d’un plan de gestion des éléments nutritifs (figure 1).

Photo montrant un ruisseau qui traverse un champ ainsi que des flèches qui pointent vers les bandes tampons le long du cours d’eau
Figure 1. Des zones tampons en bordure de ruisseaux réduisent les risques de pollution associée à la présence d’éléments nutritifs.

Options pour les fermes qui produisent trop de fumier

Voici quelques options à envisager lorsque les éléments nutritifs fournis par le fumier excèdent les capacités des superficies disponibles :

  • augmenter les superficies
  • réduire les quantités de fumier à épandre
  • épandre davantage de fumier sans accroître les superficies
  • transférer le fumier à un autre endroit
  • recourir à des traitements innovateurs de fumiers

Option 1. Augmenter les superficies de l’unité agricole

Dans un avenir prévisible, il existe suffisamment de terres cultivées en Ontario pour recevoir tous les éléments nutritifs du fumier qu’on y produit. Le défi consiste à trouver des superficies d’épandage dans le voisinage immédiat, car il en coûte cher de transporter le fumier sur de grandes distances (voir les renseignements, à la fin de la présente section, sur l’accès aux superficies d’épandage).

On peut accroître les superficies d’épandage de l’unité agricole de cinq manières.

Achat de superficies additionnelles sur le même titre de propriété que les installations d’élevage

L’ajout de superficies sur le même titre de propriété permet de mieux s’assurer que la ferme d’élevage qui produit le fumier continuera à disposer de superficies adéquates. Le producteur peut donc acheter des terres voisines et fusionner les deux biens-fonds sur un même titre de propriété après l’acquisition.

Plus la ferme d’élevage prend de l’expansion, plus il sera difficile d’y adjoindre de nouvelles propriétés. Bon nombre d’exploitations vont donc probablement augmenter leurs superficies à mesure que des terres seront offertes dans le voisinage.

Achat de superficies additionnelles sur un autre titre de propriété

Les terres détenues en vertu d’un titre de propriété distinct permettent à l’exploitant de gérer à sa guise ses superficies. Toutefois, advenant la vente de la nouvelle propriété, la ferme d’élevage ne disposerait plus de superficies suffisantes.

Préférablement, la nouvelle propriété sera située à proximité de la ferme d’élevage afin que les coûts de transport soient réduits au minimum. Tenir compte de l’accessibilité du terrain pour les épandeurs ou les systèmes d’épandage par écoulement direct, comme les rampes d’épandage (figure 2).

Remarque : La LGEN interdit l’utilisation de lances d’irrigation à trajectoire haute dans le cadre de système d’épandage par écoulement direct lorsque le fumier épandu contient plus de 1 % de matière sèche.

Photo d’un tracteur qui tire un boyau traîné servant à épandre du fumier liquide dans un champ
Figure 2. L’utilisation d’une rampe d’épandage pour épandre le fumier liquide peut réduire les risques de compactage.

Location de superficies à long terme

La location à long terme de terres cultivables par le propriétaire d’une exploitation d’élevage est habituellement un meilleur choix que la convention d’épandage. Le locataire peut ainsi planifier son calendrier d’activités culturales ainsi que son choix de cultures, de manière à faciliter les épandages de fumier. Cet aspect est particulièrement important lorsque la capacité de stockage de l’exploitation est limitée.

Remarque : Dans le cadre de la Loi sur la gestion des éléments nutritifs (LGEN), les superficies louées ou possédées en propre par le propriétaire sont considérées comme similaires, c’est-à-dire qu’elles sont toutes sous la responsabilité de l’exploitant.

Convention d’épandage

La convention d’épandage constitue un autre moyen d’éliminer du fumier sans acheter de superficies additionnelles. Bien que les superficies qui font l’objet de la convention d’épandage ne soient pas incluses dans le titre de propriété de l’exploitant, ce dernier doit rapporter ces superficies sur le formulaire de déclaration d’unité agricole lorsqu’il élabore la stratégie de gestion des éléments nutritifs (SGEN).

Remarque : La convention d’épandage ne constitue pas une exigence du Règlement sur la gestion des éléments nutritifs, mais le producteur peut y avoir recours.

La convention peut être valable pendant un à cinq ans ou plus. Les propriétaires de biens-fonds seront plus intéressés à renouveler la convention à long terme si l’épandage de fumier est avantageux pour leurs terres. Si le fumier n’est pas épandu uniformément ou si l’épandage cause certains dommages, le propriétaire n’y verra aucun avantage et pourrait donc refuser de renouveler l’entente. Les deux parties ont de meilleures chances de s’entendre si l’on fait faire une analyse des éléments nutritifs, qu’un PGEN existe, et que l’épandage est uniforme et ne cause pas de compactage du sol.

