Le CECM a pour mandat de permettre d’échanger rapidement l’information parmi ses membres aussitôt après les collisions mortelles afin de mieux connaître les facteurs explicatifs de ces collisions. Son rôle consiste aussi à faire des recommandations, le cas échéant, pour renforcer les campagnes d’application des lois, les campagnes de sensibilisation du public et les infrastructures routières afin de prévenir d’autres décès. Nous décrivons ci-après le périmètre des pouvoirs dans chacun de ces domaines.

Dans le domaine de l’application des lois, les recommandations visent essentiellement à renforcer l’application des règles du Code de la route en faisant appel à des méthodes traditionnelles ou automatisées. L’objectif consiste à amener les conducteurs à respecter les lois pour réduire le risque d’accident en décourageant les comportements risqués comme les excès de vitesse, la conduite avec facultés affaiblies et les distractions au volant. Le SPO est chargé de réaliser les initiatives traditionnelles d’application des lois recommandées par le CECM, alors que la Ville d’Ottawa doit mettre en œuvre des dispositifs automatisés d’application des lois.

Dans le domaine de l’information, les recommandations visent à encourager les usagers de la route à faire des choix sécuritaires lorsqu’ils empruntent les infrastructures routières. L’objectif des campagnes de sensibilisation consiste à mieux voir en quoi les choix des conducteurs sur la route permettent d’améliorer la sécurité ou de créer des risques et d’avoir des incidences négatives sur les résultats des interactions avec les autres usagers de la route. On peut cibler les campagnes d’information en fonction des comportements risqués spécifiques, ou encore des lieux ou des secteurs précis du réseau routier. On peut aussi mener des campagnes plus généralisées pour joindre une population plus nombreuse d’usagers de la route afin d’améliorer les connaissances et la sensibilisation. Le SPO, Santé publique Ottawa et la Ville d’Ottawa apportent leur concours dans la mise en œuvre des recommandations de cette nature.

Les recommandations techniques s’étendent à celles qui se rapportent à la modification des infrastructures physiques de la chaussée. Il peut s’agir de changements propres à certains sites ou de modifications à apporter aux politiques pour orienter les travaux d’étude et de réalisation des infrastructures routières de l’administration responsable de l’aménagement de ces infrastructures. D’après le périmètre des travaux du CECM, la Ville d’Ottawa est responsable de la mise en œuvre des recommandations structurelles exprimées par ce comité.

Recommandations individuelles

Entre 2017 et 2020, le CECM a déposé 13 recommandations techniques et trois recommandations informationnelles inspirées de l’examen des différentes collisions. Les recommandations informationnelles comportaient une activité de sensibilisation propre à certains sites et liée à la sécurité des piétons ainsi que deux initiatives plus vastes pour la conduite avec facultés affaiblies et la sécurité des piétons. Les 13 recommandations techniques étaient propres à certains sites et constituées de l’examen ou de la mise en œuvre de la signalétique, des changements dans le réglage chronologique des feux de circulation ou des mesures temporaires de modération de la circulation. Dans trois cas, on a adopté des modifications géométriques dans le cadre des programmes existants de sécurité routière de la Ville. On a mené dans les cas nécessaires les initiatives d’application des lois pour tenir compte des facteurs explicatifs liés aux collisions.

Le niveau de détail prévu dans la synthèse actuelle des recommandations se veut très général. Nous voulons ainsi protéger la vie privée des personnes impliquées dans certaines collisions et nous assurer qu’on ne pourra pas identifier les personnes impliquées dans les collisions qui ont fait l’objet de cet examen.

Recommandations fondées sur les données cumulatives

D’après l’examen des données cumulatives des constats du CECM et la revue des constats issus de cette analyse de 84 collisions mortelles à Ottawa, nous déposons les recommandations suivantes pour analyse et étude.

