Les municipalités construisent et entretiennent l’infrastructure publique en vue de répondre aux besoins de leur population. Par conséquent, le public s’attend à ce qu’elles offrent un éventail de services locaux.

Bien qu’en règle générale le public ne pense pas à l’infrastructure nécessaire à la prestation des services (par exemple, l’approvisionnement en eau potable), une municipalité doit constamment prendre des décisions concernant les investissements dans l’infrastructure qui ont des impacts environnementaux, économiques, politiques et sociaux, et qui supposent de planifier :

  • ses obligations à l’égard des générations futures;
  • le niveau des services actuellement fournis par ses actifs;
  • l’infrastructure dont l’entretien relève de la responsabilité de la municipalité;
  • le niveau de service que devront fournir ses actifs à l’avenir;
  • la manière de faire des investissements durables pour répondre aux besoins futurs.

Les municipalités doivent relever le défi de rénover ou de remplacer l’infrastructure existante tout en investissant dans de nouveaux éléments d’infrastructure dans les collectivités en croissance. Bon nombre de municipalités sont aujourd’hui confrontées au vieillissement des actifs et à des pressions croissantes liées au financement de l’infrastructure. Plusieurs facteurs contribuent à l’état préoccupant de l’infrastructure à l’heure actuelle, dans les municipalités de l’Ontario comme dans le reste du monde, notamment :

  • L’évolution rapide des tendances démographiques dans les zones urbaines, qui exerce des pressions sur l’infrastructure existante et crée une demande accrue d’investissements dans de nouveaux éléments d’infrastructure.
  • Le déclin de la population dans les zones rurales et éloignées, qui tend à empêcher les petites municipalités de produire suffisamment de revenus pour investir dans des éléments d’infrastructure essentiels.
  • Des contraintes financières et des priorités concurrentes, qui créent un écart entre les besoins d’infrastructure et les ressources disponibles pour y répondre. C’est ce qu’on appelle souvent le « déficit d’infrastructure ».
  • Les normes de services peuvent avoir une incidence sur les décisions en matière d’infrastructure et nécessiter des investissements en vue de la prestation d’un certain niveau de service. Par exemple, le Règlement de l’Ontario 169/03 (Normes de qualité de l’eau potable de l’Ontario) établit des normes de service pour les réseaux d’eau potable, y compris ceux que les municipalités possèdent et exploitent.
  • Le changement climatique, qui provoque des phénomènes météorologiques extrêmes (p. ex., inondations, incendies de forêt, ouragans), présente un risque pour une infrastructure efficace et durable. Les changements climatiques à long terme (p. ex., hausse des températures, régime des pluies) peuvent détériorer progressivement les infrastructures.

Vers l’avenir : planification de la gestion des biens

La planification de la gestion des biens est le processus de prise de décisions coordonnées concernant la construction, l’exploitation, l’entretien, la modernisation, le remplacement et l’aliénation des biens d’infrastructure. Un leadership à l’échelle locale est nécessaire pour assurer la durabilité des investissements en infrastructure.

La gestion des biens est une approche intégrée, axée sur le cycle de vie, de la gestion efficace des éléments d’infrastructure dont l’objectif est de maximiser les avantages, de gérer les risques et de fournir au public un niveau de service satisfaisant d’une manière durable et respectueuse de l’environnement. Cette approche peut aider les collectivités à atteindre les niveaux de service désirés de manière soigneusement planifiée, efficace et durable.

Le processus global de planification de la gestion des biens examine les objectifs d’une organisation, détermine comment ces objectifs dépendent de l’infrastructure, puis élabore un plan visant à fournir les services des infrastructures au coût du cycle de vie le moins élevé. L’établissement du coût du cycle de vie évalue le coût total d’un bien pendant toute sa durée de vie utile, de sa construction à son aliénation. La gestion des biens est indispensable pour parvenir à une compréhension commune et systématique des besoins les plus importants et de la meilleure façon de les combler.

L’amélioration de la prise de décisions d’infrastructure commence par l’élaboration d’un plan de gestion des biens (PGB) efficace. Le PGB permet de trouver l’équilibre entre les ressources financières et les besoins de la municipalité.

Un PGB efficace s’appuie sur une perspective à long terme afin de maximiser les avantages procurés par l’infrastructure.

Avantages du plan de gestion des biens

Des coûts justifiés

Les coûts supplémentaires liés à l’élaboration d’un PGB détaillés sont généralement compensés par les économies réalisées.

Une prise de décisions améliorée

Le PGB peut servir à donner aux décisionnaires des conseils objectifs et fondés sur des données probantes concernant l’affectation des ressources. Ceci peut faciliter l’établissement des priorités en vue des décisions relatives aux immobilisations en période budgétaire.

Des risques réduits

De bonnes pratiques de gestion des biens peuvent réduire les risques en indiquant les problèmes et en favorisant l’intervention précoce. Ceci est particulièrement important pour les principaux actifs, par exemple les infrastructures d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées, dont la défaillance pourrait perturber ou déranger le public.

Financement provincial

Pour avoir accès à un financement provincial à l’appui de ses projets d’infrastructure, une municipalité devra montrer qu’elle entreprend un processus de planification de la gestion des biens et que ses demandes de financement sont étayées par son plan.