Location de superficies à court terme

Envisager de conclure un bail à court terme lorsque l’exploitation d’élevage est située dans une région où les terres à louer sont nombreuses, de sorte que la fin d’un bail ne pose pas problème. Dans ce cas, il est plus facile de remplacer une location si celle-ci prend fin pour une raison quelconque. S’il y a rarement des terres à louer dans la région, il est préférable de ne pas compter sur la location à court terme pour accroître les superficies d’épandage.

Remarque : Dans le cas d’une unité agricole règlementée, la convention d’épandage ou le bail peuvent être d’une durée d’un an. Il est en effet probable que l’exploitant renouvellera l’entente durant la période visée par la stratégie. Dans le cas contraire, il est recommandé d’élaborer une nouvelle stratégie de gestion (SGEN) si le manque de superficies d’épandage signifie que les quantités de fumier produites excèdent ce qui est prévu dans la SGEN.

Accès aux superficies d’épandage

Dans les cinq cas décrits plus haut, il faut tenir compte de l’accessibilité aux champs pour les épandeurs en raison des volumes importants de fumier en cause. Ainsi, pour une dose d’application habituelle de 47 m3 de fumier/ha (5 000 gallons/acre), 2 500 tonnes impériales de fumier seraient épandues sur 40,5 hectares (100 acres), ce qui correspond à environ six fois le poids sec du maïs qui serait récolté sur une superficie équivalente (figure 3).

Photo d’un champ labouré qui montre des traces de pneus humides formées à la suite d’épandages répétés de fumier
Figure 3. Les risques de compactage doivent être évalués avant le transport et l’épandage du fumier.

Il peut être coûteux de transporter 2 500 tonnes de fumier liquide dans une remorque de tracteur à un endroit éloigné (à plus de 3 km ou 2 milles). Les coûts réels de transport dépendent d’un certain nombre de facteurs dont la quantité de fumier à transporter, la distance à parcourir, l’accès pour le matériel d’épandage et les caractéristiques de la route comme la présence de pentes, la traversée de villes, de villages ou de grandes routes, etc. L’épandage de fumier à un endroit éloigné plutôt que dans le voisinage, par exemple, peut coûter un cent de plus par gallon de fumier épandu à cause du transport. Pour un taux d’épandage de 47 m3/ha (5 000 gallons/acre), il en coûterait 124 $/ha (50 $/acre) de plus.

Si l’on utilise des épandeurs, il faut prendre en compte le transport sur la route et la traverse éventuelle d’intersections majeures pour se rendre dans un champ éloigné. Les virages sur les grandes routes sont très dangereux puisque les grosses citernes réduisent ou bloquent souvent la visibilité. Par temps chaud, les virages fréquents pour une citerne chargée à essieux multiples peuvent causer d’importants dommages à la chaussée. Il est imprudent de traîner une grosse citerne au moyen d’un tracteur trop petit, et l’équipement peut s’en trouver endommagé.

Les systèmes d’épandage de fumier liquide à écoulement direct reposent sur une canalisation qui apporte le fumier jusqu’au champ. Dans bon nombre de cas, il faut traverser au moins un chemin, un cours d’eau ou une propriété privée. On doit obtenir une autorisation pour traverser une route ou l’emprunter. Dans le cas d’une exploitation d’élevage, on peut envisager d’enfouir la canalisation pour atteindre les champs éloignés. Les frais initiaux sont plus élevés, mais l’installation offre un accès rapide et à long terme aux champs.

Option 2. Réduire les quantités de fumier à épandre

La réduction des quantités d’éléments nutritifs dans le fumier diminuera les superficies d’épandage requises (à moins que le chargement de liquide soit le facteur limitatif). Voici trois moyens d’y parvenir.

Améliorer l’efficacité de la conversion alimentaire

Les démarches entreprises pour hausser la productivité d’une exploitation animale (telles que l’amélioration génétique ou l’équilibre des rations alimentaires) vont contribuer à améliorer la conversion alimentaire. Dans certains cas, toutefois, il peut y avoir un compromis à faire entre l’efficacité alimentaire et la productivité. L’exploitant doit tenir compte de l’ensemble des facteurs avant de prendre une décision.