Recommandations destinées à la Ville d’Ottawa

  • Élaborer une stratégie globale pour réduire la vitesse sur les routes d’Ottawa. La vitesse est un facteur important dans les collisions mortelles : un peu moins de la moitié (45 %) des conducteurs qui roulaient trop vite selon ce qu’on a constaté dépassaient la limite de vitesse. Fait inquiétant, les deux tiers des conducteurs qui roulaient trop vite le faisaient à au moins 20 km/h de plus que la limite de vitesse; un peu plus du tiers dépassaient cette limite d’au moins 40 km/h.

    La Ville fixe traditionnellement les limites de vitesse d’après les vitesses opérationnelles, plutôt que selon les vitesses qui ont pour effet de minorer le potentiel de blessures mortelles ou graves en fonction de l’ensemble des véhicules, des usagers de la route et des infrastructures de protection présentes. La mise à jour de la Politique de la Ville sur les zones de limitation de vitesse pour qu’elle cadre mieux avec les principes de l’approche des systèmes sécuritaires permettra de définir les attentes liées à la vitesse.

    Certaines mesures théoriques ont été et sont actuellement mises en œuvre sur certaines routes afin de réduire la vitesse dans les secteurs urbains et résidentiels. Ces mesures consistent entre autres à faire appel à différents dispositifs de modération de la circulation. Il serait préférable de promouvoir et de mettre en œuvre le recours plus massif au contrôle automatisé de la vitesse dans les cas où les excès de vitesse sont généralisés. Cette technologie est un outil plus efficace et économique pour appuyer les stratégies traditionnelles d’application des lois.

    Enfin, les initiatives menées pour mieux faire connaître aux usagers de la route d’Ottawa les risques liés à la vitesse permettent aux conducteurs de faire des choix plus sécuritaires et de transformer la culture de la sécurité routière. Voici les faits que les usagers de la route doivent essentiellement connaître : la moindre augmentation de la vitesse multiplie les risques; l’accélération augmente la distance dans laquelle on peut s’arrêter et réduit le temps de réaction; les usagers du transport actif sont moins susceptibles de survivre à l’impact des véhicules qui roulent à plus de 40 km/h.

  • Mener un examen approfondi des collisions impliquant des usagers de la route de 55 ans et plus. Cette cohorte d’âge, qu’il s’agisse des conducteurs de véhicules automobiles ou des usagers du transport actif, est surreprésentée dans les collisions mortelles et dans les collisions déclarables. Il faut procéder à une analyse plus détaillée des collisions impliquant ce groupe pour mieux connaître les facteurs explicatifs de ces décès. En travaillant en collaboration avec les partenaires clés qui connaissent les sources de données nationales, les principaux risques et les mesures de prévention se rapportant aux usagers de la route plus âgés, on pourra guider la sélection des contre-mesures confirmées pour réduire les risques parmi les conducteurs et les usagers des transports actifs lorsqu’ils prennent de l’âge.

Recommandations destinées au Service de police d’Ottawa

  • Le SPO devrait continuer de cibler les mesures d’application des lois dans les périodes de pointe pour les accidents afin de permettre d’endiguer les risques courus relativement aux collisions. Les collisions mortelles étaient plus prévalentes au printemps, en été et en septembre. Ces périodes de l’année sont généralement associées à la clarté, à des routes sèches, aux longues fins de semaine, aux voyages des vacanciers et à l’accélération de la vitesse dans les déplacements. Il s’agit aussi des périodes dans lesquelles les étudiants reçoivent leur diplôme ou rentrent à l’école. La météo plus clémente et les heures de clarté plus longues sont elles aussi propices aux modes de transport actif comme les déplacements à pied et à vélo. S’agissant des collisions causées par les excès de vitesse dans les secteurs de moindre densité et les secteurs ruraux, il faut augmenter les ressources consacrées à l’application des lois et déployer des efforts ciblés pendant les mois au cours desquels il se produit plus de décès à cause de la vitesse.

