Élaboré par A. Gradish et M. Tonge

L’hémileucin du ményanthe (Hemileuca sp.) est un papillon nocturne rare observable seulement en Amérique du Nord, dans l’État de New York et dans les environs d’Ottawa, en Ontario. En Ontario, il est classé en voie de disparition par le Comité de détermination du statut des espèces en péril en Ontario (CDSEPO), en raison de la spécificité de son habitat et de son aire de répartition extrêmement restreinte. On peut actuellement l’observer à deux endroits dans le Sud-Est de l’Ontario : dans les zones humides des marais de Richmond et du complexe marécageux du lac White. La zone occupée par cette espèce fait moins de trois kilomètres carrés. On y estime la population adulte d’hémileucin du ményanthe à 3000 individus.

Les papillons adultes sont de taille moyenne à grande, de couleur noire et ont sur les ailes de larges bandes blanches aux bords extérieurs ondulés ou festonnés, contenant chacune une petite tâche circulaire. Le dimorphisme sexuel est net : les femelles sont de taille supérieure aux mâles. L’espèce est restreinte aux marais ouverts, riches en calcaire, peuplés de petits arbustes, où foisonnent les trèfles d’eau (Menyanthes trifoliata). La nécessité de cet habitat est particulière à cette espèce; la plupart des hémileucins vivent dans des habitats très secs (Legge et coll., 1996).

En Ontario, les populations d’hémileucin du ményanthe pourraient être menacées par des changements dans l’habitat en raison notamment de la fluctuation des niveaux de l’eau, de l’aménagement des terres, des espèces végétales envahissantes, de l’utilisation d’insecticides et du changement climatique, qui entraîne la perte à long terme d’habitats dans les terres humides. Des espèces végétales comme le roseau commun (Phragmites australis spp. australis), la bourdaine (Frangula alnus) ou le roseau à massette (Typha angustifolia) peuvent envahir et peupler les marais ouverts, surclassant les plantes hôtes de l’hémileucin du ményanthe. Les fluctuations de l’eau attribuables à l’homme peuvent menacer les populations du lac White. De plus, l’utilisation d’insecticides contre le bombyx disparate (Lymantria dispar) est considérée comme une menace potentielle, selon le temps de l’arrosage et la concentration (NatureServe, 2010).

Le but du rétablissement est de soutenir les populations et les distributions actuelles de l’hémileucin du ményanthe aux endroits où il est déjà présent et d’étendre ces populations à d’autres habitats adéquats à l’intérieur de leur aire de répartition actuelle en Ontario. À cet effet, plusieurs objectifs de rétablissement ont été établis :

  1. effectuer une évaluation quantitative afin de déterminer comment assurer la durabilité et la sécurité d’une population en Ontario;
  2. combler les lacunes dans les connaissances concernant la taxonomie, l’écologie, la distribution, le comportement, la dynamique des populations, les facteurs de mortalité et l’utilisation des habitats de la distribution géographique ontarienne de l’espèce;
  3. réduire ou atténuer les menaces pour les populations d’hémileucin du ményanthe;
  4. accroître la sensibilisation et la compréhension du public au sujet des populations d’hémileucin du ményanthe;
  5. s'il est établi qu'historiquement l’espèce était répandue, envisager l’introduction de l’hémileucin du ményanthe dans des habitats durables, inhabités, mais adéquats, si possible.

En raison de la distribution géographique restreinte de l’hémileucin du ményanthe, il est recommandé que la zone d’habitat réglementée pour cette espèce inclue tous les sites qu'elle occupe. En Ontario, il s'agit des zones humides des marais de Richmond et du complexe marécageux du lac White. Ces deux sites sont des marais riches en calcaire qui soutiennent de vastes populations de trèfles d’eau (Menyanthes trifoliata).

Les zones définies comme habitat de chacun de ces sites devraient inclure la superficie de la végétation des marais et les complexes marécageux adjacents, et s'étendre 120 mètres plus loin afin de protéger la structure et le fonctionnement du marais. Cette distance de 120 mètres est une norme historiquement utilisée pour la protection des ressources en Ontario (Ontario, 1992) et a été fixée parce que l’aménagement à moins de 120 mètres d’un marais présente un risque suffisant d’avoir un effet sur les fonctions écologiques des zones humides qu'il entoure (OMNR 2010). De plus, si un nouveau site où habite l’hémileucin du ményanthe est découvert ou si l’espèce y est réintroduite, cette zone devrait également être réglementée en tant qu'habitat.