Cisco à museau court
Photo: Paul Vecsei

La protection et le rétablissement des espèces en péril en Ontario

Le rétablissement des espèces en péril est un volet clé de la protection de la biodiversité en Ontario. La Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition (LEVD) représente l’engagement juridique du gouvernement de l’Ontario envers la protection et le rétablissement des espèces en péril et de leurs habitats.

Aux termes de la LEVD, le gouvernement de l’Ontario doit veiller à ce qu’un programme de rétablissement soit élaboré pour chaque espèce inscrite sur la liste des espèces en voie de disparition ou menacées. Un programme de rétablissement offre des conseils scientifiques au gouvernement à l’égard de ce qui est nécessaire pour réaliser le rétablissement d’une espèce.

Dans les neuf mois qui suivent l’élaboration d’un programme de rétablissement, la LEVD exige que le gouvernement publie une déclaration qui résume les mesures que le gouvernement de l’Ontario prévoit prendre en réponse au programme de rétablissement et ses priorités à cet égard. Cette déclaration est la réponse du gouvernement de l’Ontario aux conseils scientifiques fournis dans le programme de rétablissement. En plus de la stratégie, la déclaration du gouvernement a pris en compte (s’il y a lieu) les commentaires formulés par les parties intéressées, les autres autorités, les collectivités et organismes autochtones, et les membres du public. Elle reflète les meilleures connaissances scientifiques et locales accessibles actuellement, dont les connaissances traditionnelles écologiques là où elles ont été partagées par les communautés et les détenteurs de savoir autochtones. Elle pourrait être modifiée en cas de nouveaux renseignements. En mettant en œuvre les mesures prévues à la présente déclaration, la LEVD permet au gouvernement de déterminer ce qu’il est possible de réaliser, compte tenu des facteurs sociaux, culturels et économiques.

Le programme de rétablissement pour le cisco à museau court (Coregonus reighardi) en Ontario a été achevé le 7 décembre 2018.

Le cisco à museau court se caractérise par un corps cylindrique, une petite tête et un museau court, de petits yeux et de courtes nageoires. On le considère comme une espèce disparue, mais il était historiquement présent dans les lacs Huron et Ontario.

Protection et rétablissement du cisco à museau court

Le cisco à museau court est inscrit comme une espèce en voie de disparition aux termes de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition (LEVD), qui protège tant le poisson que son habitat. La LEVD interdit à quiconque de nuire à l'espèce ou de la harceler et d'endommager ou de détruire son habitat sans autorisation. Une telle autorisation exigerait que des conditions établies par le gouvernement de l’Ontario soient respectées.

À l’échelle mondiale, le cisco à museau court était endémique (uniquement présent) dans trois des Grands Lacs : le lac Michigan, le lac Huron et le lac Ontario. Selon le rapport intitulé Mise à jour Évaluation et Rapport de situation, émis par le Comité de détermination du statut des espèces en péril de l’Ontario (CDSEPO) en 2005, bien que le cisco à museau court ait probablement disparu sur l’ensemble de son aire de répartition mondiale, les recherches menées pour trouver l’espèce n’ont pas été suffisamment approfondies pour que l’on puisse déclarer l’espèce comme étant éteinte. L’espèce a été signalée pour la dernière fois au lac Ontario en 1964, au lac Michigan en 1982 et au lac Huron en 1985. Depuis la parution du rapport du CDSEPO, des travaux d’échantillonnage plus récents ont été entrepris dans les lacs Huron et Ontario en vue de capturer un cisco à museau court; toutefois, malgré le recours à des méthodes et à des mesures d’échantillonnage convenables, aucune observation n’a été signalée. On croit que l’espèce est disparue de l’Ontario (et éteinte à l’échelle mondiale), même si le critère officiel pour cette désignation (c.-à-d. une période d'au moins 50 ans depuis le dernier signalement crédible) ne s'applique pas encore.

Le cisco à museau court est l’une des dix espèces de ciscos que l’on rencontre au Canada. Le statut du cisco à museau court se trouve compliqué par la possible hybridation entre les espèces de ciscos dans les Grands Lacs et par la taxonomie non encore établie de l'ensemble des espèces de ciscos ayant une taxonomie complexe. La détermination d’espèces individuelles peut ainsi s’avérer difficile en raison de la similarité des traits qui aurait autrement permis de distinguer les espèces les unes des autres. Cette situation est davantage compliquée par le fait que, bien que des différences génétiques aient été décelées chez les ciscos et entre eux, les résultats n’ont pas été conformes à l’interprétation historique de l’espèce (c.-à-d. en fonction des différences morphologiques).

