Mortalité hivernale des colonies d’abeilles en 2023

En 2022-2023, le taux de mortalité hivernale estimé des abeilles mellifères chez les apiculteurs commerciaux ayant une exploitation en Ontario s’est chiffré à 36 % – une baisse par rapport à l’estimation de 49 % durant l’hiver 2021-2022. Il faut savoir que la réponse d’un seul apiculteur commercial a influé considérablement sur les données statistiques définitives relatives aux pertes hivernales de l’ensemble des apiculteurs commerciaux. Si l’on exclut la réponse de cet apiculteur, la mortalité hivernale chez les apiculteurs commerciaux chute à 17 %.

La mortalité hivernale estimée chez les apiculteurs commerciaux ontariens a été d’environ 10 % supérieure aux pertes estimées qu’ont signalées les apiculteurs à petite échelle (26 %).

Enfin, la moyenne des pertes estimées d’abeilles mellifères en 2023 dans l’ensemble du Canada a été de 32 %.

Apiculteurs sondés

Au printemps 2023, on a envoyé le questionnaire du sondage par courriel à :

  • 208 apiculteurs commerciaux inscrits (s’entend d’apiculteurs exploitant 50 colonies ou plus)
  • 2 550 apiculteurs à petite échelle inscrits (s’entend d’apiculteurs exploitant 49 colonies ou moins)

On a acheminé le sondage par voie électronique à tous les apiculteurs inscrits (commerciaux et à petite échelle) qui avaient fourni leur adresse de courriel au ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario (MAAARO).

Les apiculteurs ont répondu au sondage sur une base volontaire et ont communiqué eux-mêmes leurs réponses. Ces renseignements ne sont pas vérifiés par le MAAARO ou par un autre organisme indépendant. Ils sont toutefois transmis à l’Association canadienne des professionnels de l'apiculture (ACPA), comme c’est le cas des renseignements recueillis par les autres provinces, en vue d’être consolidés dans un rapport national.

Quelque 72 apiculteurs commerciaux et 488 apiculteurs à petite échelle ont répondu au sondage, soit 20 % des apiculteurs à qui l’on a fait parvenir le sondage.

En examinant les réponses reçues de l’ensemble des apiculteurs inscrits en Ontario au 31 décembre 2022, on constate que 35 % proviennent d’apiculteurs commerciaux représentant 35 276 colonies et que 19 % proviennent d’apiculteurs à petite échelle représentant 3 693 colonies (tableaux 1 et 2). Les réponses combinées représentent 38 % du nombre total de colonies inscrites en 2022.

Tableau 1. Nombre d’apiculteurs par région ayant répondu au sondage 2023 sur les pertes hivernales en apiculture en Ontario.
Région apicoleApiculteurs commerciaux – nbre de répondantsApiculteurs commerciaux – % de répondantsApiculteurs à petite échelle – nbre de répondantsApiculteurs à petite échelle – % de répondants
Centre2231 %16233 %
Est1521 %14029 %
Nord68 %6413 %
Sud2231 %9720 %
Sud-Ouest710 %255 %
Tableau 2. Mortalité hivernale estimée en 2022-2023.
Type d’apiculteursNbre de colonies complètes hivernées à l’automne 2022Nbre de colonies hivernantes viables au 15 mai 2023Nbre de colonies non viables au 15 mai 2023Mortalité durant l’hiver (%)
Commercial35 27622 69012 58635,7 %
À petite échelle3 6932 74794625,6 %

Résultats

La mortalité hivernale estimée des abeilles mellifères et le nombre de répondants ont varié selon la région apicole (tableau 3). La majorité des apiculteurs commerciaux ayant répondu au sondage sont établis dans les régions apicoles du Centre et du Sud. C’est d’ailleurs dans ces régions que l’on trouve le plus grand nombre de colonies d'abeilles mellifères en Ontario. Les réponses reçues des apiculteurs à petite échelle provenaient principalement des régions apicoles du Centre et de l’Est (tableau 1).

Les apiculteurs commerciaux ont déclaré les pertes les plus importantes dans la région du Sud, tandis que les apiculteurs à petite échelle ont déclaré les pertes les plus élevées dans la région du Sud-Ouest (tableau 3). On a constaté un écart du taux de mortalité durant l’hiver 2022-2023 entre les 2 groupes d’apiculteurs, lequel a été de 10,1 points de pourcentage plus élevé chez les apiculteurs commerciaux que chez ceux à petite échelle (tableau 2).

