Le rôle des organismes de réglementation ne se limite pas à la surveillance. Toutefois, le rôle de la CVMO, qui consiste à veiller à ce que les participants au marché respectent les lois sur les valeurs mobilières visant à protéger les investisseurs, est essentiel pour inspirer la confiance dans les marchés financiers et attirer les investissements. Le rôle de l’application de la loi dans un organisme de réglementation moderne et efficace doit veiller à ce que les enquêtes soient menées de manière à ne pas imposer un fardeau indu aux participants au marché.

Lors de la consultation, le Groupe de travail a été informé de l’importance de faciliter l’obtention d’une indemnisation lorsque cela est justifié pour les investisseurs lésés.

Pour atteindre ces objectifs, le Groupe de travail formule un éventail de recommandations visant à moderniser l’application de la loi et à améliorer la protection des investisseurs. Des infractions nouvelles et modernes sont nécessaires pour tenir compte des réalités du marché, notamment pour empêcher que des déclarations trompeuses soient faites au sujet de sociétés ouvertes. Des outils d’enquête plus modernes sont essentiels pour faciliter les enquêtes quasi criminelles de la CVMO en donnant aux juges provinciaux le pouvoir de rendre des ordonnances de communication. Les sanctions pécuniaires maximales, qui n’ont pas été augmentées depuis 2003, empêchent l’Ontario d’emboîter le pas de ses homologues mondiaux en ce qui concerne la capacité d’imposer des amendes significatives. Les pouvoirs de recouvrement de la CVMO ne garantissent pas toujours que les mauvais joueurs condamnés remboursent leurs gains mal acquis. Le Groupe de travail propose des recommandations visant à répondre à ces préoccupations. L’élargissement de la portée et des outils réglementaires doit être équilibré de façon appropriée pour veiller à ce que les participants au marché qui participent de bonne foi au processus d’enquête aient un moyen raisonnable et transparent de soulever des questions dans le cadre des enquêtes de la CVMO.

Des améliorations sont également nécessaires pour la protection des investisseurs, notamment en désignant un organisme de règlement des différends qui aurait un pouvoir décisionnel exécutoire pour fournir aux investisseurs lésés un moyen efficace et rentable d’obtenir une indemnisation, le cas échéant.

Ces recommandations inspireraient dans l’ensemble une plus grande confiance dans les marchés financiers de l’Ontario, ce qui attirerait davantage d’investissements et stimulerait une plus forte croissance économique.

Moderniser l’application de la loi

55. Conférer à la CVMO des pouvoirs plus étendus pour geler, saisir ou protéger autrement des actifs, y compris des actifs transférés à des membres de la famille ou à des tiers à une valeur inférieure à leur juste valeur marchande

Le recouvrement des sanctions pécuniaires (sanctions administratives, redressements, coûts et paiements volontaires convenus dans le cadre d’un règlement) continue d’être difficile pour tous les organismes de réglementation, y compris la CVMO, surtout lorsque l’entreprise ou la personne sanctionnée n’est pas un participant au marché. Pour ce qui concerne les sanctions pécuniaires ordonnées au cours de l’exercice 2019-2020 par suite d’un règlement ou d’une audience de contestation, la CVMO a obtenu un taux de recouvrement moyen de 94,6 %, dont 0 % auprès des personnes qui ne participent pas au marché, qui ont été sanctionnées dans le cadre d’une audience de contestation.footnote 55 L’une des tactiques couramment employées par les personnes qui commettent des fraudes ou qui tentent d’éviter de payer les sommes dues consiste à protéger leurs actifs contre la saisie par la CVMO en les transférant de façon inappropriée à des amis ou à des membres de leur famille à un prix inférieur à leur juste valeur marchande.

Recommandation :

Pour faciliter les recouvrements, le Groupe de travail recommande ce qui suit, fondé sur les modifications apportées récemment à la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique :

1. Pouvoirs de gel renforcés de la CVMO

À l’heure actuelle, pour que la Cour supérieure fasse appliquer une ordonnance de blocage émise par la CVMO, la CVMO doit prouver que la partie intimée a obtenu les fonds ou les biens bloqués par suite d’une infraction à la Loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario.

