Description de l’habitat général du goglu des prés
(Dolichonyx oryzivorus)

Une description de l’habitat général est un document technique fournissant une plus grande précision sur l’habitat protégé d’une espèce; cette description se fonde sur la définition d’habitat général prévu à la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition. La protection générale de l’habitat ne comprend pas une aire où l’espèce se trouvait antérieurement ou qui a le potentiel afin de l’y réintroduire, à moins que les membres existants de l’espèce ne dépendent de l’aire pour mener à bien leurs processus de vie. La description d’habitat général décrit aussi comment la catégorie de l’habitat a été établie conformément à la « politique de catégorisation et de protection de l’habitat aux termes de la Loi sur les espèces en voie de disparition » et est fondée sur la meilleure information scientifique disponible.

Catégorisation de l’habitat

  1. Le nid et une zone d’un rayon de 10 m autour du nid
  2. La zone entre 10 m et 60 m du nid ou du centre approximatif du territoire défendu
  3. L’aire d’habitat adéquat contigu entre 60 m et 300 m du nid ou du centre approximatif du territoire défendu

Catégorie 1

Le nid du goglu des prés et la zone située immédiatement autour du nid (c.-à-d. 10 m) sont des caractéristiques très sensibles qui soutiennent le stade vital de reproduction de l’espèce et ont la plus faible tolérance aux perturbations. Ce sont les aires dont l’espèce dépend pour des processus vitaux, dont la ponte des œufs et de leur incubation ainsi que pour l’alimentation et l’élevage des oisillons et le repos. Le goglu des prés construit son nid sur le sol en dessous d’un couvert de hautes herbes et de plantes herbacées non graminoïdes; il utilise son nid de façon quotidienne pendant la saison de reproduction. Les mâles et les femelles manifestent tous deux une grande fidélité envers leur site de reproduction (Gavin et Bollinger 1985, Wootton et coll.1986). L’aire qui entoure immédiatement le nid (c.-à-d. un rayon de 10 m) est importante pour maintenir le microclimat autour du nid et pour fournir une protection contre les prédateurs.

Il est important de signaler qu'il est rare de repérer les nids de goglu des prés en raison de leur nature cryptique. On déconseille la recherche des nids de goglu des prés puisque ce faisant, on peut compromettre par inadvertance le site de nidification et les oisillons. Cependant, si on repère un nid, celui-ci et la zone d’un rayon de 10 m qui l’entoure sont classés comme faisant partie de la catégorie 1.

Catégorie 2

La zone entre 10 m et 60 m du nid ou du centre approximatif du territoire défendu est comprise dans l’habitat de catégorie 2 et on juge qu'elle a une tolérance moyenne à la perturbation. Cette zone comprend le territoire défendu par l’espèce et dont elle dépend pour la pariade, l’accouplement, l’élevage des oisillons, l’alimentation, le repos et le bain. Dans l’ensemble de l’aire de répartition de l’espèce, on a constaté que les territoires défendus avaient une superficie d’entre 0,33 et 2 ha (Gavin et Bollinger 1985, Wootton et coll.1986, Martin et Gavin 1995, Fletcher et Koford 2003, Bollinger et Gavin 2004, Moskwik et O'Connell 2006, COSEPAC 2010, Weidman et Litvaitis 2011); ces territoires sont utilisés pendant toute la saison de reproduction. Les mâles et les femelles manifestent tous deux une fidélité envers les sites de reproduction utilisés dans le passé. La superficie du territoire est généralement plus petite dans les habitats de haute qualité et est plus grande dans les habitats de moins bonne qualité (Wittenberger 1980, Martin et Gavin 1995, Nocera 2009). La superficie moyenne du territoire est de 1,2 ha (ou environ la zone d’un rayon de 60 m d’un nid), bien que leur taille puisse varier en raison des conditions d’habitat locales.

