Fourrages de remplacement pour chevaux
Renseignez-vous sur les solutions de rechange au foin sec à longues tiges.
ISSN 1198-7138, Publié septembre 2005
Introduction
Les fourrages, notamment le foin long et/ou les graminées et légumineuses de pâturage, constituent depuis toujours la pierre angulaire de l’alimentation des chevaux. Une bonne source de fourrage doit fournir au moins 50 % du fourrage consommé quotidiennement par le cheval; on parle de 5,4-6,8 kg (12-15 lb) de foin sec pour un cheval adulte de format moyen. Même si les fourrages sont une source importante d’énergie, de protéines, de minéraux et de vitamines, ils fournissent également des fibres, un « élément nutritif » dont les chevaux ont aussi besoin. Le foin long et les graminées de pâturage renferment plus de 20 % de cellulose brute, tandis que la plupart des mélanges de céréales, même ceux qu'on dit être des aliments « complets », renferment moins de 12 % de fibres. Les chevaux peuvent s'adapter à des rations équilibrées qui ne contiennent ni foin ni mise au pâturage, mais l’apport minimal absolu de fibres nécessaire n'a pas été établi. Des études révèlent toutefois que les rations pauvres en fibres ou riches en concentrés augmentent les risques de coliques et d’ulcères gastriques et augmentent considérablement la propension du cheval à mâcher du bois.
Malheureusement, en périodes de sécheresse ou de mauvais temps, non seulement le foin long exempt de poussière coûte cher, mais il est également difficile à trouver.
Solutions de rechange au foin sec à longues tiges
Heureusement, il existe des solutions de rechange. Voici un aperçu de quelques « substituts » de fourrage qui peuvent être incorporés sans danger dans les rations des chevaux pour répondre à leurs besoins en fibres.
Ensilage mi-fané, ensilage d’herbe et agents de conservation
L’ensilage mi-fané s'obtient par ensilage, un procédé qui consiste, après la fauche et un fanage partiel, à entreposer le fourrage vert dans des silos ou dans du plastique de manière à créer un milieu d’où l’air est absent. Le foin est mis en balles à une teneur en eau d’environ 45-50 % et immédiatement enrubanné de plastique ou mis dans un sac de plastique, de manière à le priver d’oxygène. Les plants consomment l’oxygène qui reste dans le sac, ce qui amène une diminution de pH, après quoi le fourrage amorce un stade de latence. Le pH devrait être bien en deçà de 5. Toute perforation du sac déclenche un début de fermentation secondaire et une détérioration de l’ensilage mi-fané exposé à l’oxygène. L’ensilage permet de maintenir la même qualité de fourrage que lors de la coupe. Habituellement, le fourrage est riche en énergie et en protéines, parce que la date de coupe ne dépend pas des conditions météorologiques. La forte teneur en eau et l’absence de poussière sont des avantages si l’ensilage mi-fané doit être servi à des chevaux atteints d’emphysème chronique.
L’ensilage mi-fané comporte toutefois certains inconvénients de taille :
- Très peu d’études se sont penchées sur les conséquences de servir de l’ensilage mi-fané aux chevaux, même si bon nombre de propriétaires de chevaux en servent à leurs bêtes sans grands problèmes. Il reste une foule de questions sans réponse quant aux effets d’un fourrage acide sur les chevaux et quant aux risques de coliques lorsque l’ensilage est gelé.
- Comme leur teneur en eau est de 50 %, les balles ou les sacs d’ensilage mi-fané sont presque deux fois plus lourds que ceux de foin sec.
- L’ensilage mi-fané placé dans des sacs individuels doit être déplacé avec soin si l’on veut éviter d’endommager le sac et de provoquer une fermentation secondaire. Dès qu'un sac ou une membrane de plastique est perforé, de l’oxygène pénètre dans l’ensilage et provoque sa détérioration.
- Il existe un risque de botulisme. Il faudrait faire vacciner les chevaux contre cette maladie avant de leur servir de l’ensilage. Voir la fiche info L’ensilage préfané et le foin traité pour les chevaux sur le site Web suivant du MAAARO.
Des agents de conservation de divers types (par exemple, l’acide propionique) sont appliqués sur le foin durant la mise en balles lorsqu'il est difficile d’en abaisser la teneur en eau à moins de 15 %. Les agents de conservation, quand ils sont utilisés correctement, permettent d’entreposer le foin à une teneur en eau supérieure à celle du foin sec. Parmi les agents de conservation servant aux aliments pour chevaux, seuls ceux qui sont à base d’acide propionique ont été étudiés. S'ils ont le choix, les chevaux consomment de préférence le foin qui n'a pas été traité avec des agents de conservation, mais s'ils n'ont pas le choix, ils consomment la même quantité de foin traité que de foin non traité. L’acide propionique est normalement produit dans le système gastro-intestinal des chevaux.