Nous en savons très peu sur la biologie et les besoins en matière d’habitat du cisco à museau court. En Ontario, l'espèce occupait historiquement les habitats en eaux claires, froides et profondes des lacs Huron et Ontario, à une profondeur variant entre 22 et 110 m. Bien que les données sur la répartition de l'espèce soient manquantes, les habitats en eaux profondes des lacs Huron et Ontario sont abondants. Le régime alimentaire du cisco à museau court se composait principalement de crustacés d’eau douce comme la crevette marsupial (Mysis diluviana) et les amphipodes benthiques (sous-espèce Diporeia), dont on croit que le frai se produisait principalement d’avril à juin.

On soupçonne que la surpêche commerciale et possiblement la rivalité ou la prédation attribuable aux espèces introduites ont contribué à l'effondrement éventuel et à la disparition des espèces de ciscos. Si des populations subsistent, celles-ci pourraient être menacées par l’hybridation avec d’autres ciscos, y compris le cisco de fumage (Coregonus hoyi), que l’on a réintroduit. Les mesures de repeuplement actuellement en place qui visent à rétablir des populations autosuffisantes du touladi (Salvelinus namaycush) dans les lacs Huron et Ontario pourraient également constituer une menace pour le cisco en augmentant la prédation par ces espèces des populations du cisco à museau court, si elles existent. La concurrence ou la prédation attribuable aux espèces envahissantes, comme la lamproie marine (Petromyzon marinus), le gaspareau (Alosa pseudoharengus) et l’éperlan arc-en-ciel (Osmerus mordax) ont peut-être contribué au déclin des populations ou fait entrave à son rétablissement. Parmi les autres répercussions sur l’abondance des sources alimentaires du cisco à museau court, comme les amphipodes benthiques (sous-espèce Diporeia), qui sont liées aux espèces envahissantes, on compte l’incidence des moules dreissénidées (p. ex. la moule zébrée [Dreissena polymorpha]).

Le cisco à museau court constituait autrefois un élément précieux des pêches commerciales aux cyprinidés (on les appelait couramment « cyprinidés hybrides »). Toutefois, la pêche commerciale de ces espèces ne se pratique plus dans les eaux canadiennes des lacs Huron ou Ontario en raison de l’effondrement des populations du cisco dans les Grands Lacs. Si une pêche commerciale devait être instaurée à l’avenir, la surexploitation pourrait devenir une menace, sauf si elle était convenablement atténuée ou gérée.

À ce jour, aucune mesure de rétablissement visant de façon spécifique le cisco à museau court n’a été mise en œuvre. En Ontario, on recommande que les mesures de rétablissement s’attaquent à la question de savoir si l’espèce est encore présente. On recommande également de mener des travaux de recherche et de mettre en œuvre des mesures générales de conservation pouvant avoir une incidence positive sur l’ensemble des espèces de ciscos d’eau profonde. S’il est déterminé que le cisco à museau court est subsistant, il faudrait envisager l’examen des menaces et des techniques d’atténuation de ces menaces. Au fur et à mesure que de nouveaux renseignements seront disponibles à l’égard de l’espèce et des autres ciscos qui sont également présents en Ontario, ces renseignements pourront servir à l’examen et à l’adaptation des activités de protection et de rétablissement, et il se peut que l’objectif fasse alors l’objet d’une réévaluation.

Objectif du programme de rétablissement du gouvernement

L’objectif du gouvernement pour le rétablissement du cisco à museau court est d’accroître les connaissances sur l’espèce et sur l'ensemble des espèces de ciscos ayant une taxonomie complexe et sur leur habitat et, s’il est déterminé que des populations subsistent, d’atténuer les menaces qui pèsent sur le cisco à museau court.

Mesures

La protection et le rétablissement des espèces en péril sont une responsabilité partagée. Aucune agence ni aucun organisme n’a toutes les connaissances, l’autorité, ni les ressources financières pour protéger et rétablir toutes les espèces en péril de l’Ontario. Le succès sur le plan du rétablissement exige une coopération intergouvernementale et la participation de nombreuses personnes, organismes et collectivités. En élaborant la présente déclaration, le gouvernement a tenu compte des démarches qu’il pourrait entreprendre directement et de celles qu’il pourrait confier à ses partenaires en conservation, tout en leur offrant son appui.