Une confiance accrue du public

Un PGB transparent et accessible au public permet à une municipalité et aux citoyens de comprendre le coût de la prestation des services. Ceci contribue à renforcer la responsabilisation dans la prise de décisions municipales, donne au conseil municipal la possibilité de discuter des besoins, des priorités et des exigences financières sur la base d’informations plus complètes, et montre que l’argent public est investi de manière responsable en faisant ressortir les résultats obtenus.

Stratégie de financement du plan de gestion des biens

La stratégie de financement est un élément clé d’un PGB détaillé, qui compare les besoins d’actifs à court et à long terme aux revenus disponibles. La stratégie de financement durable a recours à divers outils financiers, notamment :

  • les impôts;
  • les frais d’utilisation;
  • les frais de services;
  • les redevances d’aménagement.

Les pratiques exemplaires veulent que la planification de la gestion des biens fasse partie du processus budgétaire annuel et de la planification financière à long terme.

Si les budgets de fonctionnement mettent généralement l’accent sur le maintien des services, les budgets d’immobilisations sont utilisés pour les éléments d’actif à long terme qui soutiennent et améliorent les services. La planification financière à long terme, qui peut porter sur 10 ans, 20 ans ou même davantage, tient compte des lacunes recensées dans le PGB et formule des stratégies visant à les combler.

Pour atteindre la durabilité financière et l’équilibre des coûts à long terme, une municipalité peut avoir besoin d’une stratégie financière décrivant les liens à long terme entre :

  • le plan d’immobilisations;
  • les réserves;
  • la dette.

L’emprunt constitue une autre source de financement pouvant servir à la mise en œuvre du plan. Il peut permettre à une municipalité de répartir les coûts d’un projet sur plusieurs années. Ainsi, les coûts d’infrastructure, y compris les coûts d’entretien, peuvent être supportés non seulement par les contribuables d’aujourd’hui, mais aussi par les contribuables de demain.

L’intégration de la planification de la gestion des biens dans un plan financier à long terme plus large aide les municipalités à disposer d’un ensemble de stratégies variées et bien organisées pour financer leurs besoins en infrastructure.

Calcul des investissements en infrastructure

La municipalité doit déterminer l’impact des niveaux de service afin d’évaluer les investissements nécessaires. Les éléments d’infrastructure servent à fournir des services au public et la demande de services de la part du public aide à établir les niveaux de service requis.

La planification de la gestion des biens suppose :

  • de faire la différence entre la demande de services municipaux et la capacité de la municipalité à répondre à cette demande;
  • de préciser le rôle que joue l’infrastructure dans la prestation de ces services.

S’il n’existe pas de consensus sur la définition du « déficit d’infrastructure », on le décrit généralement comme le rapport entre la valeur de l’infrastructure existante et la valeur de l’infrastructure nécessaire.

Une municipalité pourrait choisir de procéder à une évaluation des besoins en vue d’établir l’existence d’un écart positif ou négatif en matière d’infrastructure.

Scénario d’investissement en infrastructure : rue Principale, ville de Saint-Exemple

Si une municipalité envisage de reconstruire une route, elle peut avoir besoin d’évaluer le niveau de service attendu de la route. Le niveau de service ou l’état d’un élément d’infrastructure peut être évalué de manière générale (p. ex. mauvais, passable, bon ou excellent), en fonction d’un ensemble de critères, ou de manière plus technique en fonction de données précises (p. ex. type, étendue et gravité des dégradations de la chaussée).

La municipalité peut également devoir tenir compte d’exigences légales, comme les normes minimales relatives à l’entretien des routes établies par les règlements.

Imaginons que la rue Principale de la municipalité de Saint-Exemple fait l’objet d’une évaluation et que le conseil municipal conclut que la rue est en mauvais état (40 sur 100), suggérant que la municipalité devrait intervenir. Cette information suscite une discussion entre les conseillers sur le niveau de service que devrait offrir la rue Principale. Saint-Exemple chercherait alors à optimiser ses investissements dans la route à l’aide d’une approche axée sur le cycle de vie afin de minimiser ses coûts à long terme.

Le conseil municipal doit choisir entre :

  • l’option A : des investissements moins fréquents et plus élevés;
  • l’option B : des investissements plus fréquents et moins élevés.

L’option A coûte 6 M$ tous les 25 ans et l’état de la route passe de mauvais à excellent uniquement dans les années d’investissement. L’investissement total est de 18 M$ sur 50 ans.

L’option B coûte 2 M$ tous les 15 ans et l’état de la route passe de mauvais à bon. L’investissement total s’élève à un peu plus de 8 M$ sur 50 ans.

Les municipalités disposent rarement de ressources suffisantes pour payer directement un projet en un an. Il importe donc d’avoir un plan de gestion des biens soigneusement élaboré et détaillé et une stratégie financière afin de bien planifier les immobilisations.

Résumé

  • Les municipalités dispensent beaucoup de services essentiels à la population ontarienne. Ces services dépendent souvent d’éléments d’infrastructure bien :
    • conçus;
    • construits;
    • entretenus.
  • Pour déterminer les besoins d’investissement en infrastructure, il importe de tenir compte des normes requises et des niveaux de service désirés par le public.
  • Une stratégie d’investissement fondée sur le cycle de vie permet de minimiser les coûts d’infrastructure à long terme.
  • Le déficit d’infrastructure est la différence entre l’état d’un élément d’infrastructure et le niveau de service attendu de cet élément.