ISSN 1198-7138, Publié mars 2022

Aperçu

Les chiens de berger sont des chiens spécialement sélectionnés pour vivre avec les troupeaux qu’ils gardent afin de réduire la prédationfootnote 24.

Depuis des centaines d’années, ces animaux robustes vivent dehors à longueur d’année avec les moutons, résistant à la rigueur du climat (figure 1). La présente fiche technique traite de questions concernant l’entretien et les soins à donner aux chiens de berger, particulièrement en hiver.

Les fiches complémentaires suivantes contiennent d’autres renseignements à l’intention des producteurs qui souhaitent se doter de chiens de berger :

Troupeau de moutons en train de manger du foin dehors en hiver en compagnie d’un chien de berger. Photo : Ontario Sheep Farmers.
Figure 1. Les chiens de berger se lient aux moutons avec qui ils vivent et accompagnent le troupeau dans l’abri de ce dernier, plutôt que de se réfugier dans une niche. Photo : Ontario Sheep Farmers.

La vie d’un chien de berger

Un chien de berger s’attache au troupeau avec lequel il vit et cherche normalement à rester auprès des brebis ou des chèvres qu’il garde.

D’après les éleveurs de moutons, le chien pense qu’il est un mouton. Les chercheurs estiment quant à eux que le chien de berger traite les moutons comme s’il s’agissait de chiens, et que les moutons traitent le chien comme s’il s’agissait d’un autre moutonfootnote 24footnote 25footnote 26. Le troupeau de moutons et les chiens réagissent à leur comportement alimentaire et signal d’alarme mutuelsfootnote 26.

Un chien de berger travaille 24 heures sur 24, à l’affût de tout intrus. Souvent, la simple présence du chien dans les parages ou un aboiement sonore amènent un prédateur à abandonner les vues qu’il pouvait avoir sur le troupeaufootnote 25footnote 26.

Ces chiens sont résistants et même durant les intempéries ils peuvent choisir de ne pas se réfugier dans des abris, comme une niche ou une étable. Ils préfèrent dormir là où ils ont une bonne vue des environs, ainsi que des moutons ou des chèvres. Des études sur l’agriculture pastorale ont montré que généralement, de nuit, les chiens se tiennent à 200 m au plus de la nourriture, de l’eau et des gîtes de nuit des chiens et du troupeaufootnote 27.

Un chien de berger restera normalement efficace pendant environ cinq à six ans après être parvenu à maturité. Il est important de souligner que les besoins des chiens évoluent avec le temps et que les plus vieux chiens peuvent exiger plus de soins si l’on veut qu’ils demeurent efficaces et en santé.

Les chiens face au froid, au vent et à la pluie

Les races utilisées comme gardiens de troupeaux, notamment les chiens de montagne des Pyrénées, les bergers de Maremme, de Komondor et d’Akbash, sont des animaux résistants qui préfèrent souvent même par mauvais temps ne pas se réfugier dans les abris pour chiens ou dans la bergeriefootnote 28.

Les chiens de berger ont généralement une couche extérieure de longs poils plats résistants au froid qui ne laissent pas pénétrer la pluie, et une épaisse sous-couche « duveteuse » de poils gardant la chaleur. Les chiens à oreilles courtes et pelage rugueux avec sous-couche peuvent supporter de plus basses températures que les chiens à pelage lisse, à charpente de lévrier.

Les professeurs Ray et Lorna Coppinger ont étudié 1 000 chiens de berger pendant plus de 10 ans, dans le cadre d’un projet sur les chiens gardiens de troupeaufootnote 25. Selon Ray Coppinger, l’inclinaison des chiens à dormir dehors est liée à leur masse corporelle (leur poids).

Les gros chiens ont moins de difficulté à supporter le froid de nos hivers que la chaleur de nos étésfootnote 29. En effet, les chiens sont moins aptes à émettre de la chaleur qu’à la conserver. À une température d’environ -32 °C, les chiens de taille moyenne (moins de 32 kg) commencent à se prémunir contre le froid en tremblant ou en accélérant leur métabolisme (brûlant de l’énergie pour produire de la chaleur). Les chiens plus gros, comme les chiens de berger qui pèsent autour de 45 kg, peuvent endurer des températures encore plus basses avant de réagir au froidfootnote 29.