Le Groupe de travail recommande que la CVMO soit également autorisée, sous réserve de la même autorisation et de la même surveillance par la Cour supérieure que celle qui existe actuellement pour les ordonnances de gel, à geler tous les biens, à partir de l’étape de l’enquête, en établissant que les actifs sont préservés dans le but de rembourser les investisseurs lésés ou de priver un intimé de gains mal acquis dans le cadre d’une ordonnance de redressement. Ce pouvoir étendu d’ordonnance de gel s’appliquerait où l’inconduite est intentionnelle, malhonnête ou entraîne un préjudice pour les investisseurs, y compris les infractions à l’article 25 (exercé sans inscription), à l’article 53 (placement de valeur mobilière sans accusé de réception de prospectus), à l’article 76 (délits d’initié et tuyautage) et au paragraphe 126.1(1) (fraude et manipulation du marché).

2. Pouvoir de saisir des biens transférés en deçà de leur valeur marchande

Le Groupe de travail propose également de donner à la CVMO le pouvoir de geler et de saisir les biens transférés en deçà de leur juste valeur marchande à la famille de l’intimé ou à des tiers, en utilisant les critères de maintien de la directive de gel qui existe alors, ainsi que les autres conditions décrites ci-dessus; et d’accorder à la CVMO des pouvoirs d’enquête étendus sur les transferts de biens à la famille ou à des tiers ou la réception de biens de la famille ou de tiers. Ce pouvoir couvrirait les transferts à la famille qui pourraient avoir eu lieu avant le début de l’enquête sur l’inconduite en cause, et les transferts à des tiers qui pourraient avoir eu lieu au moment où l’inconduite en cause est survenue ou après. Certains transferts à des tiers ou à des membres de la famille sous la juste valeur marchande peuvent être exclus, comme les transferts effectués à des fins légitimes de planification fiscale ou successorale?

3. Pouvoir d’aliéner des biens gelés afin d’en préserver la valeur

En outre, la CVMO aurait, sous réserve de l’obtention d’une ordonnance du tribunal, le pouvoir d’aliéner des biens gelés afin d’en préserver la valeur lorsqu’il y a un risque que l’actif ou les biens perdent de la valeur. Cela pourrait avoir lieu avant la tenue de l’audience et l’imposition d’une sanction pécuniaire éventuelle. Le rôle de la Cour serait essentiel pour faire en sorte que ce recours extraordinaire soit utilisé de manière à assurer l’équité.

4. Responsabilité conjointe et individuelle

Le Groupe de travail recommande également que la CVMO soit autorisée à demander une ordonnance judiciaire selon laquelle les tiers ou les membres de la famille qui ont reçu un avantage en deçà la valeur marchande à la suite du transfert soient conjointement et individuellement tenus responsables avec l’intimé de payer le moindre des montants suivants : a) les sommes prélevées imposés par la Commission ou ordonnés par le tribunal ou b) l’avantage reçu en deçà de la valeur marchande. Les tiers pourraient se défendre si, au moment du transfert, ils pouvaient prouver qu’ils avaient un lien de dépendance avec l’intimé.

5. Rôle du Tribunal dans le cadre de la nouvelle structure de gouvernance

Dans le cadre de la nouvelle structure de gouvernance de la CVMO, la directive de blocage ex-parte initiale et les audiences de toute demande de précision, de modification ou de révocation de la directive seraient entendues devant le tribunal de la CVMO (comme c’est actuellement le cas pour les directives de blocage de la CVMO qui sont entendues devant la Commission). La CVMO exercerait toujours ses pouvoirs de gel et de saisie à la condition qu’un tribunal prolonge la durée du gel ou de la saisie, ou rende sa propre ordonnance, après la directive initiale du tribunal.

56. Limiter l’accès aux permis de conduire et aux plaques d’immatriculation pour défaut de paiement des sommes dues ordonnées par la CVMO ou les tribunaux

Un problème en matière de recouvrement des sommes dues est que la CVMO dispose d’outils limités pour forcer le paiement de sanctions pécuniaires. En Ontario, la province pourrait limiter l’accès d’une personne à un permis de conduire ou à des plaques d’immatriculation parce qu’elle n’a pas payé les sommes dues dans certaines circonstances. Par exemple, les péages routiers impayés ou les pénalités en vertu du Code de la route, les ordonnances alimentaires impayées, ainsi que les taxes impayées ou la condamnation de certaines infractions liées à la livraison, à la distribution ou au transport non autorisés de produits du tabac.