Tableau 3. Nombre d’apiculteurs commerciaux et à petite échelle ayant répondu au sondage, et pourcentage de mortalité hivernale en 2022 dans chaque région apicole en Ontario.
Région apicoleApiculteurs commerciaux – nbre de répondantsApiculteurs commerciaux – mortalité hivernale (%)Apiculteurs à petite échelle – nbre de répondantsApiculteurs à petite échelle – mortalité hivernale (%)
Centre2216,1 %16224,1 %
Est1521,5 %14029,8 %
Nord623,8 %6420,1 %
Sud2246,5 %9723,7 %
Sud-Ouest713,4 %2532,2 %
Total7235,7 %48825,6 %

Lorsque l’on groupe les répondants selon la taille de leur exploitation (nombre de colonies dans l’exploitation), la mortalité des abeilles mellifères durant l’hiver 2022-2023 varie de 15,1 % à 47,9 % (tableau 4). Les apiculteurs dont l’exploitation compte entre 501 et 1 000 colonies ont déclaré moins de pertes de colonies d’abeilles mellifères (15,1 %) que tous les autres groupes d’exploitations apicoles. Les apiculteurs ayant plus de 1 000 colonies ont subi les pertes les plus importantes (47,9 %). Cela dit, si l’on exclut la réponse d’un seul apiculteur commercial qui a eu un impact considérable sur les données statistiques définitives relatives aux pertes hivernales, le taux de mortalité des apiculteurs ayant plus de 1 000 colonies passerait de 47,9 % à 14,5 %. Les apiculteurs dont l’exploitation compte moins de 10 colonies, entre 10 et 49 colonies, entre 50 et 200 colonies et entre 201 et 500 colonies ont enregistré des pertes hivernales moyennement élevées se chiffrant, respectivement à 28,5 %, 24,1 %, 21,3 % et 20,4 %.

Tableau 4. Mortalité des abeilles mellifères durant l’hiver 2022-2023 selon la taille de l’exploitation apicole (nombre de colonies dans une exploitation).
Nbre de répondantsNbre de colonies déclarées à l’automne 2022Mortalité hivernale (%)
376moins de 1028,5 %
11210 à 4924,1 %
4650 à 20021,3 %
13201 à 50020,4 %
9501 à 1 00015,1 %
4plus de 1 00047,9 %

Principaux facteurs expliquant la mort des abeilles

On a demandé aux apiculteurs d’indiquer quels sont, selon eux, les principaux facteurs ayant une incidence sur le taux de mortalité de leurs abeilles mellifères durant l’hiver en les invitant à sélectionner toutes les raisons qui, à leur avis, sont plausibles. Ces opinions peuvent être basées sur des symptômes observables, ou sur l’expérience, le jugement ou les hypothèses les plus probables des apiculteurs.

Les facteurs que les apiculteurs commerciaux ont déclarés les plus souvent comme influant sur la mortalité hivernale (tableau 5) sont les suivants :

  • la famine
  • les colonies faibles
  • le varroa (et virus associés)

Les facteurs que les apiculteurs à petite échelle ont déclarés les plus souvent comme influant sur la mortalité hivernale (tableau 5) sont les suivants :

  • les colonies faibles
  • les conditions météorologiques
  • la famine

Quelque 28 % des apiculteurs commerciaux et 8 % des apiculteurs à petite échelle ont sélectionné « autre » comme cause soupçonnée de perte de colonies. Il faut préciser que 65 % des apiculteurs commerciaux et 22 % des apiculteurs à petite échelle ayant répondu « autre » se doutent que la perte de colonies est attribuable à un empoisonnement causé par les pesticides.

En 2022, le MAAARO n’a reçu aucun rapport d’incident de mortalité saisonnière des abeilles mellifères. Il est donc surprenant de constater le nombre de répondants au sondage ayant déclaré un empoisonnement soupçonné dû aux pesticides comme facteur ayant entraîné la mortalité des colonies d’abeilles mellifères durant l’hiver. Soit les apiculteurs ont subi un incident apparent d’exposition aux pesticides ou d’épandage de pesticides et ne l’ont pas signalé au MAAARO, soit ils font des allégations non fondées ou des suppositions selon lesquelles les pesticides ont provoqué la mortalité de leurs abeilles mellifères.

