Si les vaches, caprins ou moutons mangent moins et que la production de lait a chuté, il se peut qu'il y ait des mycotoxines dans la ration. Une étude réalisée l'automne dernier a révélé que des épis de maïs avaient des niveaux élevés de vomitoxines (DON) dans certaines régions de l'Ontario.

Le terme mycotoxine est utilisé pour décrire un groupe de composés toxiques produits par des moisissures qui colonisent les cultures et les aliments entreposés. Une seule espèce de moisissure peut produire plus d'un type de mycotoxine, et diverses espèces de moisissure peuvent produire la même mycotoxine. L'aflatoxine, la zéaralénone et la vomitoxine (DON) en sont des exemples.

Les moisissures peuvent se développer sur différents types d'aliments, à différents stades de croissance, avant la récolte ou durant l'entreposage. Par exemple, quand les conditions sont propices au développement des moisissures au champ, celles-ci peuvent croître sur les grains encore attachés à la plante. Le maïs et le blé sont deux exemples de grains qui peuvent contenir des niveaux importants de mycotoxines à la récolte. Les moisissures peuvent également proliférer dans les aliments comme le maïs d'ensilage si l'oxygène s'infiltre dans le silo.

Les aliments contenant des moisissures entraînent habituellement des diminutions de performance de l'ordre de 5 à 10 %, même en l'absence ce de production de mycotoxines. Les aliments contenant des moisissures sont moins appétissants pour les bovins, ce qui peut réduire l'ingestion de matière sèche. Cette baisse dans l'apport d'éléments nutritifs réduit les gains de poids ou la production de lait.

Les mycotoxines peuvent causer des problèmes même lorsqu'elles sont consommées à des doses extrêmement faibles. Elles peuvent aussi nuire aux performances des animaux et modifier le métabolisme normal. Le système immunitaire des animaux affectés est souvent la cible principale de l'effet des mycotoxines.

Les jeunes animaux préruminants comme les veaux ainsi que les vaches produisant de grandes quantités de lait sont les plus sensibles aux effets des mycotoxines. Par ailleurs, les vaches déjà exposées à certains stress comme la boiterie, des températures élevées ou des rations déficientes sont également plus à risque. La période de transition et le moment du vêlage sont également critiques.

Une étude du ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l'Ontario (MAAARO), réalisée l'automne dernier, a révélé que les épis de maïs prélevés dans certains champs avaient des niveaux élevés de vomitoxines (DON). La gravité du problème variait selon les régions, mais environ 12 % des champs échantillonnés affichaient des concentrations de mycotoxines se situant entre 2 et 4 parties par million (ppm). Certains champs présentaient même des concentrations supérieures à 4 ppm.

D'autres sources ont rapporté des concentrations encore plus grandes dans certains échantillons. Dans un cas, un plein silo de maïs humide exhibait un niveau de 12 ppm de DON ! De plus, certains rapports suggèrent que la zéaralénone peut être un plus gros problème que les vomitoxines/DON.

La contamination par les mycotoxines peut provenir des aliments pour animaux achetés à l'extérieur de même que des champs ou des silos. Demander une analyse de laboratoire avant de faire l'achat de grandes quantités de drèches de maïs de distillerie ou de produits similaires.

Le processus de fermentation ne dégrade pas les mycotoxine contenues dans les grains contaminés. En fait, sous l'effet de la fermentation, les concentrations de toxines dans les drèches de maïs de distillerie sont trois fois supérieures à la concentration observée dans le maïs grain d'origine.

Il n'est pas possible de déceler à l'œil nu la présence de mycotoxine. La présence de moisissures visibles n'implique pas avec certitude des problèmes liés aux mycotoxines tout comme l'absence de moisissures visibles ne veut pas dire que les grains sont exempts de mycotoxines. L'analyse en laboratoire est la seule façon de vérifier avec certitude la présence de mycotoxines.

Quand on soupçonne la présence de mycotoxines, tous les ingrédients (grains et ensilage) doivent être analysés individuellement. En cas de résultats positifs, ces analyses permettront aussi de connaître les concentrations totales de mycotoxines alimentaires ainsi que d'évaluer les problèmes et d'apporter les mesures correctives appropriées.

Le tableau de la page XX montre les concentrations de mycotoxines qui peuvent être dangereuses. Des analyses plus poussées peuvent être requises, surtout si les animaux présentent des symptômes modérés d'intoxication. Limiter la quantité d'aliments suspects dans la ration, surtout si les réductions de performance ou les symptômes d'intoxication persistent.

Lorsque les mycotoxines sont présentes à des concentrations nocives, elles peuvent être responsables de réductions de performance, de symptômes cliniques aigus ou des deux. Si d'importantes baisses de production se produisent ou que des symptômes cliniques se manifestent, cesser l'utilisation des aliments suspects en attendant les résultats d'analyse.

Plusieurs stratégies peuvent être retenues pour atténuer l'effet des mycotoxines. Par exemple, nettoyer et cribler les grains moisis pour éliminer les particules fines, la poussière et les grains légers peut réduire substantiellement le niveau de contamination. La dilution d'un aliment contaminé avec un autre aliment libre de contamination peut ramener à un niveau acceptable la concentration en toxines de la ration totale. Il faut garder en tête que les problèmes de production peuvent avoir une autre origine que les mycotoxines. Avant d'établir la quantité d'ingrédients contaminés qu'il est possible d'inclure dans la ration, tenir compte des aliments moisis qui peuvent aussi réduire l'appétence de la ration et la consommation totale de matière sèche.

En cas de soupçon de contamination par les mycotoxines, consulter le vétérinaire et le spécialiste en nutrition animale qui peuvent aider à mettre en place des stratégies propres à la situation qui prévaut sur la ferme.

Mario S. Mongeon est spécialiste de l'élevage du bétail pour le MAAARO, au Centre de ressources d'Alfred, Alfred, Ont., et Tom Wright est spécialiste de la nutrition des bovins laitiers pour le MAAARO, à l'Université de Guelph.

Références : www.ontario.ca/qualitedesaliments, www.ontario.ca/feedquality Seuils suggérés de concentrations de mycotoxines dans la ration

Ration totale (base de matière sèche)

Mycotoxine

Concentration inquiétante

(ppm)

Conc. potentiellement dangereuse

Bovins (ppm)

DON/vomitoxine
0,56
2,5 à 6,0
Zéaralénone
0,56
3,9 à 7,0
T-2
0,25
0,7 à 1,5
HT-2
0,25
1,5 à 3,0

(Adapté de Penn State)

Différentes moisissures produisent des mycotoxines dans les aliments pour animaux.

Lesquelles contiennent des toxines? Seules des analyses de laboratoire permettent de le savoir.

Cet article est initialement paru dans la revue The Milk Producer Magazine, janvier 2012.