Production de biométhane et de gaz naturel renouvelable à partir de systèmes de biogaz agricoles et alimentaires
Renseignez-vous sur les possibilités liées à la production et à l’utilisation de biométhane et de gaz naturel renouvelable à partir de systèmes de biogaz dans les fermes et les installations de transformation des aliments en Ontario.
ISSN 1198-7138, Publié avril 2024
Introduction
La présente fiche technique décrit les possibilités liées à la production et à l’utilisation du biométhane et du gaz naturel renouvelable à partir de systèmes de biogaz dans des exploitations agricoles et des entreprises de transformation des aliments en Ontario.
Biométhane et gaz naturel renouvelable
Le biométhane est un carburant gazeux contenant entre 55 % et 99 % de méthane qui est produit à partir du biogaz généré par la digestion anaérobie de matières organiques ou à partir de gaz d’enfouissement. Le biométhane est un biogaz qui est raffiné par l’élimination des contaminants, comme le sulfure d’hydrogène, et de l’humidité. De plus, en débarrassant le biométhane d’autres contaminants, principalement l’azote (N2), l’oxygène (O2) et le dioxyde de carbone (CO2), on peut en faire un méthane presque pur. Le méthane est le principal constituant du gaz naturel classique. Le gaz naturel renouvelable est un biométhane qui a été épuré afin de répondre aux normes de qualité des gazoducs.
Consultez la fiche technique du Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Agroentreprise (MAAAO) Rudiments de la digestion anaérobie pour de plus amples renseignements concernant la production de biogaz agricole.
Énergie dans le biométhane provenant du fumier
On estime que le fumier provenant d’une vache laitière produit, chaque année, une quantité de carburant permettant de parcourir 5 000 km en camionnette. Pour en arriver à ce résultat, on suppose que le fumier d’une vache laitière (y compris de ses veaux) produit quelque 1 350 m3 de biogaz par année et que 60 % de ce biogaz est du méthane.
Production de biométhane à la ferme
À l’heure actuelle, du biométhane est produit dans plusieurs systèmes de biogaz agricoles à l’échelle canadienne. L’exploitation du premier système de biogaz agricole produisant du biométhane a débuté en 2010 en Colombie-Britannique (figure 1). Le biogaz est produit dans quatre digesteurs anaérobies alimentés par du fumier liquide, de l’ensilage de maïs et des déchets alimentaires provenant des collectivités avoisinantes. Le biogaz est continuellement épuré afin de pouvoir être utilisé en remplacement du gaz naturel, produisant environ 90 000 gigajoules (GJ) par année. Le gaz ainsi épuré (gaz naturel renouvelable) est vendu à la société de distribution de gaz locale.
Utilisation du biométhane
Une fois créé, le biométhane peut être géré et utilisé à la place du gaz naturel ou d’autres carburants gazeux. Voici certaines des utilisations courantes du biométhane :
- Injection dans le gazoduc : Le biométhane qui a été transformé en gaz naturel renouvelable doit satisfaire à des teneurs maximales et minimales précises en ce qui concerne certains gaz, l’humidité et d’autres composants afin de pouvoir être injecté dans le gazoduc. Il doit être mis sous pression, et diverses règles de sécurité et de mesure doivent être respectées (figure 2). Une fois que le gaz naturel renouvelable est injecté dans le gazoduc, on le considère tout simplement comme du gaz naturel, bien que des attributs ou des crédits environnementaux lui donnant une valeur supplémentaire puissent y être associés. Selon les modèles contractuels, il peut être acheté par un utilisateur final ou par le service de distribution de gaz. En Ontario, le processus d’injection dans le gazoduc est réglementé par la Commission de l’énergie de l’Ontario. Si le système de biogaz n’est pas installé près d’un gazoduc convenable, le biométhane ou le gaz naturel renouvelable peut être transporté dans des cylindres sous pression montés sur une remorque vers un point d’injection central.
- Gaz comprimé pour les clients non reliés à un gazoduc : Le biométhane ou le gaz naturel renouvelable peut être comprimé et entreposé dans des contenants sous pression qui peuvent être utilisés sur place ou ailleurs. Cette option peut s’avérer intéressante pour les utilisateurs de carburant qui emploient actuellement d’autres types de carburants plus coûteux pour chauffer leur serre ou leurs installations pour bovins, par exemple.
- Biométhane : Dans certains cas, le biogaz qui présente une teneur en méthane de seulement 60 % peut être utilisé à la place d’autres carburants. Il faut toutefois le débarrasser adéquatement de certains gaz contaminants et de la vapeur d’eau qu’il renferme. Les 40 % restants du volume de gaz (autre que le méthane) sont composés essentiellement de dioxyde de carbone, ce qui signifie que le carburant a une densité énergétique inférieure à celle du méthane pur. Cela peut être pris en compte par un système d’alimentation, un appareil ou un moteur conçu adéquatement. La figure 3 illustre un prototype de tracteur agricole fonctionnant avec du biogaz présentant une teneur en méthane de 60 %. Le moteur peut fonctionner au moyen d’un mélange de biogaz et de diesel (ce qu’on appelle un moteur hybride). Le prototype tire de 70 à 80 % de ses 110 hp du biogaz épuré (contenant 60 % de méthane et 40 % de dioxyde de carbone).