Bien qu’il soit important de prendre connaissance des préoccupations relatives à un empoisonnement soupçonné causé par les pesticides, il est primordial de signaler de tels incidents au MAAARO en se servant du formulaire en ligne de déclaration d’un incident majeur de mortalité des abeilles mellifères survenu au cours de la saison apicole active.

Tableau 5. Facteurs déterminants de la mortalité des colonies d’abeilles mellifères pendant l’hiver 2022-2023 selon ce qu’ont déclaré les apiculteurs commerciaux et à petite échelle.
Cause soupçonnée de perte de colonies% d’apiculteurs commerciaux ayant fait une déclaration% d’apiculteurs à petite échelle ayant fait une déclaration
Mauvaise qualité des reines29 %12 %
Colonies faibles35 %23 %
Conditions météorologiques25 %20 %
Famine40 %15 %
Varroa (et virus associés)32 %14 %
Autre*28 %8 %
Ne sait pas13 %10 %
Nosémose8 %2 %

*Certains apiculteurs ayant répondu « autre » ont indiqué plusieurs causes soupçonnées de mortalité. Chaque apiculteur ayant répondu « autre » n’est compté qu’une seule fois.

Pratiques de lutte contre les insectes nuisibles et les maladies

Varroa (Varroa destructor)

Dans ce sondage, on a demandé aux apiculteurs comment ils surveillaient les infestations de varroa (figure 1), et quels traitements ils avaient utilisés tout au long de la saison apicole 2022, soit au printemps, à la mi-saison ainsi que de la fin de l’été à l’automne (tableau 6).

Les différentes méthodes de détection du varroa qu’ont utilisées les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

Figure 1. Différentes méthodes de détection du varroa utilisées par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

Texte en format accessible

Proportion d’apiculteurs exerçant une surveillance du varroa

Parmi les apiculteurs qui ont répondu à la question concernant la détection du varroa, 86 % d’apiculteurs commerciaux et 69 % d’apiculteurs à petite échelle ont indiqué qu’ils surveillaient les infestations de varroa dans leurs colonies. Ces apiculteurs ont eu recours à plusieurs méthodes de détection, les plus fréquentes étant le lavage à l’alcool et les plaquettes adhésives.

Certains apiculteurs ont dit utiliser plus d’une méthode pour détecter la présence de varroas. Parmi les apiculteurs ayant répondu « autre », quelques-uns ont mentionné faire une inspection visuelle de leurs colonies pour déceler la présence de varroas, 3 % ont déclaré se servir de la méthode du saupoudrage de sucre et 3 % ont indiqué se servir de la méthode du cylindre de CO2. Toutefois, ces méthodes ne sont ni recommandées ni jugées efficaces dans la mesure où il n’est pas prouvé que la détection visuelle du varroa procure des renseignements précis et où la fiabilité des méthodes de saupoudrage de sucre et du cylindre de CO2 est douteuse, car aucun lien n’est établi entre ces méthodes et les seuils fixés pour l’Ontario.

Les données révèlent que la majorité (86 %) des apiculteurs commerciaux ayant participé à ce sondage exerce une surveillance du varroa. Il s’agit d’une hausse du nombre d’apiculteurs commerciaux ayant déclaré exercer une surveillance du varroa par rapport au pourcentage obtenu en 2021-2022 qui s’élevait à 79 %. Le nombre d’apiculteurs commerciaux qui ne procèdent pas à la détection du varroa a diminué de 7 % comparativement au sondage 2021-2022. De même, la plupart des apiculteurs à petite échelle (69 %) ont déclaré exercer une surveillance du varroa en 2022-2023 par rapport aux 62 % qui avaient fait une déclaration analogue lors du sondage de l’année précédente (2021-2022).

Il est encourageant de constater que le nombre d’apiculteurs ayant répondu au sondage qui prélèvent des échantillons afin de détecter la présence du varroa a augmenté depuis 2022. Cela dit, il demeure préoccupant qu’un fort pourcentage d’apiculteurs (14 % commerciaux et 31 % à petite échelle) ayant répondu au sondage aient déclaré n’effectuer aucune activité de détection du varroa. Il s’agit d’une proportion trop élevée d’apiculteurs qui néglige de surveiller le varroa compte tenu de la menace que celui-ci fait peser sur l’ensemble de l’industrie. Idéalement, tous les apiculteurs doivent exercer une surveillance du varroa qui, combinée à un traitement, est essentielle pour lutter contre cet ennemi des abeilles mellifères. Sans la mise en œuvre de mesures de lutte contre le varroa, les colonies sont exposées à un risque élevé de mortalité ou de propagation du varroa à d’autres colonies situées à proximité. Qui plus est, la recherche a révélé qu’une lutte inefficace contre le varroa est la première cause de mortalité hivernale dans les colonies d'abeilles mellifères en Ontariofootnote 1.