Catégorie 3

La zone d’habitat adéquat contigu entre 60 m et 300 m d’un nid ou du centre approximatif du territoire défendu fait partie de l’habitat de catégorie 3; on juge que cette zone a une tolérance élevée aux perturbations. L’espèce dépend de cette zone pour s'alimenter, élever ses oisillons, se reposer, prendre de l’expansion et se cacher des prédateurs. Elle contribue aussi à maintenir la fonction des habitats de catégorie 1 et 2. Le goglu des prés dépend d’un habitat herbager qui comprend, sans toutefois s'y limiter, les prairies de fauche, les pâturages, les vieux champs ou les champs abandonnés ainsi que les prairies, les savanes et les alvars herbeux indigènes (McCracken et coll. 2013).

Plusieurs études ont démontré que le goglu des prés est sensible à son milieu et qu'il exige des zones herbagères beaucoup plus vastes que la taille de son territoire (Herkert 1991, 1994, O' Leary et Nyberg 2000, Johnson 2001, Johnson et Igl 2001, Renfrew et Ribic 2008). Les exigences minimales signalées en matière de superficie pour soutenir l’habitat de reproduction de l’espèce sont de 5 ha (Nocera, comm. pers. 2012) à 10 et 30 ha (Bollinger and Gavin 1992, Herkert 1991) voire jusqu'à 50 ha (Herkert 1994, Helzer et Jelinski 1999). Ces territoires de superficie supérieure sont nécessaires pour réduire les effets liés à l’habitat de lisière comme la prédation et le parasitisme de la reproduction (Johnson et Temple 1990, Renfrew et Ribic 2003, Bollinger et Gavin 2004) et pour maintenir un habitat herbager intérieur de bonne qualité aux fins de reproduction. L’empiètement sur les lisières de l’habitat ou leur perte réduit la superficie d’habitat intérieur adéquat et provoque la perte d’habitat adéquat pour le goglu des prés. Des parcelles de 10 ha ou moins offrent peu, voire pas, d’habitat intérieur (l’habitat intérieur est défini comme étant à 100 m d’une lisière – Helzer et Jelinksi 1999), surtout si ces parcelles sont de forme irrégulière. Afin de maintenir la fonction de l’habitat de reproduction, la parcelle herbeuse continue tout entière jusqu'à 300 m du nid ou du centre approximatif du territoire défendu est un habitat important pour le goglu des prés.

Activités dans l’habitat du goglu des prés

Les activités dans la zone d’habitat général peuvent se poursuivre pourvu que la fonction de cette zone en ce qui concerne l’espèce soit maintenue et qu'on ne tue ni ne harcèle les individus de l’espèce et qu'on n'y nuise pas.

Généralement compatibles :

  • Les pratiques agricoles existantes et les activités de gestion prévues, comme la récolte et le fauchage annuels et le broutage du pâturage en rotation peuvent se poursuivre.
  • La randonnée et l’utilisation de véhicules non motorisés sur les sentiers récréatifs existants.
  • Des travaux d’entretien de la cour comme la tonte du gazon et le jardinage.

Généralement non compatibles footnote 1  :

  • Les activités d’aménagement qui provoqueraient une importante fragmentation de l’habitat ou l’élimination de grandes surfaces herbagères adéquate.
  • L’application sans discernement de pesticides dans l’habitat.

Exemple d’application de la protection de l’habitat général du goglu des prés

Figure 1 : Exemple d’application de la protection de l’habitat général du goglu des prés

La figure montre un nid de goglu des prés ainsi que la région qui l’entoure. Une partie de la région qui entoure le nid est divisée en un habitat de catégorie un, en un habitat de catégorie deux et en un habitat de catégorie trois. L’habitat de catégorie un possède la moins grande tolérance aux perturbations tandis que l’habitat de catégorie deux a une tolérance modérée aux perturbations et l’habitat de catégorie trois jouit de la plus grande tolérance aux perturbations. L’habitat de catégorie un est déterminé comme étant le nid et une zone d’un rayon de 10 mètres autour du nid. L’habitat de catégorie deux est déterminé comme étant la zone entre 10 mètres et 60 mètres du nid (ou du centre approximatif du territoire défendu). L’habitat de catégorie trois est déterminé comme étant l’aire de l’habitat adéquat contigu entre 60 mètres et 300 mètres du nid (ou du centre approximatif du territoire défendu).

élargir figure 1 : Exemple d’application de la protection de l’habitat général du goglu des prés

Bibliographie

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