3.1 Préparation

La collecte de toutes les informations disponibles au sujet de l’évaluation ou du site archéologique devrait être un aspect clé de la préparation. Transmettre ces importantes informations à la communauté autochtone dès le début du processus de participation est un excellent point de départ. La communauté autochtone peut alors partager ses connaissances et prendre des décisions au sujet de son intérêt et de son niveau de participation au projet archéologique.

Après avoir déterminé les communautés autochtones les plus susceptibles d’être intéressées à votre projet, vous devriez recueillir des renseignements de base sur ces communautés, comme leurs affiliations culturelles, leur histoire et leurs réalités actuelles (langues, gouvernance, facteurs socioéconomiques, et caetera).

L’héritage des relations historiques entre les peuples autochtones et non autochtones du Canada a eu un profond effet sur les communautés autochtones. Il faut comprendre cela pour pouvoir être à l’écoute des communautés et comprendre leurs besoins. Certains archéologues-conseils ont des connaissances étendues dans ce domaine. D’autres approfondiront leur compréhension avec le temps en travaillant avec des communautés autochtones. Pour les archéologues-conseils désireux d’approfondir leur connaissance, une liste de ressources, une bibliographie et un glossaire sont offerts à la fin du present bulletin.

3.2 Commencement et maintien de la participation

L’élaboration du processus de participation devrait se faire en collaboration. C’est là une bonne façon de s’assurer que la communauté autochtone est intéressée au projet archéologique, à l’aise avec le processus et capable d’y prendre part. Au lieu de présenter à la communauté un ensemble rigide d’exigences fondées sur un calendrier immuable, commencez par communiquer clairement les objectifs de la participation que vous sollicitez et demandez des opinions sur la façon de procéder. Selon l’expérience passée de la communauté, les étapes initiales de la participation pourraient nécessiter ce qui suit :

  • une orientation sur la place de l’archéologie dans le processus d’aménagement du territoire, une description de votre rôle en tant qu’archéologue dans le projet et un survol des stades typiques des travaux archéologiques dans le cadre du projet
  • des renseignements sur le projet archéologique prévu, comme les faits que vous avez recueillis jusque là
  • le type de contribution (connaissance) ou de participation que vous aimeriez obtenir de la communauté et comment cela pourrait changer selon les stades du projet

Voici d’autres pratiques efficaces :

  • Faire preuve de respect à l’égard des activités traditionnelles et saisonnières de la communauté
  • Discuter de la participation possible des entreprises et des particuliers de la communauté autochtone à l’évaluation archéologique (par exemple, équipes des travaux sur le terrain ou de surveillance)
  • Demander à la communauté si elle a déjà cerné des lieux d’importance culturelle ou spirituelle sur son territoire traditionnel (par exemple, cartographie des zones ayant une valeur sur le plan du patrimoine culture) et si elle accepterait de transmettre ces informations si elles sont pertinentes pour le projet

Demandez à des représentants de la communauté comment ils préfèrent échanger des renseignements sur le projet archéologique et tenez-en compte pour concevoir les processus de communication. Demandez si la communauté a déjà participé à d’autres projets archéologiques et comment on avait alors procédé.

Il importe de s’entendre avec la ou les communautés autochtones pour clarifier les communications, notamment en précisant comment la communauté participera au projet archéologique, quand vous lui demanderez sa contribution et comment vous utiliserez ces renseignements, et comment vous rendrez compte à la communauté du déroulement du projet. Certaines communautés autochtones ont déjà élaboré des ententes (parfois appelées protocoles) avec les organismes des administrations locales ou provinciales, les administrations municipales, les cabinets ou associations d’archéologues-conseils ou les promoteurs. De telles ententes prévoient des modalités de notification et des processus de participation ou de consultation. Demandez aux représentants de la communauté s’ils ont déjà conclu de telles ententes qui pourraient servir de point de départ à la discussion.

En écoutant la communauté dès les premières étapes, vous découvrirez la façon dont l’archéologie est perçue et vous apprendrez le rôle qu’elle joue dans la communauté. Cela vous permettra également de jeter les bases de l’élaboration du processus de participation qui suivra.

Soulignons que les contacts en personne sont préférables pour favoriser la participation. Des rencontres sont généralement plus efficaces que l’envoi de lettres ou les appels téléphoniques, tant pour les étapes initiales de la participation que pour toute la durée du projet archéologique. Dans la mesure du possible, organisez les rencontres dans la communauté autochtone. Vous devrez peut-être communiquer l’information de manière formelle et informelle, au moyen de documents écrits, d’exposés et de simples conversations. Toutes les interactions devraient prévoir assez de temps pour permettre aux représentants de la communauté de poser des questions et d’exprimer leurs points de vue.

