Auteur : Ted (Edward R.) Armstrong

Résumé

Le pygargue à tête blanche (Haliaeetus leucocephalus) est un gros rapace diurne. Il est le seul représentant de l'espèce des pygargues en Amérique du Nord. On reconnaît facilement l'adulte à sa grande taille, à l'envergure de son aile, ainsi qu'à sa tête et sa queue blanches qui contrastent avec son corps foncé. Le pygargue à tête blanche a une vaste aire de répartition en Amérique du Nord, étant présent dans tous les États-Unis continentaux et dans l'ensemble des provinces et territoires du Canada.

Depuis la seconde moitié du XXe siècle, de nombreuses espèces de rapaces, y compris le pygargue, sont en déclin en Amérique du Nord en raison de l'usage répandu de l'insecticide DDT. La population du sud de l'Ontario a presque disparu. Selon les estimations, elle aurait été réduite à entre trois et huit couples dans les années 1970, avec pratiquement aucune reproduction réussie. Les populations ont également diminué, dans une moindre mesure, dans le nord de l'Ontario. La population du nord-ouest de l'Ontario, qui est concentrée sur le lac des Bois, constituait l'essentiel du contingent des pygargues en Ontario durant le déclin et était demeurée relativement en bonne santé, quoique réduite. Le pygargue était l'une des premières espèces figurant sur la liste de la Loi de 1973 sur les espèces en voie de disparition de l'Ontario.

Le rétablissement des pygargues à tête blanche en Ontario a commencé avec l'interdiction dans toute l'Amérique du Nord d'utiliser le DDT. Bien que le rétablissement de l'espèce ait été lent initialement en raison de la persistance du DDT dans l'environnement, les populations ont commencé à augmenter progressivement. D'autres mesures ont également été prises pour rétablir l'espèce en Ontario, notamment la libération d'oisillons de pygargues à tête blanche dans le sud-ouest de l'Ontario, des programmes d'éducation du public et d'intendance, l'échantillonnage des contaminants, des mesures de protection de l'habitat par la planification des terres publiques et de la Couronne, le placement de plateformes de nidification et de vastes efforts de surveillance. Le rétablissement des pygargues à tête blanche dans la région des Grands Lacs s'est réalisé plus lentement que celui des populations intérieures en raison dela plus grande contamination des populations de poissons. Les populations situées dans le nord-ouest de l'Ontario se sont rétablies relativement rapidement. Bien que beaucoup plus petites que celles du nord-ouest, les populations du nord-est de l'Ontario ont également augmenté. Le rétablissement de la population de pygargues à tête blanche du sud de l'Ontario a été plus lent et plus graduel, et continue depuis lors. La population hivernante de pygargues à tête blanche de la province a rapidement augmenté depuis les années 1980.

Les pygargues à tête blanche sont à la fois des prédateurs et des détritivores, et même s'ils se nourrissent principalement de poissons, ils mangent aussi différents mammifères et oiseaux aquatiques. Les couples de pygargues occupent généralement le même territoire

de reproduction, et sont normalement de retour sur leur territoire à la fin de l'hiver lorsque les lacs sont encore gelés. Les territoires renferment généralement des plans d'eau peu profonds et productifs où vivent d'abondantes populations de poissons qui servent de nourriture. Les pygargues à tête blanche nichent habituellement dans de grands arbres d'essences différentes formant le couvert forestier, près de plans d'eau dans des régions forestières. Ils préfèrent nicher dans des zones peu perturbées par l'être humain, et iront éventuellement établir leur nid plus loin des eaux lorsque les rives sont fortement aménagées. Toutefois, certains pygargues à tête blanche semblent être de plus en plus tolérants aux activités humaines et pourraient même établir leurs nids plus près de l'habitat humain. L'oisillon prend son premier envol à l'âge de 10 ou 11 semaines.

La migration vers le sud en automne se produit généralement le long de principaux réseaux hydrographiques. De nombreux pygargues à tête blanche des Grands Lacs passent l'hiver dans le bassin des Grands Lacs. La disponibilité de la nourriture est le plus important facteur déterminant l'aire de concentration hivernale, et les pygargues à tête blanche se rassemblent souvent dans des zones d'eau libre telles que sous des barrages et des chutes d'eau.

Bien que la population de pygargue à tête blanche de l'Ontario connaisse manifestement un redressement, l'espèce a des vulnérabilités intrinsèques. En tant que grand prédateur qui se nourrit principalement de poissons, le pygargue à tête blanche est très sensible aux contaminants chimiques persistants dans les systèmes aquatiques qui se bioamplifient dans la chaîne alimentaire et qui se concentrent chez les gros prédateurs. Les niveaux de produits chimiques tels que le DDT et les PCB ont diminué et ont maintenant moins d'incidence sur la reproduction du pygargue à tête blanche, mais constituent encore une source de préoccupation dans les Grands Lacs. La présence de nouveaux produits chimiques persistants inquiète également. Le pygargue à tête blanche est une espèce à croissance lente qui vit longtemps, et une survie élevée des adultes est considérée essentielle à la survie à long terme de l'espèce. Même une légère variation dans le taux de survie des adultes peut avoir de profondes implications sur les tendances démographiques.

Il existe en Ontario un programme bien établi de gestion des pygargues à tête blanche, qui établit des directives et des politiques de planification de la gestion forestière, de planification municipale et de planification des énergies renouvelables. Malgré ces programmes ainsi qu'une population et une aire de répartition en croissance, le pygargue à tête blanche fait encore face à un certain nombre de menaces en Ontario, notamment des contaminants chimiques, l'empoisonnement aux métaux lourds tels que le plomb et le mercure, la mortalité accessoire provoquée par différents facteurs, des maladies telles que le virus du Nil occidental et la myélopathie vacuolaire aviaire, la perte d'habitats localisée et le changement climatique.

Ce plan vise à poursuivre le rétablissement de la population de pygargues à tête blanche en Ontario en vue d'atteindre une population stable ou en croissance, dont la santé et la longévité ne seront pas menacées par les phénomènes naturels et les activités humaines. À cette fin, les objectifs de gestion de l'Ontario sont les suivants.

  • Surveiller les populations de pygargues à tête blanche pour assurer le rétablissement continu de la population.
  • Repérer et protéger les habitats de nidification de pygargues à tête blanche ainsi que les principaux sites d'hivernage et de repos sur les terres publiques et privées.
  • Maintenir un taux de survie élevé des pygargues à tête blanche adultes.

Un certain nombre d'approches de gestion ont été ciblées pour atteindre ces objectifs, notamment :

  • un programme de surveillance continue de la population;
  • la protection permanente de l'habitat du pygargue à tête blanche;
  • de la recherche pour évaluer la récente orientation stratégique de la gestion de l'habitat;
  • l'échantillonnage et l'analyse continus des contaminants;
  • des mesures de réduction de la mortalité accessoire;
  • l'étude des connaissances indigènes;
  • des produits de communication soulignant les réussites en matière de conservation et les défis du programme de rétablissement du pygargue à tête blanche.