Les abris

Les brebis à toison développée qui sont en bonne santé et correctement nourries peuvent passer l’hiver dehors sans accès à la bergerie. Le bétail et les chiens de berger ont toutefois besoin d’un abri pour les protéger du vent les journées très froides et venteuses.

Un brise-vent peut être constitué de buissons entourant le champ qui bloquent le vent ou de buissons situés dans le champ et où les moutons peuvent se réfugier pour s’y abriter. Les clôtures brise-vent en bois ressemblant à de hautes barrières pare-neige, ou partiellement faites d’une toile brise-vent poreuse, peuvent offrir aux moutons et au chien un abri adéquat contre le vent.

Les moutons et les chèvres peuvent aussi se protéger mutuellement du vent. Lorsqu’un animal du troupeau exposé au vent se refroidit, il se fraye alors un passage vers le milieu du troupeau.

Les chiens de berger font de même, se faufilant au centre du troupeau lorsqu’ils veulent se mettre à l’abri du vent. Ils s’allongent près de la clôture du champ, se servant des arbustes et des amas de neige comme abris. On a vu des chiens s’allonger sur des balles de foin dans un râtelier. Si des balles rondes de foin sont déroulées pour nourrir le bétail, les chiens s’allongeront sur le foin.

Certains répondants à l’enquête ontarienne sur les chiens de berger, effectuée en 2003 par l’entremise du groupe de travail du groupement Large Flock Operators (LFO), ont indiqué que les chiens d›un certain âge cherchaient à s’abriter de la pluie froidefootnote 30. D’autres ont mentionné que leurs chiens dormaient à l’extérieur des bergeries ouvertes, tandis que les moutons dormaient à l’intérieurfootnote 30. Parmi les membres du LFO qui ont participé à l’enquête, ceux qui fournissaient une niche à leurs chiens de berger ont dit que les chiens n’utilisaient jamais ces niches et qu’ils dormaient toujours dehorsfootnote 30.

De grosses exploitations de l’Ouest américain qui font paître les moutons en terrains libres (c’est-à-dire sans clôtures) installent des niches dans les pâturages d’été pour fournir aux chiens un poste de garde et d’alimentation. Ils placent une pierre à lécher à l’arrière de la niche pour attirer les moutons vers cette zone, afin que la niche devienne le point de socialisation pour les moutons et les chiens, ce qui aide à réduire l’errancefootnote 26.

Les chiens de berger ont une bonne capacité d’adaptation et ils peuvent modifier leurs habitudes lorsque les conditions changent. En Ontario, les chiens de berger ne sont pas attachés et ont la possibilité de faire des choix et de modifier leur microclimat selon leurs besoins. En utilisant le même abri que les animaux qu’ils protègent, un chien bien nourri et en bonne condition physique n’a pas besoin d’une niche traditionnelle.

L’alimentation

Les besoins des chiens de berger en éléments nutritifs peuvent varier selon leur âge, la saison et la pression exercée par les prédateurs.

On doit nourrir les chiens avec de la moulée de qualité pour chien en visant le maintien d’un bon état de chair où les chiens ne sont ni trop maigres ni trop gras.

Les chiens de berger ne devraient pas être autorisés à manger des moutons morts, et toute viande transformée à la ferme doit être cuite jusqu’à une température interne de 72 °C ou congelée pendant au moins 10 jours afin de prévenir toute infection du bétail par des parasites. La « cysticercose ovine » est causée par un stade de croissance intermédiaire du Taenia ovis, un ver solitaire qui affecte les chiensfootnote 31footnote 32. Le parasite cause des lésions musculaires chez les ovins, lesquelles peuvent entraîner une condamnation des carcassesfootnote 31footnote 32.

Les propriétaires de chiens de berger ayant participé à l’enquête augmentaient la quantité de nourriture offerte aux chiens en période de froid intense, ou la teneur en matières grasses et le contenu énergétique de leur alimentation durant les mois d’hiver.

Certains éleveurs de moutons disposent de nourrisseurs automatiques pour les chiens, ce qui permet à ces derniers de s’alimenter s’ils ont besoin davantage de nourriture et au moment où ils en ont besoin. Toutefois, une telle méthode risque d’attirer la vermine et d’augmenter considérablement les coûts d’alimentationfootnote 31.