Ces résultats confirment la nécessité de proposer de la formation complémentaire et des activités de perfectionnement aux apiculteurs, et de leur transmettre davantage de messages sur les pratiques de gestion optimales et sur la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Il importe que les apiculteurs assurent une meilleure surveillance du varroa, car cette pratique contribue dans une large mesure à évaluer l’état de santé des colonies et à en améliorer les chances de survie à l’approche de l’hiver. Les apiculteurs ne peuvent pas se contenter de traiter leurs colonies sans connaître le niveau d’infestation de varroa.

Fréquence de surveillance du varroa

Il est encourageant de constater en examinant les données du sondage qu’une proportion importante d’apiculteurs commerciaux et à petite échelle prélèvent des échantillons au moins 2 fois par saison, et que bon nombre d’entre eux le font même 3 fois par saison (figure 2). Une analyse plus détaillée des apiculteurs qui prélèvent des échantillons plus de 3 fois par année montre que 58 % des apiculteurs commerciaux et 45 % des apiculteurs à petite échelle le font chaque mois (figure 3). Parallèlement, des progrès restent à faire chez ces 2 catégories d’apiculteurs. Une surveillance fréquente, notamment à mesure que la saison apicole avance, constitue l’une des plus importantes pratiques de gestion que peuvent adopter les apiculteurs pour s’assurer d’appliquer en temps opportun un traitement contre le varroa de manière à empêcher celui-ci de causer trop de dommages.

La fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

Figure 2. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

Texte en format accessible

La fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle qui ont déclaré exercer une surveillance au moins trois fois par année en 2022.

Figure 3. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle ayant déclaré exercer une surveillance au moins 3 fois par année en 2022. Les participants au sondage pouvaient donner plus d’une réponse.

Texte en format accessible

Traitements utilisés pour lutter contre le varroa

Les apiculteurs ontariens ont recours à différents traitements pour lutter contre le varroa (tableau 6). À l’occasion du sondage, on leur a demandé quels traitements contre le varroa ils ont utilisés durant 3 périodes de 2022 : au printemps, à la mi-saison et de la fin de l’été à l’automne. Ces périodes sont définies comme suit :

  • printemps – de la fin de l’hiver au commencement de la miellée
  • mi-saison – du commencement à la fin de la miellée
  • fin de l’été à l’automne – de l’enlèvement des dernières hausses aux fins de la production de miel jusqu’à la préparation des colonies pour l’hiver

La plupart des apiculteurs commerciaux ont déclaré avoir utilisé ApivarMD (39 %) pour lutter contre le varroa au printemps 2022, alors qu’ils ont indiqué s’être servis de façon générale d’acide oxalique (53 %) et d’ApivarMD (50 %) de la fin de l’été à l’automne 2022. Les apiculteurs à petite échelle ont, pour leur part, dit avoir principalement eu recours à ApivarMD (24 %) et à Formic Pro (22 %) pour lutter contre le varroa au printemps 2022, tandis que de la fin de l’été à l’automne 2022, la majorité d’entre eux ont privilégié les traitements à l’acide oxalique (32 %) et à l’ApivarMD (29 %). Le sondage a révélé que 26 % des apiculteurs à petite échelle sondés n’appliquent pas de traitement contre le varroa au printemps. Cette constatation est préoccupante dans la mesure où le printemps est une période propice à la lutte contre les populations de varroas (en appliquant un traitement) afin de prévenir les dommages que celles-ci peuvent causer et la croissance de ces populations au cours de la saison apicole.

