Introduction

Les incendies dans les bâtiments agricoles sont très préoccupants pour les agricultrices ontariennes et les agriculteurs ontariens. Ces derniers subissent non seulement des pertes financières assez importantes, mais essuient également des pertes liées à leur exploitation agricole, incluant le matériel, les animaux d’élevage, l’interruption des activités agricoles, la baisse de productivité et le stress intense auquel fait face la famille agricole. Le ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales (MAAARO) a réuni plusieurs organismes et groupes afin de former un comité chargé d’atténuer le risque de décès ou de perte matérielle en dégageant les pratiques exemplaires au sein du secteur et en déterminant les modifications possibles à la réglementation.

Dans la foulée de ses travaux, le comité a également publié un ouvrage intitulé Réduction des risques d’incendie à la ferme qui comporte plusieurs recommandations visant à prévenir les incendies à la ferme et à en réduire les répercussions.

À mesure que les exploitations agricoles prennent de l’expansion, la taille et la valeur de leurs bâtiments agricoles s’accroissent. Lorsqu’un incendie prend naissance dans un bâtiment de grande dimension, il est plus difficile à éteindre et entraîne des pertes financières considérablement plus élevées. Les données recueillies par le Bureau du commissaire des incendies et de la gestion des situations d’urgence de l’Ontario révèlent que bien que l’on observe une tendance à la baisse du nombre d’incendies au cours des dix dernières années, la valeur des pertes a, pour sa part, augmenté en raison de la taille des bâtiments agricoles et de la hausse des coûts de reconstruction.

Quoique la lutte contre les incendies soit importante, la prévention reste déterminante.

Photo aérienne d’une méga-porcherie complètement détruite par les flammes, en moins d’une heure. Les seuls éléments épargnés sont des silos à moulée et un hangar

Figure 1. Une porcherie après un incendie. Remarquer la taille de l’excavatrice par rapport au bâtiment agricole. Source : Randy Drysdale

Causes principales d’incendies dans les bâtiments agricoles

Le Bureau du commissaire des incendies et de la gestion des situations d'urgence de l’Ontario fournit des données annuelles sur les causes des incendies dans les bâtiments de ferme. Chaque année, les causes principales déterminées des incendies évitables ont été les suivantes :

  • une défaillance mécanique ou électrique;
  • l’utilisation impropre d'une source d'inflammation ou de matériel;
  • un défaut lié à la conception, à la construction ou à l'entretien.


Dans près de 40 % des cas, la cause exacte de l’incendie demeure indéterminée en raison de la perte totale du bâtiment et de son contenu.

Sources principales d’inflammation

Les données donnent à penser que les sources principales d’inflammation appartiennent à l’une ou l’autre des catégories suivantes :

  • matériel de distribution électrique (p. ex., câblage du circuit, matériel de distribution, rallonges, etc.);
  • appareils de chauffage (p. ex., chauffage central, tuyau de raccordement, radiateurs électriques portatifs, etc.);
  • flamme nue (p. ex. découpage ou soudage, chalumeau, articles de fumeurs, etc.);
  • sources diverses (p. ex., réactions chimiques, comme une combustion spontanée et un éclair).

Matériel de distribution électrique – une source courante d’inflammation

Le secteur de l’assurance et l’Office de la sécurité des installations électriques (OSIE) (anglais seulement) se sont penchés sur les risques liés aux systèmes électriques. Ils ont déterminé que le milieu corrosif à l’intérieur des bâtiments agricoles constitue la cause première de la détérioration ou de la défaillance du matériel électrique. La détérioration se manifeste habituellement sous forme de corrosion des éléments métalliques exposés (c.-à-d., des fils, des raccordements électriques, etc.).

Prise électrique standard utilisée dans une étable laitière. La prise, séparée en deux, laisse voir la corrosion avancée des composants internes en cuivre

Figure 2. Prise de courant corrodée trouvée dans une étable à vaches laitières.
Source : Heartland Farm Mutual, Waterloo, Ontario

L’OSIE a publié le bulletin 22-3-* Electrical Equipment in Confinement Barns (en anglais seulement) dans lequel il précise le type de câblage et de matériaux à installer dans les bâtiments pour animaux d’élevage. Il recommande également que tout le matériel non essentiel et l’équipement doté de dispositifs de protection contre les surintensités soient isolés des enceintes fermées pour animaux et soient situés à des endroits alimentés en air propre et sec dont la température est contrôlée.

