Préparé par J. M. Bowles

L’éléocharide géniculée est une petite plante annuelle touffue de 2 à 20 cm qui pousse dans des espaces libres situés sur les rives abritées d’étangs et de lacs. Elle est désignée comme espèce en voie de disparition aux termes de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition. Il existe deux populations de cette espèce en Ontario. L’une se trouve sur le bord d’une sablière artificielle à Cedar Springs, dans la municipalité de Chatham-Kent. L’autre, plus considérable, est dispersée au bord d’étangs et dans des baissières peu profondes formées entre les dunes, près de l’extrémité de Long Point, dans le comté de Norfolk. La population totale se situerait entre 300 et 500 à Cedar Springs et entre 1300 et 2500 à Long Point, mais il n’y a pas eu de relevé exhaustif à l’un ou l’autre de ces endroits. La plante étant annuelle, la population d’individus matures fluctue vraisemblablement d’une année à l’autre, et la survie à long terme de l’espèce dépend des graines dormantes situées dans le substrat. On sait peu de chose sur la longévité des graines ou sur l’importance de la banque de graines.

La principale menace de l’espèce est la dégradation de son habitat causée par l’introduction d’une variété envahissante de roseau commun (Phragmites australis) communément appelée phragmite. Cette plante envahit activement un grand nombre de milieux humides du Sud de l’Ontario et est présente là où se trouvent les deux populations d’éléocharide géniculée. À Long Point, les populations de phragmites s’étendaient sur 18 ha en 1995. En 1999, elles s’étaient propagées sur presque 140 ha. Depuis ce temps, elles se sont multipliées par cinq environ. Étant donné que l’éléocharide géniculée a besoin d’estrans ouverts pour croître, la concurrence des phragmites et les changements dans la dynamique des rivages sont considérés comme des menaces, en particulier lorsque les changements physiques des rivages sont causés par la présence des phragmites. À Cedar Springs, la population est dans un habitat au moins partiellement créé par l’homme. L’habitat de l’éléocharide géniculée est actuellement protégé en vertu de la Loi de 2007 sur les espèces en voie de disparition.

Le but du rétablissement en ce qui concerne l’éléocharide géniculée est, pour les deux endroits où elle se trouve, de prévenir la perte supplémentaire d’habitat dans son aire d’occupation afin de maintenir ses deux populations.

Les objectifs de cette stratégie de rétablissement sont les suivants :

  1. Recenser et cartographier les emplacements, les populations et les habitats connus de l’éléocharide géniculée d’ici 2015 pour fournir un fondement quantitatif en vue d’un suivi ultérieur et mettre en marche un programme de suivi.
  2. Observer en continu les populations de phragmites et leur répartition là où se trouve l’éléocharide géniculée afin de fournir des données sur l’ampleur du changement d’habitat et sur la proportion de l’habitat qui subit ce changement. Cette observation doit se faire à intervalles réguliers (au moins aux deux ou trois ans).
  3. Examiner les possibilités d’enlèvement et/ou de limitation des phragmites dans les sites occupés par l’éléocharide géniculée qui sont le plus vulnérables à la menace que cause cette espèce. Préparer des plans de gestion des phragmites et amorcer cette gestion d’ici 2012.
  4. Étudier les conditions nécessaires à la présence de l’habitat (notamment le régime hydrologique), la biologie des populations, l’expansion et la dynamique des banques de graines de l’éléocharide géniculée pour déterminer la possibilité de la survie, du déplacement et du rétablissement de l’espèce dans un habitat protégé.
  5. Sensibiliser les propriétaires de terrain, les municipalités et les planificateurs à l’importance de limiter les projets de construction qui détruisent l’habitat de l’éléocharide géniculée au site de Cedar Springs. Faire inclure des mesures de protection précises à la prochaine version des plans municipaux officiels pertinents.

Les stratégies de protection et de rétablissement devront inclure une cartographie et un recensement détaillés des populations et de leurs habitats ainsi qu’une détermination de l’ampleur de la menace causée par les phragmites. Ces recherches permettront d’obtenir des données de base à partir desquelles le succès des mesures de rétablissement pourra être mesuré. Le rétablissement, la régénération et la réhabilitation de l’habitat peuvent être réalisés par la gestion ou l’enlèvement des phragmites. Les possibilités de contrôle des phragmites doivent être étudiées et les traitements expérimentaux susceptibles de constituer le fondement d’une gestion adaptative doivent être réalisés.

Il est recommandé que l’aire d’occupation de Long Point soit désignée comme habitat de l’éléocharide géniculée dans un règlement sur l’habitat. Cette aire comprend les zones de la plage North Beach, des prés humides et des bords des baissières situées entre la baie Gravelly et l’extrémité de Long Point; ces zones sont inondées de façon occasionnelle ou saisonnière, elles demeurent humides pendant la majeure partie de la saison de croissance, et la végétation indigène qui fait concurrence à l’éléocharide géniculée y est naturellement clairsemée ou absente. À Cedar Springs, il est recommandé que le bord incliné de la sablière soit désigné comme habitat de l’éléocharide géniculée dans un règlement sur l’habitat.