Recommandation :

Le Groupe de travail propose que l’Ontario ne délivre pas ni ne renouvelle les permis de conduire et les plaques d’immatriculation des personnes qui n’ont pas acquitté les pénalités administratives, les redressements ou les paiements imposés par la CVMO, et les amendes, restitutions et indemnisations ordonnées par le tribunal. Comme de nombreuses personnes conduisent, cette proposition vise à encourager le paiement et à accroître le taux de perception des sanctions de la CVMO. Cette recommandation est fondée sur les modifications apportées récemment à la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique.

La mise en œuvre de cette recommandation nécessite un examen attentif des mesures sur la protection des renseignements personnels qu’il pourrait être approprié de mettre en place en ce qui concerne l’échange de renseignements et exigera une coordination entre la CVMO et le ministère des Transports, y compris l’échange de renseignements sur les noms, les adresses, les numéros de permis de conduire, les renseignements sur les véhicules, etc. Comme il s’agit d’une mesure liée aux recouvrements, l’échange de renseignements imposé serait permis en vertu de l’exemption proposée dont il est question dans la recommandation 63 ci-dessus.

57. Créer une interdiction pour dissuader et poursuivre efficacement les déclarations et tentatives de déclarations fausses ou trompeuses au sujet de sociétés ouvertes

Des déclarations non corroborées ont parfois été faites publiquement en vue d’obtenir un gain financier et de l’information fausse ou trompeuse est introduite sur les marchés dans le but d’influer intentionnellement ou inconsidérément sur le cours des actions des sociétés ouvertes et d’influencer les décisions d’investissement des investisseurs. Les stratagèmes « vendre à découvert et dénigrer » qui profitent de la chute des cours des actions, tandis que les stratagèmes « pomper et liquider » qui profitent à l’opposé de la hausse du gonflement du cours des actions.

L’avènement de la technologie ces dernières années, notamment l’utilisation des médias sociaux, a changé la nature et les tactiques de ces stratagèmes. En plus d’avoir accès à un public beaucoup plus vaste, les campagnes peuvent être soutenues par de nombreuses déclarations trompeuses ou fausses faites sur une période prolongée. La Colombie-Britannique a récemment adopté une loi en vue de combattre ces stratagèmes abusifs. De nombreux commentateurs ont indiqué qu’ils appuyaient cette recommandation.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande d’interdire dorénavant de faire des déclarations fausses ou trompeuses au sujet de sociétés ouvertes. Cette nouvelle règle faciliterait la tâche de la CVMO pour dissuader et combattre les pratiques abusives visant à influer sur le prix des actions ou à infléchir les décisions des investisseurs, comme les stratagèmes « vendre à découvert et dénigrer » et « pomper et liquider ». L’interdiction viserait également les tentatives de faire des déclarations fausses ou trompeuses au sujet de sociétés ouvertes afin de contrer les pratiques abusives qui sont flagrantes, même si elles ne sont pas fructueuses.

L’interdiction permettrait à la CVMO de prendre des mesures d’application de la loi ciblant toute personne ou entité qui fait une ou plusieurs déclarations au sujet d’une société ouverte, lorsque ces déclarations sont connues comme étant (ou qu’il y a un mépris flagrant quant à savoir si ces déclarations sont) trompeuses ou fausses et lorsque ces déclarations, prises individuellement ou ensemble, devraient avoir une incidence sur le cours ou la valeur marchande des titres de la société publique ou des dérivés fondés sur ces titres, ou d’influencer la prise de décision d’un investisseur raisonnable à l’égard de ces titres ou produits dérivés.

Pour appliquer l’interdiction, la CVMO n’aurait pas à prouver que l’énoncé ou les énoncés ont faussé le marché (c.-à-d. qu’il n’y aurait pas d’exigence du lien de causalité). L’intention d’influer sur le marché ou d’influencer la prise de décision d’un investisseur raisonnable serait suffisante. Cette interdiction ne vise pas les analystes qui fournissent fréquemment des points de vue écoutés sur les valeurs mobilières des émetteurs assujettis et qui peuvent omettre des faits sans l’intention de tromper. Il ne vise pas non plus à empêcher la diffusion légitime d’information publique par des analystes ou des vendeurs à découvert réputés. Le Groupe de travail reconnaît en effet que les commentaires des vendeurs à découvert réputés peuvent avoir une incidence sur la correction des titres d’un émetteur public.