Entretien du matériel dans les bâtiments agricoles

S’assurer qu'un électricien qualifié examine régulièrement les installations électriques et mécaniques dans les bâtiments agricoles afin d'y repérer tout signe de détérioration ou de corrosion. Tous les éléments jugés dangereux ou dans un état douteux doivent être réparés ou remplacés immédiatement.

Certaines compagnies d'assurances procèdent à l’inspection du matériel électrique (p. ex., des panneaux et des fiches) au moyen de caméras à infrarouges qui indiquent des points chauds (surchauffe) en vue de détecter des problèmes de corrosion.

La fiche technique du MAAARO intitulée Installations électriques dans les bâtiments de ferme fournit des renseignements sur la façon dont une installation électrique peut provoquer un incendie, ainsi que les règlements applicables et les pratiques d'entretien des installations électriques dans les bâtiments agricoles.

Illustration en deux parties montrant, à gauche, une image thermographique (et les températures indiquées par le code de couleur) d’une boîte de prise de courant dans laquelle la corrosion provoque un accroissement de la résistance électrique et un échauffement qui constitue un risque d’incendie. La partie de droite montre un gros plan de la même boîte de prise de courant (fixée au plafond) telle qu’on la voit dans le bâtiment d’élevage

Figure 3. Photographie infrarouge d’une boîte de prise de courant montrant un possible point chaud.
Source : Randy Drysdale

Entretien général autour des bâtiments agricoles

Effectuer à intervalles réguliers le nettoyage des lieux aux abords des bâtiments de manière à éliminer les matières potentiellement combustibles. Il peut s’agir du fauchage de la végétation entourant les bâtiments et de l'enlèvement périodique des déchets à l'intérieur et aux environs des bâtiments. Élaguer ou couper tous les arbres à proximité des bâtiments.

Veiller à ce que les installations de stockage de carburant de la ferme soient situées à bonne distance des bâtiments et en assurer une gestion appropriée. De cette façon, les vapeurs inflammables libérées durant le ravitaillement des véhicules ou le remplissage des réservoirs ne sont pas entraînées à l'intérieur des bâtiments agricoles; elles se dissipent plutôt dans l'atmosphère.

Consulter la fiche technique du MAAARO intitulée Dix mesures pour réduire le risque d'incendie dans les bâtiments d'élevage qui décrit des pratiques de gestion optimales plus générales et visant l’entretien du matériel.

Empêcher la propagation des flammes dans les bâtiments agricoles

D’après le Code national de construction des bâtiments agricoles – Canada, les vides de construction dans les plafonds, les toits ou les greniers doivent être divisés au moyen de coupe-feu pour que leur dimension n'excède pas 30 m (100 pi) quel que soit l’endroit.

Conformément au Code du bâtiment de l'Ontario, l'isolation en matière plastique expansée et exposée des surfaces intérieures des bâtiments est interdite. Cette matière combustible doit être recouverte ou protégée par des matériaux résistants au feu si elle est utilisée dans un bâtiment.

Aménager autour des bâtiments agricoles un chemin praticable en tout temps pouvant supporter le poids du matériel lourd et l’entretenir de manière à ce qu’il soit utilisable tous les jours de l'année.

Dans tous les bâtiments, installer un extincteur de classe ABC d'au moins cinq livres (2,3 kg) à toutes les sorties ainsi que dans tous les locaux d'installations mécaniques et toutes les salles de préparation des aliments. Dans les bâtiments équipés d'une génératrice de réserve, la salle qui renferme celle-ci doit être munie d'un extincteur de classe ABC d'au moins dix livres (4,5 kg). Cette salle où se trouve la génératrice doit également être séparée des autres aires du bâtiment de ferme par des murs résistants au feu.

La fiche technique du MAAARO intitulée Conditions de délivrance d’un permis de construire pour la construction, l’agrandissement ou la rénovation de bâtiments agricoles présente d’autres renseignements sur les règlements pris en application du code du bâtiment.

Combustion spontanée et feux de foin

Des incendies dus à une combustion spontanée ont provoqué des décès et détruit des récoltes de foin. Si le degré d’humidité d’une récolte de foin entreposée dans une grange est supérieur à 20 ou 25 %, la combustion spontanée peut se produire.