Une grande proportion d’apiculteurs commerciaux (47 %) et à petite échelle (62 %) ont fait savoir qu’ils n’avaient pas appliqué de traitement contre le varroa pendant la mi-saison 2022. Quant aux apiculteurs des 2 groupes qui ont appliqué un traitement au cours de cette période, ils ont communément arrêté leur choix sur Formic Pro. Le recours à un traitement de mi-saison est désormais un volet important de la stratégie visant à prévenir la croissance des populations de varroas et les dommages que celles-ci sont susceptibles de causer. Bon nombre d’apiculteurs ontariens ne sont sans doute pas familiers avec ce genre de traitement et le moment auquel il doit être appliqué. Ils doivent néanmoins envisager de l’intégrer à leurs pratiques de lutte saisonnière afin de garder une longueur d’avance sur la croissance du varroa.

Les traitements que les apiculteurs commerciaux et à petite échelle ont le moins fréquemment utilisés ont été :

  • CheckMite+MC
  • BayvarolMD
  • ApiLifeVar
  • Hopguard II

Il convient de signaler que les produits ApiLifeVar et Hopguard II sont des traitements assez récents qui sont homologués pour l’usage au Canada.

Ces résultats sont prometteurs, puisqu’ils révèlent que les apiculteurs ontariens emploient sans doute en alternance différents acaricides, une stratégie préconisée pour retarder l’apparition de populations de varroas résistantes. Ces données peuvent toutefois soulever certaines préoccupations, car certaines réponses fournies avec la réponse « autre » ont révélé l’utilisation de traitements à la mi-saison qui ne sont peut-être pas homologués pour l’usage pendant la miellée.

Cela dit, il se peut que des apiculteurs aient utilisé des traitements de mi-saison non homologués parce qu’ils avaient déjà enlevé les hausses de leurs ruches ou qu’ils assuraient la gestion de colonies ne produisant pas de miel (comme des nuclei ou des unités de pollinisation). Il convient de signaler que l’industrie semble se fier passablement à ApivarMD comme méthode de lutte contre le varroa. Si l’industrie ontarienne vient à constater que le varroa acquière une résistance à l’amitraze (l’ingrédient actif d’ApivarMD), cela peut compromettre sérieusement la capacité des apiculteurs de lutter contre le varroa et entraîner une hausse de la mortalité des colonies en Ontario. Quoique d’autres produits chimiques soient offerts, bon nombre d’entre eux sont sensibles à la température (comme l’acide formique) et, pour cette raison, il se peut que non seulement le choix du moment, mais également le choix du traitement soient tributaires des conditions météorologiques pendant une saison particulière en Ontario.

Puisqu’on a documenté des cas de résistance à l’amitraze dans les populations de varroas aux États-Unis, il est extrêmement important de surveiller leur capacité de résistance au Canada. De nouveaux composés sont indispensables pour lutter contre le varroa afin que les apiculteurs disposent d’un certain nombre de traitements fiables qu’ils peuvent employer en alternance et ainsi continuer d’adopter des pratiques efficaces de lutte intégrée des ennemis des cultures dans leur exploitation apicole.

Il faut savoir que le varroa en Ontario a développé une résistance à d’autres composés (par exemple, au coumaphos, au fluvalinate et à la fluméthrine) ou que l’efficacité de ceux-ci est plus faible qu’auparavant.

Tableau 6. Traitements utilisés pour lutter contre le varroa au printemps, à la mi-saison et de la fin de l’été à l’automne 2022 selon ce qu’ont déclaré les apiculteurs commerciaux et à petite échelle. Les participants au sondage pouvaient donner plus d’une réponse.
Traitement contre le varroa (ingrédient actif)Printemps 2022 – % d’apiculteurs commerciauxPrintemps 2022 – % d’apiculteurs à petite échelleMi-saison 2022 – % d’apiculteurs commerciauxMi-saison 2022 – % d’apiculteurs à petite échelleFin de l’été/automne 2022 – % d’apiculteurs commerciauxFin de l’été/automne 2022 – % d’apiculteurs à petite échelle
ApistanMD (fluvalinate)7 %3 %S. O.S. O.7 %6 %
CheckMite+MC (coumaphos)0 %0 %S. O.S. O.0 %0 %
ApivarMD  (amitraz)39 %24 %S. O.S. O.50 %29 %
Thymovar (thymol)6 %3 %S. O.S. O.3 %3 %
ApiLifeVar (thymol et huiles essentielles)0 %0 %S. O.S. O.0 %0 %
BayvarolMD (fluméthrine)0 %0 %S. O.S. O.0 %0 %
Acide formique 65 % – 40 mL, épandages multiples17 %5 %S. O.S. O.15 %4 %
Acide formique 65 % – 250 mL, épandage unique3 %3 %S. O.S. O.1 %2 %
Mite Away Quick StripMC (formic acid)3 %5 %7 %6 %4 %5 %
Formic Pro (acide formique)17 %22 %33 %21 %24 %17 %
Acide oxalique26 %16 %S. O.S. O.53 %32 %
Hopguard II (composés de houblon)0 %2 %0 %1 %0 %1 %
Autre6 %2 %10 %6 %6 %2 %
Aucun14 %26 %47 %62 %0 %14 %