Concentrés « complets »
Qu'ils soient texturés, granulés ou extrudés, les concentrés complets sont des mélanges de céréales, de foin ou de pulpe de betterave, de vitamines et d’un supplément de minéraux. Ils sont conçus pour être servis sans foin, ni céréales, ni autres suppléments et pour répondre quand même aux besoins de base des chevaux. Comme les concentrés « complets » viennent en une vaste gamme de profils nutritionnels, bien lire les étiquettes pour s'assurer qu'ils répondent aux besoins des chevaux (par exemple, les besoins d’entretien d’un cheval adulte c. les besoins d’un cheval en croissance ou d’un cheval de trait). L’étiquette devrait préciser « conçu pour être servi sans fourrage ». (Ne pas confondre les concentrés complets avec des concentrés qui sont des mélanges de céréales uniquement, conçus pour être servis avec du foin ou d’autres fourrages.) Malheureusement, à la connaissance des auteurs, aucun des produits de concentrés complets ne renferme suffisamment de fibres pour répondre aux besoins de mastication des chevaux. Une carence en fibres amène une forte augmentation de la propension des chevaux à mâcher du bois.
Habituellement, 5,4-6,8 kg (12-15 lb) d’un aliment complet sont nécessaires pour répondre aux besoins quotidiens d’un cheval de format moyen de 450 kg (1 000 lb), ration qui, si elle n'est fractionnée qu'en deux, surchargera la capacité digestive du cheval. Le fait de servir de plus petites quantités, de 1-1,5 kg (2-3 lb), mais plus fréquemment permet non seulement d’optimiser la digestion, mais également de tenir les chevaux occupés. Il est recommandé que les aliments concentrés complets remplacent les rations de céréales régulières du cheval plutôt que de s'y ajouter. Le passage à des rations à base de concentrés complets devrait être graduel. L’élimination complète du foin et son remplacement par la quantité de concentré complet suffisante pour répondre aux besoins des chevaux devraient s'étaler sur une semaine.
Mise en garde : Le fait de servir aux chevaux des concentrés complets sans autre source de fourrage grossier peut accroître les risques de coliques et/ou de fourbure.
Cubes de foin
Le foin long, qu'il s'agisse de luzerne ou d’un mélange de luzerne et de phléole des prés, est séché, haché et comprimé en cubes. Les cubes sont habituellement vendus en sacs de 25 kg (55 lb), qui sont faciles à transporter et à entreposer, ce qui les rend plus facilement commercialisables par les régions où la récolte de foin a été bonne. On peut aussi trouver sur le marché des cubes faits d’un mélange de luzerne et de maïs récolté comme plante entière. On a utilisé avec succès des cubes de foin comme seule source de fibres dans plusieurs études menées à Rutgers, en servant jusqu'à 5,4-6,8 kg (12-15 lb) de cubes par cheval par jour. Toutefois, il y a eu une augmentation considérable de l’incidence de la mastication de bois dans chacune des études, et deux chevaux ont éprouvé des problèmes d’étouffement avec les cubes lorsque ceux-ci ont été servis secs. Il est possible de réduire l’activité de mastication du bois observée chez les chevaux en leur servant au moins un peu de foin long ou de paille. (Voir la rubrique Paille, ci-dessous.) On écarte le danger d’étouffement en faisant tremper les cubes dans de l’eau pendant 10 minutes avant de les servir aux chevaux.
Les cubes à base de mélanges de graminées ou de mélanges de maïs récolté comme plante entière et de luzerne sont recommandés s'ils sont la seule source de fourrages pour l’entretien de chevaux adultes. Les cubes de luzerne seule renferment plus de protéines et de calcium que les quantités nécessaires à des chevaux adultes normaux, ce qui est sans conséquence pour des chevaux dont les reins fonctionnent normalement. En général, les cubes de luzerne conviennent mieux aux juments en lactation ou aux chevaux en croissance et comme substitut partiel au fourrage. Même s'il est possible de servir jusqu'à 6,8 kg (15 lb) ou plus de cubes par cheval par jour, une quantité de 1-2,5 kg (2-6 lb) de cubes par cheval par jour peut servir « d’allongeur de foin » si les chevaux ont accès à peu de foin et si le foin est de piètre qualité.
Paille
La paille, qui est constituée des tiges laissées sur place après la récolte du blé ou d’autres cultures de céréales, a une valeur nutritive très faible, mais elle représente quand même une excellente source de fibres. Si les besoins d’un cheval en énergie, en protéines, en minéraux et en vitamines peuvent être comblés par un concentré complet granulé, extrudé ou texturé, le simple fait d’offrir au cheval une litière de paille comblera ses besoins de mastication et le rendra moins enclin à mâcher du bois. Toutefois, si les chevaux sont soudainement placés sur de la paille après avoir été privés de fourrage, ils risquent beaucoup de souffrir de coliques. La paille doit être vue non pas comme une source d’éléments nutritifs pour les chevaux mais comme une source de fibres et une matière à mâcher. Certains chevaux, toutefois, consomment un fort pourcentage de leur litière de paille. Or, la paille risque d’être contaminée par des mycotoxines produites par différents champignons. Par temps pluvieux, Fusarium, un champignon saprophyte, envahit les épis de céréales. Fusarium peut produire un certain nombre de toxines qui sont toxiques pour les animaux. Très peu de recherche a été faite sur l’effet de ces mycotoxines sur les chevaux ni sur la quantité que peut renfermer la paille. Par conséquent, il faut se méfier de la paille qui est potentiellement infectée par Fusarium et qui est servie intentionnellement ou non aux chevaux. La paille de seigle infectée par les espèces de champignons du genre Claviceps provoque la dystocie (mise bas lente et difficile) chez les juments gravides. Il faut donc s'abstenir de mettre ces dernières en contact avec de la paille de seigle au cours des deux derniers mois de gestation.