58. Augmenter la valeur maximale des sanctions administratives pécuniaires à 5 millions de dollars et augmenter l’amende maximale pour des infractions à 10 millions de dollars

Après avoir tenu une audience, la CVMO peut, entre autres sanctions pécuniaires, y compris un redressement et une ordonnance de paiement des dépens, ordonner à une personne ou à une entreprise qui a enfreint les lois sur les valeurs mobilières de l’Ontario de verser une pénalité administrative maximale d’un million de dollars pour chaque défaut de se conformer. Ce montant n’a pas été augmenté depuis 2003.

Une sanction d’un million de dollars ne suffirait pas à dissuader certaines sociétés inscrites ou d’autres très grosses entités, car ce montant pourrait, dans certains cas, constituer un coût d’exploitation acceptable pour de telles entreprises.

Après avoir tenu un procès, en plus de l’emprisonnement et des amendes, les tribunaux de juridiction provinciale peuvent ordonner à une personne ou à une entreprise qui a contrevenu aux lois sur les valeurs mobilières de l’Ontario de payer une amende maximale de 5 millions de dollars pour des infractions quasi criminelles. Cette amende n’a pas été augmentée depuis 2003.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande de faire passer la pénalité administrative maximale à 5 millions de dollars afin d’ajuster la sanction en vue de moderniser les lois sur les valeurs mobilières à l’inflation et à l’envergure des entreprises de l’Ontario, de la mettre en phase avec les sanctions imposées par les organismes d’autoréglementation (OAR) pour des infractions semblables et de dissuader plus efficacement les conduites abusives des grandes entreprises et les inconduites plus flagrantes.

Les sanctions administratives pécuniaires et certaines autres sommes perçues par la CVMO, énoncées dans la Loi sur les valeurs mobilières, pourraient être attribuées à des tiers ou utilisées par la CVMO à certaines fins précises.

Le Groupe de travail recommande que la CVMO collabore avec le ministère des Finances pour examiner la possibilité d’élargir l’utilisation de ces « fonds désignés » afin d’appuyer la réglementation des marchés financiers de la CVMO conformément à son mandat.

Le Groupe de travail recommande également d’augmenter à 10 millions de dollars l’amende maximale pour les infractions quasi criminelles. Ainsi, l’amende maximale se rapprocherait de l’amende quasi criminelle maximale proposée dans l’avant-projet de la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux, soit 25 millions de dollars, qui est conforme à la sanction pénale maximale de 25 millions de dollars américains semblable aux États-Unis en vertu de la Securities Exchange Act de 1934. Au Royaume-Uni, il n’y a pas de limite monétaire, tandis que la sanction pénale pécuniaire maximale en Australie est de 11,1 millions de dollars australiens.

59. Moderniser les outils d’enquête en habilitant le tribunal provincial à émettre des ordonnances de production sur les marchés de capitaux

Pour mieux protéger les investisseurs, les équipes d’enquêtes quasi criminelles de la CVMO ont besoin d’outils modernes pour obtenir les documents et les données nécessaires pour lutter contre la criminalité en col blanc et les infractions à la Loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario.

À l’heure actuelle, les autorisations de perquisition judiciaire (c.-à-d. les mandats de perquisition) sont l’un des rares outils dont disposent les enquêteurs chargés de l’application de la loi pour traduire en justice les auteurs d’infractions graves sur les marchés financiers devant les tribunaux criminels. Toutefois, les dispositions relatives aux perquisitions judiciaires dont disposent les enquêteurs de la CVMO n’envisagent pas le recours à la technologie moderne pour conserver les preuves.

La criminalité financière moderne a évolué au-delà de la portée du pouvoir de délivrance de mandats de perquisition créé par la Loi sur les infractions provinciales, qui date de l’époque de la tenue de dossiers sur papier. Le pouvoir de délivrance de mandats de perquisition de la Loi sur les infractions provinciales ne confère qu’un pouvoir de recherche de « choses » telles que des documents papier et des objets. Par conséquent, pour rechercher des données dans les systèmes informatiques, il est nécessaire que les enquêteurs prennent des moyens intrusifs, perturbateurs et souvent peu pratiques de pénétrer dans les locaux et de fouiller les ordinateurs sur place ou de saisir les machines elles-mêmes. Une ordonnance de communication oblige le détenteur du dossier à rassembler ou à préparer les documents, même s’ils sont conservés hors site sur support papier ou électronique, et à les fournir aux enquêteurs, dans un certain délai fixé par le tribunal, s’il y a lieu (généralement 30 jours, mais ce délai peut être prolongé par le tribunal, le cas échéant).