Considérations

Étant donné que ces chiens préfèrent souvent rester dehors par tous les temps (figure 2), il se peut que leur métabolisme s’accélère en réaction aux fortes intempéries, ce qui les amène à devoir manger davantage. Selon un fabricant d’aliments pour chiens, une fois que la température a atteint le point où le chien de berger se met à trembler ou cherche à éviter le froid, il lui faut 7,5 % de nourriture en plus pour toute nouvelle baisse de température de 5,5 °Cfootnote 33.

Lorsque des coyotes harcèlent un troupeau et « énervent » les chiens de berger, ces derniers perdent souvent du poids. Certains producteurs modifient donc leur alimentation durant ces périodes de l’année pour leur donner une nourriture plus riche au plan énergétique.

Le National Research Council a indiqué, dans son document intitulé Nutrient Requirements for Dogs (besoins nutritifs des chiens) que « les besoins liés au travail et aux conditions environnementales difficiles rendent (...) la planification systématique pour suppléer à des besoins variés non réalistes. On recommande par conséquent d’approvisionner en nourriture [....] un animal à condition physique réduite [...] car une perte de poids généralisée constitue un signe évident d’une déficience énergétique simplefootnote 34. » En d’autres termes, un chien qui perd du poids a besoin davantage de nourriture ou d’une alimentation à plus fort contenu énergétique.

Chien de berger se tenant debout devant des moutons en hiver. Photo : Ontario Sheep Farmers.
Figure 2. Les chiens de berger travaillent 24 heures par jour. Ils ont besoin d’un surplus de nourriture en hiver et quand les prédateurs exercent une pression sur le troupeau. Photo : Ontario Sheep Farmers.

Tout spécialement en cas de temps rigoureux, il importe de surveiller la condition physique des chiens de bergerfootnote 35. Certains éleveurs le font tous les jours, d’autres procèdent à des relevés formels de l’état de leurs chiens plusieurs fois par an. À cette fin, on place les deux pouces sur la colonne vertébrale du chien et on laisse descendre les doigts le long de sa cage thoracique. On doit être en mesure de sentir ses côtes, car un chien de berger ne doit pas être gras. Si l’on n’arrive pas à sentir l’arête de chaque côte, il se peut que le chien soit trop gros. Lorsqu’on regarde l’échine du chien, vue du dessus, on devrait être en mesure de discerner sa taille clairement définie derrière les côtes. Vu de côté, l’abdomen doit paraître rentré.

Soins vétérinaires

Le chien de berger doit être intégré au plan de santé du troupeau, pour sa propre santé et celle du troupeau également.

Des protocoles de soins vétérinaires réguliers doivent être établis avec le vétérinaire du troupeaufootnote 31footnote 32. Ces protocoles doivent inclure :

  • un calendrier de vermifugation, en vue de réduire les risques de condamnations de carcasse
  • comporter aussi des stratégies pour lutter contre d’autres parasites (comme le ver du cœur, les puces et les tiques)
  • ainsi que les vaccins recommandés pour les chiens de bergerfootnote 31

En Ontario, tous les chiens de plus de 12 semaines sont tenus d’être vaccinés contre la rage en vertu du Règl. de l’Ont. 567 (Immunisation contre la rage) de la Loi sur la protection et la promotion de la santé. Le vétérinaire du troupeau peut recommander d’autres vaccins selon les risques d’exposition à d’autres agents pathogènes.

Conclusion

Les chiens de berger sont des races résistantes bien adaptées au climat de l’Ontario, mais il se peut qu’ils aient besoin de soins additionnels durant les mois d’hiver.

Les chiens de berger préfèrent rester avec les animaux qu’ils protègent et utiliser le même abri qu’eux, adaptant ainsi leurs habitudes selon les conditions.

Ces chiens devraient être :

  • alimentés de manière à ce qu’ils restent en bonne forme
  • recevoir les soins vétérinaires appropriés permettant d’assurer leur santé et celle du troupeau

Dans l’ensemble, les chiens de berger représentent une composante valable d’une stratégie visant à réduire la prédation au sein du troupeau, mais ils ont aussi besoin d’abris, de nourriture et de soins adéquats pour bien remplir leur fonction.

La présente fiche technique a été rédigée par Barry Potter, conseiller en développement agricole, MAAARO, Craig Richardson, spécialiste des soins aux animaux (à la retraite), MAAARO, et Christoph Wand, spécialiste de la durabilité de l’élevage du bétail, MAAARO.


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