Des additifs spécialement conçus pour faciliter l’assimilation de certains éléments nutritifs peuvent être utilisés dans les rations animales. Ces produits devraient améliorer la conversion alimentaire et réduire les quantités d’éléments nutritifs rejetés dans le fumier. On a observé, par exemple, que la phytase réduisait de 25 à 50 % la teneur en phosphore dans le fumier de porc.

Par ailleurs, en équilibrant les rations de façon qu’elles correspondent mieux aux besoins nutritionnels des animaux, on peut aussi réduire les quantités de fumier produit, tout en diminuant le gaspillage d’aliments. On peut aussi diminuer le gaspillage par l’utilisation d’aliments de qualité, de mangeoires qui ne favorisent pas le déversement des aliments, ainsi que par une gestion adéquate et par le recyclage des aliments non consommés.

Diminuer la production animale

La réduction de la production animale diminuera aussi les quantités de fumier produit. Dans le cas des exploitations d’élevage toutefois, cette démarche n’est pas toujours réaliste.

Retirer les éléments nutritifs du fumier

Certains traitements du fumier permettent de réduire les quantités d’un élément nutritif en particulier. Ainsi, si le compostage n’est pas effectué correctement, l’azote peut se volatiliser sous forme d’ammoniac. Cet azote « perdu » peut causer des problèmes d’odeur et réduire la quantité d’azote disponible pour la culture.

Option 3. Épandre davantage de fumier sans accroître les superficies

Il est également possible de gérer l’excès d’éléments nutritifs en augmentant le taux d’application du fumier sans causer de dommages à l’environnement ni réduire les rendements. Voici cinq moyens d’y parvenir.

Réduire les quantités d’engrais commerciaux utilisés

La réduction des doses d’application d’engrais commerciaux permet d’épandre de plus grandes quantités de fumier dans un champ. Le plan de gestion des éléments nutritifs doit être établi de manière à ce que les apports d’éléments nutritifs du fumier et des engrais correspondent aux besoins de la culture. Le plan doit aussi comprendre des analyses de fumier et de sol. L’outil AgriSuite du MAAARO facilite le calcul de ces équivalences et permet de vérifier certains scénarios hypothétiques.

Remarque : Il faut élaborer un plan de gestion des éléments nutritifs lorsqu’on prévoit épandre du fumier sur les champs d’une unité agricole règlementée qui produit 300 unités nutritives ou plus ou si une partie de l’unité agricole est située à moins de 100 mètres (328 pi) d’un puits municipal.

Lorsque le fumier représente une source importante d’éléments nutritifs pour un champ, il est très important de l’épandre uniformément et selon les doses prescrites. Le matériel d’épandage doit par ailleurs être précis et bien calibré. Les techniques de calibration se perfectionnent sans cesse et favorisent l’épandage uniforme du fumier (figure 4).

Photo d’un débitmètre fixé à une citerne à fumier
Figure 4. Exemple de débitmètre sur une citerne à fumier. Consulter un fournisseur pour connaître les produits offerts.

Réduire l’utilisation d’éléments nutritifs de source organique

D’autres sources d’éléments nutritifs, tels que l’enfouissement de trèfle rouge ou l’épandage de boues d’épuration, peuvent ajouter d’importantes quantités d’azote au sol. Dans la plupart des cas, la pratique est bénéfique. Toutefois, si toutes les superficies disponibles sont requises pour utiliser l’azote du fumier, il faudra réévaluer la pertinence d’avoir recours à ces sources organiques.

Améliorer le prélèvement des éléments nutritifs par la culture

L’accroissement des besoins des cultures en éléments nutritifs augmentera proportionnellement les quantités d’éléments nutritifs qui peuvent être appliqués dans le champ. Suggestions de moyens pour augmenter le prélèvement d’éléments nutritifs par la culture :

  • semer une culture qui prélève davantage d’éléments nutritifs ou modifier la rotation à cette fin (tableau 2)
  • produire des cultures qui donnent des rendements plus élevés
  • privilégier les champs ensemencés en légumineuses, comme la luzerne, car ils utilisent de grandes quantités d’éléments nutritifs (la luzerne utilisera l’azote du sol s’il est disponible, avant de produire son propre azote)

Utiliser l’outil AgriSuite afin de faciliter l’évaluation des différents scénarios possibles.