Le personnel d’application de la loi de la CVMO a besoin d’outils d’enquête efficaces à l’ère numérique moderne. Les ordonnances de production sont beaucoup moins intrusives que les mandats de perquisition pour la poursuite des activités des marchés financiers, car elles n’obligent pas les enquêteurs à pénétrer dans les locaux ou à saisir des équipements essentiels, et elles prévoient un calendrier raisonnable pour se conformer à la directive du tribunal de produire des preuves. Le recours aux technologies modernes telles que les téléphones cellulaires, les services bancaires électroniques, les applications de messagerie instantanée, etc., est désormais courant, et les données de cette technologie sont la principale source de preuve dans toute enquête quasi criminelle menée en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières. La Colombie-Britannique a récemment adopté une loi qui aidera à relever ces défis en matière d’enquêtes.

De nombreux commentateurs étaient favorables à la modernisation des outils d’enquête de la CVMO dans la mesure où elle était nécessaire. Dans son rapport de consultation, le Groupe de travail avait proposé un autre outil d’enquête qui aurait donné à la CVMO des pouvoirs de contrainte accrus en vertu de l’article 13 de la Loi sur les valeurs mobilières. En réponse à la rétroaction des commentateurs, le Groupe de travail ne recommande pas la mise en œuvre de cette autre proposition pour le moment.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande que les juges ou les juges d’un tribunal de juridiction provinciale aient le pouvoir d’émettre des ordonnances de production afin d’obliger les entreprises et les personnes qui ne font pas l’objet d’une enquête et qui ont la possession ou le contrôle des renseignements ou des données pertinentes, à rassembler ou à préparer les documents, les dossiers ou les données électroniques applicables pour les remettre à un enquêteur autorisé. Cette recommandation est fondée sur des dispositions semblables du Code criminel du Canada et sur modifications récemment adoptées en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique.

Les ordonnances de communication judiciaire sont nécessaires parce que les pouvoirs actuels d’autorisation de perquisition sont de moins en moins adaptés à l’obtention de preuves de transactions électroniques, de messages électroniques et de communications cellulaires qui sont la technologie clé utilisée dans la criminalité financière moderne.

Le recours aux ordonnances de communication dans les enquêtes quasi criminelles est nécessaire pour moderniser les outils d’enquête, étant donné que les renseignements ne sont plus consignés principalement sur papier dans certains bureaux. Le fait d’avoir des pouvoirs d’ordonnance de communication dans le contexte des valeurs mobilières permettrait d’harmoniser les outils d’enquête quasi criminels à la disposition des enquêteurs chargés de l’application de la loi avec ceux utilisés dans les enquêtes menées en vertu du Code criminel. Les ordonnances de communication (comme les mandats de perquisition) doivent être approuvées par une autorité judiciaire et ne peuvent pas l’être par le tribunal de la CVMO. Une personne ou une entreprise à qui une ordonnance de communication a été signifiée (c.-à-d. une personne ou une entreprise qui ne fait pas l’objet d’une enquête par la CVMO) est légalement tenue de produire un document requis. Toute information produite au moyen de cette ordonnance de communication ne peut être utilisée contre la personne qui a produit les documents, à moins qu’elle ait falsifié des documents, qu’elle ait menti ou induit en erreur la CVMO au moment de produire les documents.

60. Modifier les lois pour permettre des dispositions de substitution et des dispositions plus larges en matière de signification à personne et retirer l’exemption de perquisition pour les résidences privées afin qu’elles puissent être fouillées pendant la journée avec un mandat

En vertu de l’article 163 du règlement découlant de la Loi sur les valeurs mobilières, les sommations délivrées en vertu de l’article 13 de la Loi sur les valeurs mobilières doivent être signifiées à personne. Toutefois, la signification à personne à elle seule est une exigence désuète qui ne tient pas compte des solutions de rechange acceptables, particulièrement lorsqu’une personne tente de se soustraire à la signification ou lorsque, dans le cas d’un service électronique, une preuve de réception peut être présentée. La pandémie de COVID‑19 en cours a également mis en évidence la nécessité de trouver des solutions de rechange raisonnables à l’exigence dépassée de la seule signification à personne. À titre d’exemple, les entreprises de serveurs de traitement ont cessé leurs activités commerciales en personne en raison des restrictions liées à la pandémie. Entraînant ainsi des complications et des retards dans la capacité de la CVMO à signifier et à faire respecter officiellement les assignations et à protéger l’intégrité des marchés financiers.