Pulpe de betterave
Au cours des dix dernières années, la pulpe de betterave, un sous-produit de l’industrie de la betterave à sucre, a gagné en popularité comme supplément pour les chevaux. Il s'agit d’une bonne source de fibres fermentescibles qui est relativement riche en calcium, renferme une quantité moyenne de protéines (8 %) mais aucune vitamine. La pulpe de betterave est vendue en pastilles ou à l’état « brut », sous une forme qui rappelle un peu la texture du cuir de vieilles chaussures qu'on aurait haché. Traditionnellement, la forme brute est trempée dans de l’eau pendant 1-12 heures avant d’être servie. Cette période de trempage peut devenir un problème par temps chaud et humide lorsque la pulpe risque de devenir rance. Il s'agit d’un additif très courant dans les aliments concentrés « complets ». Jusqu'à 4,5 kg (10 lb) (poids sec) peuvent être servis à un cheval adulte de format moyen, mais il faut alors enrichir la ration par un supplément équilibré de vitamines et de minéraux et peut-être de protéines. Ne pas servir uniquement de la pulpe de betterave comme seule source d’aliments.
Son de blé
Même si le son de blé est une bonne source de fibres, il ne faut pas en servir aux chevaux en grandes quantités pendant de longues périodes. Le son de blé est extrêmement riche en phosphore et peut engendrer des déséquilibres phosphocalciques débilitants. Le fait de servir aux chevaux des quantités excessives de son peut causer un hyperparathyroïdisme secondaire nutritionnel. Le son est également assez riche en protéines (16 %). Si on le sert comme supplément, il faut limiter l’apport à tout au plus 0,45 kg (1 lb) par cheval adulte par jour et bien équilibrer le rapport phosphocalcique à l’aide de suppléments de calcium. Il n'est pas recommandé d’utiliser le son de blé comme principal substitut de fourrage. Au cours des saisons de croissance pluvieuses, le son de blé risque par ailleurs de renfermer des mycotoxines apparentées à Fusarium.
Son de riz
Le son de riz, qui fait depuis peu l’objet d’une promotion comme source de matières grasses (énergie) pour les chevaux, est une source convenable de fibres. Toutefois, il renferme davantage de phosphore par unité de poids que le son de blé. Certains produits de son de riz offerts sur le marché renferment du calcium qu'on ajoute pour corriger le déséquilibre, mais, pas plus que le son de blé, il n'est pas recommandé d’utiliser le son de riz comme principal substitut de fourrage.
Résidus de tonte ou de jardinage
Étant donné que bon nombre de plantes ornementales et de jardins (tomates, pommes de terre, rhubarbe, etc.) peuvent tuer les chevaux, il n'est pas recommandé d’utiliser les résidus de tonte et de jardinage comme substituts de foin ni même comme suppléments. Même les résidus de tonte d’un peuplement pur sont inacceptables. La petite taille des particules et la forte teneur en eau du gazon tondu avec une tondeuse à gazon contribuent à accélérer la fermentation par temps doux. Les chevaux qui consomment des résidus de gazon et de jardinage sont exposés à des risques de coliques, de botulisme, de fourbure et même de décès.
Résumé
Le foin sec à longues tiges devrait être la principale source d’éléments nutritifs pour les chevaux. Tous les substituts mentionnés dans la présente fiche technique comportent des inconvénients. Les aliments complets et les cubes de foin sont relativement coûteux (200-300 $/tonne imp.). Il est plus économique de les utiliser comme « allongeurs de foin », surtout si du foin de qualité moyenne est offert sur le marché à un prix plus avantageux. Ni la paille ni la pulpe de betterave ne devrait être utilisée comme unique source d’éléments nutritifs. Même s'il s'agit dans les deux cas de bonnes sources de fibres qui sont relativement économiques, ni l’une ni l’autre ne constitue un aliment équilibré pour les chevaux. Toutefois, s'il est absolument impossible de se procurer du foin de qualité convenable ou si le foin coûte plus de 250 $/tonne, des aliments et des cubes de concentrés complets à base de pulpe de betterave peuvent être utilisés avec de la paille pour assurer l’équilibre nutritif recherché et la teneur en fibres nécessaires au maintien du bien-être des chevaux et de leur santé gastro-intestinale. Même si le son de riz et le son de blé sont de bonnes sources de fibres, ne jamais en faire le principal élément de la ration des chevaux. Éviter à tout prix les résidus de tonte et de jardinage.