Nosémose causée par le champignon Nosema sp. (N. apis et N. ceranae)

Quelque 92 % des apiculteurs commerciaux et 89 % des apiculteurs à petite échelle ayant répondu au sondage ont indiqué n’avoir appliqué aucun traitement contre la nosémose au printemps 2022, alors que 89 % des apiculteurs commerciaux et 79 % des apiculteurs à petite échelle ayant répondu au sondage ont fait savoir qu’ils n’avaient pas appliqué de traitement contre la nosémose à l’automne 2022 (tableau 7). La nosémose est une maladie qui retarde le développement des colonies d'abeilles mellifères au printemps et qui réduit la durée de vie des abeilles mellifères, mais elle ne s’est pas révélée un facteur de mortalité des colonies durant l’hiverfootnote 2footnote 3.

Tableau 7. Traitements utilisés pour lutter contre la nosémose au printemps et à l’automne 2022 selon ce qu’ont déclaré les apiculteurs commerciaux et à petite échelle.
Traitement contre la nosémosePrintemps 2022 – % d’apiculteurs commerciauxPrintemps 2022 – % d’apiculteurs à petite échelleAutomne 2022 – % d’apiculteurs commerciauxAutomne 2022 – % d’apiculteurs à petite échelle
Fumagilline6 %6 %6 %5 %
Autre3 %1 %0 %1 %
Aucun92 %89 %89 %79 %

Loque américaine (Paenibacillus larvae)

Un peu plus que la moitié des apiculteurs commerciaux ayant répondu à cette question du sondage ont appliqué un traitement à l’oxytétracycline contre la loque américaine au printemps 2022 (58 %) et à l’automne 2022 (54 %). Par comparaison, 19 % des apiculteurs à petite échelle ont déclaré avoir appliqué un traitement contre la loque américaine au printemps et 17 % l’ont fait à l’automne (tableau 8).

Tableau 8. Traitements utilisés pour lutter contre la loque américaine au printemps et à l’automne 2022 selon ce qu’ont déclaré les apiculteurs commerciaux et à petite échelle.
Traitement contre la loque américainePrintemps 2022 – % d’apiculteurs commerciauxPrintemps 2022 – % d’apiculteurs à petite échelleAutomne 2022 – % d’apiculteurs commerciauxAutomne 2022 – % d’apiculteurs à petite échelle
Oxytétracycline58 %19 %54 %17 %
Tylosin0 %0 %1 %0 %
Lincomycine0 %0 %0 %0 %
Autre0 %0 %0 %0 %
Aucun39 %75 %44 %70 %

Mortalité hivernale en Ontario

L’Association canadienne des apiculteurs professionnels compile des données sur la mortalité hivernale que lui transmet chaque province et publie un rapport annuel sur les pertes de colonies d’abeilles mellifères à l’échelle nationale. La figure 4 présente une comparaison des niveaux de mortalité hivernale en Ontario et au Canada. Il est intéressant de constater que les pertes d’abeilles estimées en 2023 chez les apiculteurs commerciaux ontariens (35,7 %) sont approximativement 3,5 % supérieures à l’estimation des pertes moyennes d’abeilles pour l’ensemble du Canada (32,2 %).

Le pourcentage de mortalité hivernale déclarée par les apiculteurs de l’Ontario et du Canada de 2007 à 2023.

Figure 4. Mortalité hivernale déclarée (en %) par les apiculteurs commerciaux de l’Ontario (bleu) et du Canada (gris) de 2006-2007 à 2022-2023.