En outre, la CVMO n’a pas le pouvoir, en vertu du paragraphe 13(4) de la Loi sur les valeurs mobilières, de demander à un juge de la Cour de justice de l’Ontario une ordonnance autorisant la perquisition d’une résidence privée (le paragraphe 13(9) de la Loi sur les valeurs mobilières exclut expressément le pouvoir de fouiller une résidence privée).

Recommandation :

Afin de moderniser l’application de la CVMO, le Groupe de travail recommande des changements aux dispositions de signification à personne et à la fouille des résidences privées.

1. Permettre les dispositions de substitution et les dispositions plus larges en matière de signification à personne

Afin d’accroître la souplesse de la signification des assignations, le Groupe de travail recommande des modifications à la loi afin d’abroger l’obligation de signification à personne et de permettre plutôt la signification des assignations :

  • par remise en mains propres ou par voie électronique (avec l’exigence que la remise électronique ne constitue une signification légale que si elle est confirmée par le destinataire ou si d’autres preuves de réception peuvent être apportées);
  • en laissant la signification à comparaître à la dernière résidence ou à la résidence habituelle de la personne concernée, avec un occupant âgé d’au moins 16 ans;
  • en autorisant la CVMO à rendre une ordonnance de signification de substitution si l’intéressé se soustrait à la signification ou si sa dernière adresse ou son adresse habituelle est introuvable ou inoccupée.
  • par livraison dans le lieu d’affaires;
  • par service de messagerie ou par courrier recommandé.

Des mesures de protection comme un affidavit de signification et des exigences particulières relatives à la transmission et à l’acceptation des courriels devraient être envisagées dans le cadre des modifications législatives. Ces mesures donneraient au personnel d’application de la loi de la CVMO une plus grande souplesse pour effectuer la signification aux particuliers. Une telle modernisation des lois sur les valeurs mobilières permettrait de les harmoniser avec l’article 26 de la Loi sur les infractions provinciales, les Règles de procédure et formulaires de la CVMO pour les audiences de la Commission et les nouvelles dispositions en Colombie-Britannique.

2. Autoriser les ordonnances de perquisition de résidences privées avec mandat

Le Groupe de travail recommande de permettre qu’une ordonnance de perquisition soit émise par un juge de la Cour de justice de l’Ontario pour la fouille d’une résidence privée pendant la journée, notamment entre 6 h et 21 h. Une ordonnance de perquisition pourrait être émise par un juge de la Cour de justice de l’Ontario s’il est convaincu, d’après une dénonciation écrite faite sous serment, qu’il y a des motifs raisonnables de croire que :

  • le lieu ou la maison d’habitation est un lieu visé par l’ordonnance autorisant une perquisition;
  • l’entrée dans le lieu ou la maison d’habitation est nécessaire aux fins d’enquête en vertu de la législation sur les valeurs mobilières.

Cela donnerait plus de souplesse à la Direction générale de l’application de la loi de la CVMO pour demander des ordonnances de perquisition de résidence privée, ce qui est déjà permis dans d’autres administrations canadiennes, notamment en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador. Cela serait également conforme à l’approche adoptée dans le cadre de l’avant-projet de loi proposé en vertu du RCMRC.

61. Codifier certaines exigences de la CVMO relatives aux normes de livraison des données pour assurer la conservation de la preuve et traiter les demandes de privilège

À l’heure actuelle, il n’existe pas d’approche normalisée quant à la façon dont les intimés doivent livrer les documents à la CVMO, y compris les documents ou les données électroniques. Le personnel d’application de la loi de la CVMO reçoit de plus en plus de productions à grand volume de données dans différents formats électroniques, ce qui a exacerbé le problème. En raison de l’absence d’une approche normalisée, les destinataires d’une assignation à comparaître, souvent des entreprises, doivent investir beaucoup de temps, de ressources et d’argent afin d’assurer une livraison appropriée des documents à la CVMO.

Recommandation :

Comme il a été mentionné précédemment, le Groupe de travail appuie le fait que le personnel d’application de la loi de la CVMO publie les Directives sur les normes de livraison de documents qui décriraient de quelle manière et dans quel format les destinataires d’une assignation à comparaître doivent livrer les documents à la CVMO. Le Groupe de travail recommande deux modifications législatives corollaires qui amélioreraient l’efficacité de ces directives.