Tableau 2. Quantités d’éléments nutritifs prélevés par certaines grandes cultures courantes. L’ensilage de maïs a le plus haut taux de prélèvement, suivi par la luzerne, le soya, le maïs-grain et le blé d’automne.
CultureRendementPrélèvement
N
Prélèvement
P
Prélèvement
K
Ensilage de maïs51 tonnes métriques/ha
(23 tonnes/acre)
229 kg/ha
(204 lb/acre)
96 kg/ha
(86 lb/acre)
198 kg/ha
(177 lb/acre)
Fourrage de luzerne12 tonnes métriques/ha
(5 tonnes/acre)
309 kg/ha
(276 lb/acre)
63 kg/ha
(56 lb/acre)
294 kg/ha
(263 lb/acre)
Soya3 tonnes métriques/ha
(45 boisseaux/acre)
193 kg/ha
(172 lb/acre)
42 kg/ha
(38 lb/acre)
70 kg/ha
(63 lb/acre)
Maïs-grain11 tonnes métriques/ha
(175 boisseaux/acre)
162 kg/ha
(145 lb/acre)
82 kg/ha
(73 lb/acre)
57 kg/ha
(51 lb/acre)
Blé d’automne5,7 tonnes métriques/ha
(84 boisseaux/acre)
113 kg/ha
(101 lb/acre)
55 kg/ha
(49 lb/acre)
34 kg/ha
(30 lb/acre)

Source : AgriSuite 2021

Favoriser l’accumulation des éléments nutritifs dans le sol

Le phosphate et le potassium s’accumulent dans l’horizon du sol lorsque les quantités appliquées sont supérieures aux besoins de la culture. Si au départ le sol est pauvre en ces éléments, il est souhaitable d’en ajouter, à la condition cependant que les distances de retrait par rapport aux eaux de surface soient respectées. L’accumulation de ces éléments doit néanmoins se limiter dans le temps sous peine de causer des problèmes environnementaux ou de nuire à la croissance des plantes. Un plan de gestion préparé à l’aide de l’outil AgriSuite permet de déceler les situations pour lesquelles il est déconseillé d’appliquer du phosphore au-delà des quantités prélevées par la culture ou même d’en épandre toute quantité.

Remarque : Si la teneur du sol en P devient trop élevée, la limite relative au phosphore dans le cadre de la règlementation peut restreindre l’ajout de P au-delà des quantités prélevées par la culture, ou, dans certains cas, interdire l’ajout de tout P additionnel.

Étant donné qu’une exploitation d’élevage est une entreprise à long terme, la plupart des calculs de superficies ne devraient pas être faits en fonction d’accumulations importantes d’éléments nutritifs dans le sol. Une exception s’applique cependant lorsqu’on doit utiliser des superficies d’épandage éloignées pendant un nombre limité d’années.

Améliorer la capacité d’absorption du sol

La capacité du sol d’absorber le fumier peut être réduite lorsque les sols sont détrempés et compactés ou en pentes abruptes. On peut accroitre cette capacité par un travail du sol préalable ou en améliorant la structure du sol.

Par ailleurs, on peut appliquer des doses de fumier plus élevées en passant plusieurs fois avec l’épandeur et en appliquant chaque fois de très faibles doses.

Les risques de contamination de l’eau dans les tuyaux de drainage par les fissures à la surface du sol sont également à surveiller. On doit parfois s’en tenir à appliquer des doses réduites, travailler le sol avant l’épandage et surveiller les sorties de drainage dans les champs enclins à présenter ce type de problème.

Option 4. Transférer le fumier à un autre endroit

Il est préférable, dans certains cas, de transférer le fumier vers un autre site.

Conventions avec un courtier en fumier

Dans certaines régions de l’Ontario, un courtier en fumier (aussi appelé manutentionnaire) retirera le fumier de l’étable, pour l’entreposer et l’expédier à un autre client. Cette pratique est couramment utilisée pour la manutention du fumier solide (comme le fumier de poulets) dans les régions où la demande de fumier comme source de matière organique pour les cultures est importante.

Remarque : Lorsqu’on fait appel à un courtier, les conventions de courtage correspondantes doivent figurer dans la SGEN. Ces conventions démontrent que le producteur et le courtier conviennent qu’une fois le fumier ramassé par le courtier, la gestion du fumier se fera conformément à la SGEN ou au PGEN.

Convention de cession de fumier

On a recours à une convention de cession de fumier dans le cas de transfert de fumier vers une autre exploitation qui ne fait pas partie de la même unité agricole.

Remarque : Deux types de convention sont possibles. Si l’exploitation qui reçoit le fumier est une autre unité agricole règlementée, on a recours à une convention de cession d’éléments nutritifs. Le fumier ainsi transféré doit être inclus dans la SGEN du destinataire. Si l’exploitation qui reçoit le fumier n’est pas une unité agricole règlementée, les informations doivent être incluses dans la SGEN de l’exploitation qui a produit le fumier et la région de la ferme destinataire doit être précisée, tout comme les renseignements sur le type d’animaux concernés.