Mesures menées par le gouvernement

Afin de protéger et de rétablir le cisco à museau court, le gouvernement entreprendra directement les mesures suivantes :

  • Continuer de mettre en œuvre la Stratégie ontarienne pour les Grands Lacs (2012), y compris l'Accord Canada-Ontario concernant la qualité de l’eau et la santé de l’écosystème des Grands Lacs pour contribuer à la restauration, à la protection et à la conservation des Grands Lacs.
  • Poursuivre la collaboration avec les partenaires fédéraux, comme Pêches et Océans Canada, et les partenaires provenant d’autres provinces ou territoires à la mise en œuvre de programmes de recherche et de surveillance des pêches, particulièrement en ce qui a trait au cisco à museau court et aux espèces cooccurrentes de ciscos d’eau profonde. Cela comprend une gestion coopérative continue par la mise en œuvre du Plan stratégique conjoint de gestion des pêches dans les Grands Lacs et la participation aux comités de gestion des Grands Lacs.
  • Renseigner les autres organismes et autorités qui prennent part aux processus de planification et d’évaluation environnementales quant aux exigences de protection prévues à la LEVD.
  • Encourager la soumission de données sur le cisco à museau court au dépôt central de l’Ontario par le biais de projets scientifiques entre citoyens, desquels il reçoit des données (comme iNaturalist), ou directement, par l’entremise du Centre d’information sur le patrimoine naturel.
  • Entreprendre des activités de communication et de diffusion afin d’augmenter la sensibilisation de la population quant aux espèces en péril en Ontario.
  • Continuer de protéger le cisco à museau court et son habitat par l’application de la LEVD.
  • Appuyer les partenaires en conservation, et les organismes, municipalités et industries partenaires et les collectivités autochtones, pour qu’ils entreprennent des activités visant à protéger et rétablir le cisco à museau court. Ce soutien prendra la forme de financement, d’ententes, de permis avec des conditions appropriées et de services
  • Encourager la collaboration, et établir et communiquer des mesures prioritaires annuelles pour l’appui gouvernemental afin de réduire le chevauchement des travaux.
  • Procéder à un examen des progrès accomplis en matière de protection et de rétablissement du cisco à museau court dans les cinq ans suivant la publication du présent document.

Mesures appuyées par le gouvernement

Le gouvernement appuie les mesures suivantes qu’il juge comme étant nécessaires à la protection et au rétablissement du cisco à museau court. On accordera la priorité aux mesures portant la mention « hautement prioritaire » en ce qui concerne le financement par le programme d’intendance des espèces en péril. Lorsque cela est raisonnable, le gouvernement tiendra également compte de la priorité accordée à ces mesures lors de l’examen et de la délivrance d’autorisations en vertu de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition. On encourage les autres organismes à tenir compte de ces priorités lorsqu’ils élaborent des projets ou des plans d’atténuation relatifs à des espèces en péril. Le gouvernement ciblera son appui sur ces mesures hautement prioritaires au cours des cinq prochaines années.

Secteurs d’intervention : Recherche et surveillance

Objectif: Mener des enquêtes sur la répartition, l’abondance et la taxonomie du cisco à museau court en Ontario.

Les difficultés liées à la distinction des espèces individuelles parmi l'ensemble des espèces de ciscos d’eau profonde ayant une taxonomie complexe dans les Grands Lacs et les difficultés liées à la compréhension des processus qui permettent à l’espèce de maintenir ces distinctions ont freiné les efforts de gestion et de protection convenables de l’espèce. Le fait de combler les lacunes en matière de connaissances sur la taxonomie de l'ensemble des espèces de ciscos ayant une taxonomie complexe pourrait contribuer à orienter la planification en matière de rétablissement et à permettre la gestion de l’espèce à un niveau et une échelle appropriés. Le cisco à museau court n’a pas été observé dans les eaux de l’Ontario depuis 1985. Les mesures de rétablissement devraient donc se concentrer sur le recensement de la présence ou de l’absence de l’espèce en Ontario par le biais de recensements ciblés ou en collaboration avec les programmes de surveillance des pêches en vigueur.