Source : Valtra et AGCO.
Systèmes de biométhane ou de gaz naturel renouvelable agricoles
Un système de biogaz agricole construit pour produire du biométhane ou du gaz naturel renouvelable ressemble en bien des points à un système de biogaz électrique traditionnel. Les systèmes de biogaz produisant du gaz naturel renouvelable présentent toutefois quelques différences clés (en plus de l’absence d’équipement de production d’électricité) :
- Emplacement près d’une conduite de gaz naturel : Dans le cas d’un système alimentant le gazoduc en gaz naturel renouvelable, il est nécessaire d’installer le système à un endroit où il sera possible de le raccorder au gazoduc. À bien des endroits en milieu rural ontarien, il n’existe aucun service de distribution de gaz naturel. Par conséquent, l’injection dans le gazoduc peut ne pas s’avérer viable pour de nombreuses exploitations d’élevage du seul fait de leur emplacement. Il peut être possible dans de tels cas de comprimer et de transporter le gaz naturel renouvelable par camion dans des remorques porte-tubes vers des stations d’injection sur le gazoduc.
- Grande taille : Règle générale, la mise à niveau de la technologie actuellement sur le marché exige un taux de production de gaz supérieur à ce que peuvent offrir la plupart des systèmes de biogaz agricoles qui sont construits en Ontario aujourd’hui. En Ontario, l’acquisition de suffisamment d’intrants pour nourrir un système de taille appropriée peut être réalisée avec des mélanges de matières non agricoles, de cultures énergétiques ou de résidus de cultures ou grâce à l’importation de fumier de plusieurs exploitations agricoles afin de produire suffisamment de biogaz.
Avantages du biométhane ou du gaz naturel renouvelable
De nos jours, un certain nombre de raisons favorisent la production de biométhane ou de gaz naturel renouvelé dans les systèmes de biogaz :
- Le gaz naturel renouvelable n’est pas un combustible fossile : Avant tout, le gaz naturel renouvelable agricole est dérivé de la biomasse renouvelable, de déchets alimentaires et de fumier et non pas d’une source de combustible fossile. Cela réduit les répercussions des gaz à effet de serre liées à l’utilisation de gaz naturel. Les consommateurs de carburant peuvent souhaiter acheter un carburant dont l’empreinte des gaz à effet de serre est inférieure à celle du gaz naturel classique dérivé des combustibles fossiles. Un véhicule au gaz naturel alimenté avec du gaz naturel renouvelable entraîne une réduction importante de l’intensité des émissions de carbone du carburant comparativement au diesel.
- Utilisation efficace du biogaz : Lorsque le biogaz est produit pour d’autres usages (gestion des déchets, traitement des eaux usées), sa transformation en gaz naturel renouvelable permet une utilisation efficace de l’énergie du carburant, la quasi-totalité de cette énergie étant utilisée à des fins énergétiques. Par comparaison, la combustion de biogaz ou de gaz naturel renouvelable dans un système de cogénération pour produire de l’électricité peut entraîner des pertes et s’avérer inefficace si l’excès de chaleur n’est pas utilisé sur place.
- Accessibilité d’un raccord à la conduite de gaz : Un système de biogaz utilisant du gaz naturel renouvelable peut être situé dans un endroit où la capacité du réseau électrique n’est pas suffisante pour permettre de construire ou d’agrandir une installation de biogaz produisant de l’électricité.
Avantages liés à l’utilisation de gaz naturel renouvelable provenant de systèmes de biogaz agricoles et alimentaires
En plus des avantages pour le changement climatique associés à l’utilisation de méthane dérivé d’une source de carburant non fossile, lorsque des marchés existent pour le gaz naturel renouvelable, l’exploitation de systèmes de biogaz agricoles et alimentaires présente des avantages, notamment :
Traitement des matières
- Réduction des émissions : L’entreposage, l’épandage ou l’élimination du fumier non traité et des déchets alimentaires peuvent produire des gaz à effet de serre ou des émissions contribuant au smog. En récupérant le dioxyde de carbone dans un système de biogaz et en l’utilisant comme gaz naturel renouvelable, on évite les émissions des procédés traditionnels.
- Réduction des odeurs : Le fumier et les déchets alimentaires utilisés dans les systèmes de biogaz auraient pu autrement contribuer à l’émission d’odeurs s’ils avaient été manipulés selon les autres méthodes classiques. La digestion de ces matières dans un système de biogaz permet de réduire les odeurs, ce qui aide à diminuer les sources de nuisance dans les régions rurales et suburbaines.