Essayez de tenir compte des priorités de la communauté et des autres contraintes imposées à ses représentants. De nombreuses communautés autochtones sont écrasées par le volume de demandes de consultation et de participation des gouvernements et des promoteurs.

Vos efforts pour solliciter la participation de la communauté en tenant compte de ce fardeau seront sans doute appréciés. Par exemple, prévoyez des délais généreux dans le plan de projet archéologique, organisez et menez des séances d’information communautaires au sujet du projet, ou cherchez des occasions de collaborer avec d’autres consultants ou avec votre client pour regrouper des processus de participation portant sur de multiples projets. Si une communauté vous informe que les ressources limitées dont elle dispose pourraient nuire à sa participation, vous voudrez peut-être faciliter les communications entre la communauté et votre client pour discuter de la meilleure façon d’appuyer la participation autochtone.

Il est certain qu’une approche efficace consiste à établir des relations à long terme avec la communauté en encourageant la participation et en maintenant les contacts au moyen de communications suivies. De telles relations peuvent :

  • faciliter l’échange d’informations
  • favoriser une compréhension commune des intérêts
  • établir des voies de communication
  • faciliter et accélérer les processus relatifs à de futurs projets archéologiques

3.3 Intégration de la contribution de la communauté autochtone

Comme nous l’avons mentionné dans la section I du présent bulletin, lorsque vous recommandez des mesures d’évitement et de protection ou des fouilles pour certains types de sites archéologiques, vous devez inviter les communautés autochtones à participer à l’élaboration de la stratégie pour en atténuer les effets sur le site.

Dans les normes et directives, il est clair que les mesures d’évitement et de protection constituent l’option privilégiée pour les sites archéologiques ayant une valeur ou un caractère sur le plan du patrimoine culturel. En effet, cette option préserve l’intégrité des sites (voir Normes et directives à l’intention des archéologues-conseils, section 4.1). Il convient de discuter des mesures d’atténuation possibles avec la communauté autochtone dès le début du projet archéologique, de s’assurer que les options sont bien comprises et de consigner la préférence de la communauté. Vous devez tenir compte de la contribution de la communauté autochtone au moment où vous formulez des recommandations relatives aux mesures d’atténuation. Cependant, comme les promoteurs ont la plus grande marge de manœuvre au début d’un projet d’aménagement, il serait bon que vous informiez votre client de la préférence de la communauté le plus tôt possible.

Lorsque vos recommandations ne correspondent pas à la préférence de la communauté, vous devriez également en informer votre client dès que possible.

Les normes et directives n’exigent pas que vous négociiez une entente entre la communauté autochtone et votre client.

Voici d’autres exemples de stratégies efficaces pour intégrer la contribution des communautés autochtones :

  • Recueillir des informations dans la langue de la communauté autochtone visée. Des données culturelles d’importance inhérentes à la langue même peuvent se perdre dans la traduction vers l’anglais ou le français. Un dialogue avec des locuteurs de la langue de la communauté, que ce soit directement ou par l’intermédiaire d’un interprète, pourrait mener à une perception plus juste du site archéologique, de sa fonction ou des utilisations traditionnelles de cette zone
  • Adapter les processus ou stratégies des travaux sur le terrain, comme dans les exemples suivants :
    • intégrer les cérémonies autochtones au processus des travaux sur le terrain
    • élargir la prospection du stade 2 pour y inclure des terres considérées comme ayant un intérêt pour la communauté autochtone, même si elles ne présentent qu’un faible potentiel et contiennent probablement peu de ressources du patrimoine culturel
    • pour tenir compte du caractère délicat de certains sujets soulevés par une communauté autochtone concernant le site archéologique, augmenter le secteur de la zone labourée qui fera l’objet d’une fouille manuelle plutôt que d’un décapage mécanique du sol végétal
    • travailler avec les surveillants autochtones au cours des travaux archéologiques sur le terrain
  • Inclure les préoccupations des communautés autochtones dans vos recommandations au ministère du Industries du patrimoine, du sport, du tourisme et de la culture concernant la destination des collections

3.4 Compte rendu aux communautés autochtones

Toutes les parties devraient s’entendre sur un processus clair et transparent pour rendre compte du projet à la communauté autochtone avant, durant et après les travaux archéologiques sur le terrain. Cette mesure est inhérente au processus de participation et il serait bon qu’elle dépasse le simple envoi postal du rapport du projet archéologique à la communauté.