Mesures

  1. (Hautement prioritaire) Mener des enquêtes approfondies sur les incertitudes qui règnent à propos de la taxonomie de l'ensemble des espèces de ciscos ayant une taxonomie complexe, y compris le cisco à museau court. Les mesures pourraient comprendre ce qui suit :
    • réaliser des évaluations de la morphologie, de la biologie, de l’écologie et de l’habitat de l'ensemble des espèces de ciscos ayant une taxonomie complexe pour déterminer les particularités taxonomiques des espèces individuelles, y compris le cisco à museau court;
    • examiner les échantillons historiques des espèces de ciscos prélevés dans le lac Supérieur en vue de déterminer si le cisco à museau court était présent dans d’autres Grands Lacs; et,
    • analyser les spécimens archivés pour enquêter sur le rôle du cisco à museau court dans la chaîne alimentaire (niche trophique) comparé à celui des autres espèces de ciscos.
  2. Déterminer si le cisco à museau court subsiste en Ontario. Les mesures pourraient comprendre :
    • la réalisation de recensements ciblés aux emplacements où l’espèce était historiquement présente ou à d’autres endroits qui abritent un habitat semblable à celui des sites historiques de collecte;
    • la collaboration avec les programmes de surveillance des pêches mis en œuvre dans les Grands Lacs;
    • la surveillance périodique des captures de pêche commerciale; et,
    • l'élaboration d’outils éducatifs pour orienter la détermination et la consignation de nouvelles observations possibles de l’espèce.

Secteurs d’intervention : Gestion de l’habitat et des menaces

Objectif: Maintenir un habitat convenable dans les aires historiquement occupées par l’espèce dans les lacs Huron et Ontario et, s’il est déterminé que des populations de l’espèce subsistent, atténuer les menaces qui pèsent sur le cisco à museau court.

Jusqu’à ce que son existence soit confirmée, il serait sans doute préférable de concentrer les efforts de conservation sur des mesures qui visent le maintien de la qualité des habitats d’eau profonde utilisés autrefois par le cisco à museau court dans le lac Huron et le lac Ontario. Si de nouvelles occurrences du cisco à museau court sont découvertes en Ontario, des recherches approfondies pourraient s’avérer utiles pour d’abord comprendre l’étendue et l’ampleur des menaces possibles, puis en vue d’élaborer et mettre en œuvre des techniques d’atténuation des menaces pour réduire leur incidence.

Mesures

  1. Maintenir et améliorer la qualité de l’habitat des poissons d’eau profonde dans les Grands Lacs, y compris dans les endroits où le cisco à museau court était historiquement présent. Cela pourrait comprendre la mise en œuvre de mesures énoncées dans la Stratégie ontarienne pour les Grands Lacs.
  2. S'il est déterminé que le cisco à museau court existe en Ontario, élaborer, mettre en œuvre et évaluer l’efficacité des techniques d’atténuation des menaces.

Mise en œuvre des mesures

Le programme d’intendance des espèces en péril offre une aide financière pour la mise en œuvre de mesures. On encourage les partenaires en conservation à discuter de leurs propositions de projets liés à la présente déclaration avec le personnel du programme. Le gouvernement de l'Ontario peut aussi conseiller ses partenaires à l’égard des autorisations exigées aux termes de la LEVD afin d’entreprendre le projet.

La mise en œuvre des mesures pourra être modifiée si les priorités touchant l’ensemble des espèces en péril changent selon les ressources disponibles et la capacité des partenaires à entreprendre des activités de rétablissement. La mise en œuvre des mesures visant plusieurs espèces sera coordonnée partout où les déclarations du gouvernement en réponse au programme de rétablissement l’exigent.

Évaluation des progrès

La Loi sur les espèces en voie de disparition exige que le gouvernement de l'Ontario procède à un examen des progrès accomplis en matière de protection et de rétablissement d'une espèce dans le délai précisé dans l'énoncé de réaction du gouvernement, ou si aucun délai n’est précisé, au plus tard cinq ans après la publication de l’énoncé. Cette évaluation permettra de déterminer si des rectifications sont nécessaires pour en arriver à protéger et à rétablir le cisco à museau court.

Remerciements

Nous tenons à remercier tous ceux et celles qui ont pris part à l’élaboration du Programme de rétablissement pour le cisco à museau court (Coregonus reighardi) en Ontario et pour leur dévouement en ce qui a trait à la protection et au rétablissement des espèces en péril.

Renseignements supplémentaires

Consultez le site Web des espèces en péril à ontario.ca/especesenperil

Communiquez avec Ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et des Parcs
Sans frais : 1 800 565-4923
ATS : 1 855 515-2759
ontario.ca/environnement