Une récolte de foin trop humide qui est entreposée surchauffe rapidement. Si le volume du foin entreposé est si grand qu’il limite la perte de chaleur, la température interne du foin augmente. À mesure que la température augmente et qu’elle dépasse 55 °C (130 F), une réaction chimique survient et peut se maintenir. Cette réaction ne nécessite pas la présence d'oxygène, mais les gaz inflammables qui sont produits atteignent une température supérieure à leur point d’inflammation. Ces gaz s'enflamment s'ils entrent en contact avec l'air.

Il faut vérifier régulièrement le foin. Si celui-ci dégage une odeur légère de caramel ou une odeur distincte de moisi, il se peut qu’il surchauffe.

Si l’on soupçonne que le foin surchauffe, il suffit de fabriquer une sonde simple à insérer dans le tas de foin pour en mesurer la température. Pour ce faire, utiliser un morceau de 3 m (10 pi) d’un tube électrique. Fixer une cheville pointue en bois à un bout du tube puis percer huit trous de 4,7 mm (3/16 po) de diamètre dans le tube juste au-dessus de la cheville. Insérer la sonde dans le tas de foin et y introduire un thermomètre à bonbons attaché au bout d’une longue corde. Laisser le thermomètre dans le tube pendant 10 minutes pour s’assurer d’obtenir une température précise.

Températures préoccupantes :

  • 65 °C (150 °F) Danger imminent. Vérifier quotidiennement la température.
  • 70 °C (160 °F) Danger! Mesurer la température toutes les quatre heures et inspecter la grange.
  • 80 °C (175 °F) Appeler le service d’incendie! Arroser le foin et le sortir de la grange.
  • 85 °C (185 °F) S’attendre à la présence de points chauds et de foyers d’incendie. Il est probable que le foin qui surchauffe s’enflamme lorsqu’il entre en contact avec l'air.
  • 100 °C (212 °F) Critique! La température s’élève rapidement au-dessus de ce point. Le foin s’enflamme presque inévitablement.

Avertissement : S’abstenir de marcher sur le tas de foin entreposé, car il est possible que des foyers d’incendie brûlent déjà sous la surface du foin.

Faire preuve d’une grande prudence au moment de lutter contre un feu de foin si celui-ci a été traité avec des agents de conservation chimiques. Avertir les pompiers si le foin a été traité avec des agents contenant de l'éthoxyquine et du BHT (butyl hydroxytoluène). Ces agents produisent du cyanure d'hydrogène, un gaz qui est mortel lorsque chauffé à une température supérieure à 115 °C (240 °F). Toutefois, le foin traité avec des agents contenant de l'acide propionique ne produit pas de cyanure d’hydrogène pendant un incendie.

Il n’y a pas si longtemps, de nombreux fermiers épandaient du sel sur le foin au moment de l'entreposer afin de prévenir les incendies. Cependant, des essais ont révélé que le sel n'a aucun effet pour maîtriser un incendie provoqué par une combustion spontanée. La glace carbonique, l'azote liquide ou le dioxyde de carbone projeté dans le foin empêche la combustion en éliminant l'oxygène dans le tas de foin. Habituellement, pour éteindre un feu de foin, il faut enlever tout le foin entreposé afin de trouver des points chauds qui pourraient subsister puis les arroser d’eau.

La combustion spontanée n'est pas un accident. En observant les bonnes pratiques d'entreposage, il est possible d’empêcher la combustion spontanée, mais également d’obtenir du foin de meilleure qualité.

Mesures à prendre

La surveillance et l’inspection des bâtiments et du matériel contribuent grandement à prévenir un incendie à la ferme.

  • Faire inspecter et entretenir régulièrement les bâtiments par un entrepreneur-électricien titulaire d'un permis.
  • Établir un calendrier des travaux d’entretien et de nettoyage préventifs afin de réduire les risques d’incendie.
  • Surveiller les conditions susceptibles d’entraîner une surchauffe dans le bâtiment agricole en utilisant des technologies infrarouges.
  • Travailler en collaboration avec son service d’incendie local et sa compagnie d’assurances pour détecter les problèmes existants à la ferme et les résoudre.
  • S’assurer d’installer un nombre adéquat d’extincteurs et veiller à ce que ceux-ci fonctionnent bien.
  • Examiner avec la famille et les membres du personnel ce qu’il faut faire en cas d’incendie (qui appeler à l’aide, point de rencontre sécuritaire, etc.).