Option 5. Recourir à des traitements de fumier innovateurs

L’objectif principal des traitements de fumier est d’obtenir des matières qui sont plus faciles à manipuler et moins désagréables pour les utilisateurs et le voisinage (ce qui, par conséquent, augmente ou maintient les superficies d’épandage disponibles). Voici trois moyens de traiter le fumier.

Séparation du fumier

La séparation du fumier permet d’extraire la fraction « solide » du fumier liquide. Les matières solides se transportent facilement et sont généralement plus demandées. La partie liquide qui reste est habituellement épandue sur le site même de l’exploitation. Dans certains cas, la séparation peut être réalisée en retirant de manière continue la partie liquide du fumier. Par ailleurs, des systèmes plus complexes dotés de séparateurs à vis peuvent être utilisés pour extraire la partie solide du fumier liquide (figure 5). On estime que 20 % de tous les éléments nutritifs produits dans une étable en stabulation libre peuvent être ainsi « solidifiés ».

Photo d’un séparateur à vis dans un local d’une étable
Figure 5. Séparateur à vis qui extrait les matières solides du fumier liquide.

On peut aussi obtenir des matières solides en modifiant le système de manutention et d’entreposage du fumier de manière à produire du fumier sous forme solide. Ainsi, des systèmes de manutention à courroie dans les poulaillers de pondeuses sont utilisés pour produire du fumier solide parallèlement à des pratiques de conservation de l’eau. Des recherches démontrent que la même technologie peut être utilisée dans les porcheries d’engraissement où une courroie inclinée sous les lattes sépare immédiatement les solides des liquides.

Compostage du fumier

Le compostage du fumier solide réduit son volume de 30-50 % et diminue les odeurs qui s’en dégagent. Les volumes à manipuler sont donc moindres et le produit obtenu peut être utilisé en horticulture ou par des particuliers.

Accroître la concentration d’éléments nutritifs du fumier liquide

La réduction de la teneur en eau du fumier liquide fait en sorte que les éléments nutritifs sont plus concentrés dans le fumier, ce qui justifie plus facilement le coût du déplacement des éléments nutritifs vers des champs éloignés. Le fait d’empêcher l’eau du toit de tomber dans le réservoir, de couvrir ce dernier ou d’installer des abreuvoirs qui réduisent les débordements contribue souvent à diminuer les volumes de déjections à manipuler. L’installation de trémies-abreuvoirs dans les porcheries d’engraissement peut réduire d’environ 20 % le volume des déjections à manipuler.

Digesteurs anaérobies

Un digesteur anaérobie traite le fumier dans un milieu sans oxygène. Le procédé entraîne la formation de biogaz qui est utilisé pour chauffer le digesteur; les excédents servent à produire de la chaleur et de l’énergie électrique. La digestion anaérobie ne réduit pas le volume du fumier ni sa teneur en éléments nutritifs, mais elle diminue considérablement les odeurs et le nombre d’organismes pathogènes dans l’effluent.

Conclusion

Il existe de nombreuses façons de réduire les superficies d’épandage requises, notamment en faisant une bonne planification avant de construire de nouvelles installations d’élevage ou de les agrandir afin de s’assurer que les superficies disponibles sont suffisantes pour qu’on y épande le fumier produit. Dans les cas où les superficies d’épandage correspondent presque exactement aux besoins de l’exploitation, il est souhaitable que l’exploitant se dote d’un plan d’urgence détaillé afin de faire face à une hausse des volumes de fumier ou une diminution des superficies disponibles.

Ressources

Fiche technique connexe du MAAARO, Conventions de cession et de courtage de fumier

Voir l'annexe 1 dans le pdf pour un exemple d'accord d'épandage de fumier

Loi de 1990 sur la gestion des éléments nutritifs — Règlements et protocoles

Avis de non-responsabilité – Gestion des éléments nutritifs

Les renseignements dans cette fiche technique sont fournis à titre d’information seulement et ne devraient pas être utilisés pour déterminer vos obligations légales. Pour ce faire, consultez la loi pertinente. Si vous avez besoin de conseils juridiques, consultez un avocat. En cas de contradiction entre l’information fournie dans la fiche technique et toute loi applicable, la loi a préséance.

Cette fiche technique a été mise à jour par Richard Brunke, ing., ingénieur en gestion des éléments nutritifs, MAAARO.