Texte en format accessible

Texte en format accessible

Figure 1. Différentes méthodes de détection du varroa utilisées par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

La figure 1 montre les différentes méthodes de détection du varroa qu’ont utilisées les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022. Chez les apiculteurs commerciaux, 5 % ont déclaré utiliser la méthode de la plaquette adhésive, 62 % la méthode du lavage à l’alcool, 9 % la méthode de la plaquette adhésive et du lavage à l’alcool, 9 % une autre méthode, et 14 % ont dit ne pas procéder à la détection du varroa. Chez les apiculteurs à petite échelle, 25 % ont déclaré utiliser la méthode de la plaquette adhésive, 26 % la méthode du lavage à l’alcool, 6 % la méthode de la plaquette adhésive et du lavage à l’alcool, 11 % une autre méthode, et 31 % ont dit ne pas procéder à la détection du varroa.

Figure 2. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022.

La figure 2 montre la fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle en 2022. Chez les apiculteurs commerciaux, 50 % ont déclaré surveiller au moins 3 fois par année, 19 % au printemps et à l’automne, 7 % seulement au printemps, 8 % seulement à l’automne, et 15 % n’ont pas répondu à cette question. Chez les apiculteurs à petite échelle, 29 % ont déclaré surveiller au moins 3 fois par année, 23 % au printemps et à l’automne, 6 % seulement au printemps, 13 % seulement à l’automne, et 29 % n’ont pas répondu à cette question.

Figure 3. Fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle ayant déclaré exercer une surveillance au moins 3 fois par année en 2022. Les participants au sondage pouvaient donner plus d’une réponse.

La figure 3 montre la fréquence de surveillance du varroa par les apiculteurs commerciaux et à petite échelle qui ont déclaré exercer une surveillance au moins 3 fois par année en 2022. Chez les apiculteurs commerciaux, 6 % ont dit surveiller toutes les 2 semaines, 58 % tous les mois, 31 % moins souvent que tous les mois, 11 % avant et après chaque traitement, et 3 % n’ont pas répondu à la question. Chez les apiculteurs à petite échelle, 13 % ont dit surveiller toutes les 2 semaines, 45 % tous les mois, 32 % moins souvent que tous les mois, 13 % avant et après chaque traitement, et 1 % n’a pas répondu à la question.

Figure 4. Mortalité hivernale déclarée (en %) par les apiculteurs commerciaux de l’Ontario (bleu) et du Canada (gris) de 2006-2007 à 2022-2023.

La figure 4 montre le pourcentage de mortalité hivernale déclarée par les apiculteurs de l’Ontario et du Canada de 2007 à 2023. Les taux de mortalité hivernale déclarés en Ontario et au Canada (respectivement) sont les suivants : 2007 – 37 % et 29 %; 2008 – 33 % et 35 %; 2009 – 31 % et 34 %; 2010 – 22 % et 21 %; 2011 – 43 % et 29 %; 2012 – 12 % et 15 %; 2013 – 38 % et 29 %; 2014 – 58 % et 25 %; 2015 – 38 % et 16 %; 2016 – 18 % et 17 %; 2017 – 27 % et 25 %; 2018 – 46 % et 33 %; 2019 – 23 % et 26 %; 2020 – 19 % et 30 %; 2021 – 18 % et 23 %; 2022 – 49 % et 46%; 2023 – 36 % et 32 %.


Notes en bas de page

  • note de bas de page[1] Retour au paragraphe Guzman-Novoa, E., L. Eccles, Y. Calvete, J. McGowan, P. Kelly et A. Correa-Benitez. « Varroa Destructor is the Main Culprit for Death and Reduced Populations of Overwintered Honey Bee (Apis Mellifera) Colonies in Ontario, Canada », Apidologie, vol. 41, no 4, 2010, p. 443-450.
  • note de bas de page[2] Retour au paragraphe Emsen, B., E. Guzman-Nova, M. M. Hamiduzzaman, L. Eccles, B. Lacey, R. A. Ruiz-Pérez et M. Nasr. « Higher prevalence and levels of Nosema ceranae than Nosema apis infections in Canadian honey bee colonies », Parasitol Res, vol. 115, no 1, 2016, p. 175-181.
  • note de bas de page[3] Retour au paragraphe Emsen, B., A. De La Mora, B. Lacey, L. Eccles, P. G. Kelly, C. A. Medina-Flores, T. Petukhova, N. Morfin et E. Guzman-Novoa. « Seasonality of Nosema ceranae infections and their relationship with honey bee populations, food stores, and survivorship in a North American region », Veterinary Sciences, vol. 7, no 3, 2020, p. 131.