    Les collisions étaient aussi plus répandues les fins de semaine et pendant les périodes de pointe de l’avant-midi, du milieu de l’après-midi et le soir, qui donnent généralement lieu à des niveaux supérieurs de congestion de la circulation. En règle générale, les caractéristiques de ces collisions nous apprennent que les distractions et la fatigue au volant, de même que les excès de vitesse, sont plus souvent des facteurs explicatifs et que les usagers du transport actif risquent plus de subir des blessures. Ainsi, en priorisant l’application des lois dans ces comportements risqués et en menant des campagnes de sensibilisation, on pourra réduire la prévalence de ces conditions.

Recommandations destinées au Service de police d’Ottawa et à la Ville d’Ottawa

  • Le Service de police d’Ottawa et Sécurité des routes Ottawa devraient travailler en collaboration pour accroître les efforts d’application des lois et d’information à propos des risques associés à la conduite sous l’effet de l’alcool et malgré des facultés affaiblies. La conduite avec facultés affaiblies était un facteur dans le tiers (33 %) des collisions mortelles survenues à Ottawa. La consommation de plusieurs substances était répandue à Ottawa, ce qui est le cas pour l’ensemble du pays. La combinaison la plus répandue de substances est constituée de l’alcool et du cannabis : la recherche nous apprend que combiner le cannabis avec des quantités d’alcool même faibles peut augmenter le risque de collision (Lyon et Robertson, 2020; ICADTS, 2022a; ICADTS 2022b). C’est pourquoi il est important, afin de lutter contre ce problème, d’accroître les efforts d’application des lois et d’information dans les mois dans lesquels les collisions causées par la conduite avec facultés affaiblies culminent. Il est essentiel de prévoir suffisamment de ressources pour pérenniser la formation des agents dans l’application des lois sur la conduite avec facultés affaiblies et pour mener des initiatives ciblées d’application des lois afin d’augmenter les moyens généraux de dissuasion, en haussant la probabilité réelle que les conducteurs soient détectés, de même que la perception que les conducteurs fautifs seront repérés.

    En outre, il est nécessaire de concerter les efforts d’information publique à propos du risque lié à la conduite avec facultés affaiblies pour mettre en lumière les effets de la combinaison de l’alcool et du cannabis sur le risque de collision.

Recommandations à l’intention du Comité d’examen des collisions mortelles et le ministère des Transports de l’Ontario (MTO)

  • Le CECM et le MTO devraient travailler en collaboration pour mener de nouvelles comparaisons de la prévalence des déclarations antérieures de culpabilité et de la suspension des permis des conducteurs impliqués dans les collisions mortelles et des conducteurs qui font partie de la population en général. Le nombre moyen de déclarations antérieures de culpabilité parmi les conducteurs impliqués dans les collisions mortelles pour lesquels on disposait de documents était de 5,3. Près d’un conducteur sur cinq (19 %) avait plus de 10 déclarations antérieures de culpabilité, et le plus grand nombre de déclarations antérieures était de 29. Le MTO devrait analyser la question et publier des données provinciales à ce sujet. L’analyse complémentaire de ce problème pourrait apporter de l’information pour savoir s’il faut imposer des pénalités plus lourdes, lancer des programmes d’amélioration de la formation des conducteurs et prendre d’autres mesures correctives pour réduire les collisions mortelles à Ottawa.

Recommandation à l’intention du ministère des Transports de l’Ontario

  • Le MTO devrait veiller à améliorer la collecte et l’analyse des données sur les décès et les collisions impliquant des vélos électriques à Ottawa et en Ontario afin de mieux connaître les risques et de cerner les mesures préventives voulues. À l’heure actuelle, les collisions impliquant des vélos électriques sont classées à tort dans la catégorie des motocyclettes ou des bicyclettes, ce qui peut s’expliquer en partie par les modifications apportées aux vélos électriques par les conducteurs après l’achat. L’examen des définitions et des stratégies de codage des vélos électriques parmi les administrations permettrait de corriger cette lacune statistique et de s’assurer que les risques pour la sécurité liés à ce mode de transport sont pris en compte et gérés en conséquence. L’amélioration des données permettrait de mieux cerner ce problème et de déterminer alors si des interventions spécifiques peuvent se révéler nécessaires pour prévenir les décès impliquant ces véhicules.