- Réduction des agents pathogènes : L’exploitation d’un système de biogaz dont le fumier est le principal intrant entraîne une réduction des agents pathogènes (comme l’E. coli). La diminution des agents pathogènes à la source constitue un autre obstacle qui vient réduire les risques pour les sources d’eau potable souterraine et de surface, ce qui contribue à l’atteinte des objectifs liés à la protection des sources d’eau dans la province.
Gestion des déchets alimentaires et des sous-produits
- Élimination de l’enfouissement : En se servant de déchets alimentaires pour produire le biogaz, on évite l’enfouissement des déchets alimentaires et des sous-produits de la transformation des aliments en les réacheminant vers des installations de production d’énergie. Bien qu’on puisse retenir une partie des émissions du méthane provenant des sites d’enfouissement une fois ceux-ci recouverts, il est beaucoup plus efficace de récupérer tout le méthane directement et de l’employer dans un système de biogaz.
- Réduction des coûts liés à la gestion des déchets pour le secteur alimentaire : L’utilisation des déchets alimentaires et des sous-produits dans les systèmes de biogaz permet habituellement de réduire les coûts de manipulation en deçà des coûts associés à d’autres approches de gestion (enfouissement, compostage et épandage). Les approches traditionnelles en matière de gestion des déchets peuvent s’avérer coûteuses, puisque les déchets alimentaires peuvent présenter des volumes importants, être humides et odorants, et qu’ils peuvent être générés en hiver, ce qui exige des solutions d’entreposage. Les systèmes de biogaz peuvent éliminer tous ces problèmes et peuvent représenter une bonne solution à un coût moindre. Ainsi, le secteur alimentaire de l’Ontario peut éliminer certains coûts et renforcer sa compétitivité.
- Retour des éléments nutritifs et du carbone à la terre : Lorsque les déchets alimentaires sont utilisés dans les systèmes de biogaz et que le digestat est retourné dans les champs agricoles pour être épandu comme du fumier, des éléments nutritifs, tels que l’azote, le phosphore et le potassium, sont retournés au sol. La partie indigeste du dioxyde de carbone dans les déchets alimentaires contribue aussi à la santé du sol, l’enrichissant en matières organiques. Il s’agit là d’une meilleure solution que l’enfouissement des déchets alimentaires ou leur rejet dans les égouts, qui entraînent la perte des éléments nutritifs et du dioxyde de carbone.
Développement économique rural
- Production locale de carburant : Au lieu de se procurer de l’énergie auprès d’autres collectivités publiques, les entreprises locales se convertissent en producteurs de carburant, ce qui permet de conserver les dollars investis dans l’énergie dans la province.
- Synergies locales : L’installation de systèmes de biogaz près des sources de déchets ou de la destination des produits finaux permet de conserver les revenus d’emplois, du transport et fiscaux dans la collectivité. Cette approche permet de boucler la boucle en ce qui concerne le système de production agricole et alimentaire.
- Revenus découlant des marchés du carbone : La faible intensité des émissions de carbone du gaz naturel renouvelable en fait un produit de base important permettant aux services publics, aux gouvernements et aux entreprises de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les politiques et les programmes concernant l’énergie renouvelable permettent aux installations de biogaz de commercialiser le gaz naturel renouvelable en vertu d’un contrat, ce qui permet aux acheteurs de respecter les objectifs en matière de contenu renouvelable et d’émissions de gaz à effet de serre. Les possibilités de revenu appuient la construction, les emplois, les investissements et la diversification économique dans les exploitations agricoles.
Conclusion
La présente fiche technique donne un aperçu de la production de biométhane et de gaz naturel renouvelable. Les marchés potentiels pour le biogaz peuvent représenter une nouvelle avenue pour profiter des avantages environnementaux et économiques associés aux systèmes de biogaz agricoles et alimentaires. La demande pour du gaz naturel renouvelable est en hausse étant donné que les entreprises, le secteur de l’énergie et les collectivités publiques cherchent à atteindre les objectifs liés aux émissions de gaz à effet de serre et la sécurité énergétique, ainsi qu’à trouver des solutions de rechange aux combustibles fossiles. La digestion anaérobie, la gestion des déchets organiques et la production d’énergie renouvelable se sont avérées bien fonctionner dans les exploitations agricoles. Les politiques provinciales et fédérales continuent d’évoluer pour favoriser cette précieuse chaîne de valeur de la transformation des déchets en énergie renouvelable.
Rédaction
Cette fiche technique a été écrite par Jake DeBruyn, ingénieur en intégration des nouvelles technologies, MAAAO et Chris Duke, analyste de programme, MAAAO.