Le passé est lourd à cet égard. Trop d’experts de l’extérieur sont venus étudier les communautés autochtones sans jamais partager les données avec les communautés participantes. Aux yeux de ces communautés, ces données ont souvent été utilisées par la suite contre leur intérêt. Compte tenu de ces regrettables antécédents, la communauté autochtone appréciera probablement vos efforts pour faire en sorte que les données importantes tirées du projet archéologique soient mises à sa disposition pour son usage futur. Cela contribuera également à l’établissement de relations à long terme avec cette communauté.

L’échange d’informations peut prendre diverses formes, ce qui comprend, sans toutefois s’y limiter, un rapport écrit. Pour bien exprimer à quel point vous respectez les efforts déployés et les contributions apportées, vous pourriez présenter à la communauté un exposé final sur votre projet archéologique. Cet exposé devrait mettre l’accent sur la contribution de la communauté, ainsi que sur les conclusions de l’évaluation archéologique. La communauté apprécierait probablement de recevoir un exemplaire des renseignements préliminaires compilés durant le projet archéologique. Lorsque la participation autochtone comprenait une participation directe aux travaux sur le terrain, le compte rendu à la communauté pourrait aussi inclure les points de vue des participants.

Les rapports sur les évaluations archéologiques comprennent habituellement des termes techniques, des expressions appartenant au jargon professionnel et des acronymes. Vous devriez préparer un sommaire du rapport en langage clair pour que l’information soit accessible aux communautés autochtones qui n’ont pas de spécialiste en archéologie.

3.5 Rapport sur la participation autochtone à l’intention du ministère

Lorsque les travaux archéologiques sur le terrain comprenaient un processus de participation des communautés autochtones, vous devez inclure des renseignements sur le processus de participation dans la trousse de rapport de projet (voir Normes et directives à l’intention des archéologues-conseils, section 7.6.2). Les renseignements consignés devraient décrire et justifier les éléments suivants :

  • qui a participé
  • les procédures de participation (par exemple, protocole de communication, ententes de partage des données entre vous et la communauté)
  • les dates et les stades où le processus de participation a eu lieu
  • les stratégies pour intégrer la contribution de la communauté aux travaux sur le terrain (par exemple, examen du rapport avec la communauté, surveillance autochtone)
  • le processus pour rendre compte des résultats à la communauté (par exemple, exposés oraux, documents en langage clair)

Dans certains cas, vous pourriez solliciter la participation d’une communauté autochtone qui a déjà exprimé ses préférences relatives à la participation au processus archéologique ou son niveau d’intérêt pour certaines catégories de projet ou certains types de sites, soit au moyen d’un protocole avec votre association ou d’un avis direct à votre cabinet (par exemple, une communauté autochtone pourrait avoir déjà exprimé son manque d’intérêt à participer à l’égard des dispersions lithiques de l’Archaïque). Si vous modifiez votre approche en matière de participation à la lumière de préférences exprimées antérieurement par une communauté, vous devriez le mentionner dans votre rapport au ministère et adapter la documentation requise à la section 7.6.2 des normes et directives en fonction de ce fait.

Les rapports de projet archéologique soumis au ministère du Industries du patrimoine, du sport, du tourisme et de la culture sont accessibles au public par l’intermédiaire du Registre public ontarien des rapports sur les sites archéologiques. Le Registre public ontarien des rapports sur les sites archéologiques est administré par l’Unité des programmes d'archéologie du ministère du Industries du patrimoine, du sport, du tourisme et de la culture et on peut le consulter en communiquant avec le coordonnateur des données archéologiques au Archaeology@Ontario.ca.

Lorsque des communautés autochtones ont participé au processus des travaux sur le terrain, évitez d’inclure toute information que la communauté autochtone considère comme étant de nature confidentielle ou délicate (par exemple, des données portant sur les lieux de sépulture, les lieux secrets ou sacrés, les renseignements personnels) dans le rapport qui sera déposé dans le registre des rapports qui est accessible au public (section 7.3.1 des Normes et directives à l’intention des archéologues-conseils). Les renseignements de nature confidentielle ou délicate devraient être fournis séparément, soit dans la lettre de présentation soit dans les documents complémentaires, afin qu’ils ne soient pas versés au registre.

Veuillez cependant noter que les renseignements de nature confidentielle ou délicate figurant dans n’importe quel document complémentaire fourni au ministère seront assujettis aux dispositions de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP) prévoyant que toute personne a un droit d’accès à presque tous les documents détenus par le gouvernement. Bien que les renseignements de nature confidentielle ou délicate soient protégés par les dispositions de cette loi, il importe que vous vous entendiez avec la communauté autochtone pour déterminer quelle information il convient de transmettre au ministère.