1. Assurer la conservation de la preuve

Le Groupe de travail recommande une disposition législative expresse qui permette au personnel d’application de la loi de la CVMO d’exiger que les destinataires d’une assignation à comparaître conservent les éléments de preuve. Bien que le Groupe de travail comprenne que le personnel d’application de la loi de la CVMO demande ou ordonne régulièrement aux destinataires d’une assignation à comparaître de protéger les documents et les dossiers en leur possession ou sous leur contrôle, ces demandes et ces requêtes ne seraient pas elles-mêmes exécutoires.

Un solide outil de réglementation, visant à s’assurer que les éléments de preuve ne sont pas (par inadvertance ou volontairement) détruits ou modifiés et permettant de prendre des mesures réglementaires s’ils sont détruits ou modifiés en raison d’une exigence de préservation, viendrait soutenir l’orientation proposée et l’intégrité des enquêtes de la Direction générale de l’application de la loi de la CVMO. Cette recommandation permettrait d’harmoniser les outils d’application de la loi de la CVMO avec ceux de l’Alberta ainsi que ceux qui sont envisagés dans l’avant-projet de loi du Régime coopératif en matière de réglementation des marchés des capitaux (RCMRC).

2. Traiter les demandes de privilège

Le Groupe de travail recommande que les dispositions habilitantes de la législation sur les valeurs mobilières soient modifiées afin de donner à la CVMO le pouvoir d’établir de futures règles, au besoin, sur le processus de traitement des demandes de privilège dans les poursuites et les enquêtes ainsi que de résoudre les contestations de telles allégations. Ces règles proposées seraient assujetties au processus habituel de commentaires publics et d’approbation ministérielle et garantiraient que les processus et les procédures s’harmonisent, par exemple, avec les exigences actuelles (et futures) de la common law ou des lignes directrices du Barreau de l’Ontario sur le traitement du privilège. Les enquêtes plus vastes ou plus complexes exigent souvent d’importantes productions documentaires de la part des destinataires d’une assignation à comparaître, et des demandes de privilège en découlent.

Sans cette modification habilitante, la CVMO serait limitée dans sa capacité de régler ces problèmes, si nécessaire. Des attentes claires en ce qui concerne les questions de privilège peuvent permettre de réaliser des gains d’efficacité en ce qui concerne les enquêtes et de fournir clarté et cohérence aux destinataires d’assignation à comparaître sans porter atteinte au privilège de quelque façon que ce soit. Une règle de la CVMO pourrait tenir compte de considérations pratiques qui prévoient une progression raisonnable d’une enquête, limitant ainsi les retards injustifiés, tout en respectant le droit de chaque partie à faire des demandes de privilège dûment fondées.

62. Prévoir qu’une fois qu’un acte répréhensible a été constaté, tout montant dû à la CVMO constitue un privilège qu’elle peut enregistrer sur l’ensemble des biens des personnes nommées dans l’ordonnance de la CVMO

À l’heure actuelle, en vertu de la législation existante sur les valeurs mobilières, la CVMO n’est considérée que comme un créancier judiciaire non garanti et, par conséquent, elle se classe au-dessous des autres créanciers garantis et ses dettes n’ont aucun statut prioritaire. Tout montant prélevé par la CVMO serait utilisé pour offrir un recours aux investisseurs lésés.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande une modification visant à ajouter une disposition selon laquelle la CVMO peut enregistrer un privilège pour tout montant qui lui est dû, ce qui constituerait un droit sur l’ensemble des biens des personnes nommées dans une ordonnance, y compris sur les biens entre les mains d’un séquestre ou d’un fiduciaire. L’ajout d’une telle disposition donnerait à la CVMO la priorité sur toutes les réclamations autres que les intérêts des garanties enregistrées et certaines réclamations légales.

Cette modification permettrait à la CVMO d’être en meilleure position pour imposer des sanctions pécuniaires et faire respecter ses ordonnances, renforçant ainsi la protection des investisseurs. Toutefois, la CVMO devrait avoir la possibilité de renoncer à son droit ou à son privilège, particulièrement lorsqu’un bien est détenu par un séquestre au profit des investisseurs.

63. Autoriser les ententes de suspension de la prescription pour permettre à la CVMO et aux intimés de convenir mutuellement de prolonger le délai de prescription pour entamer des procédures et étendre le délai de prescription pour les mesures relatives aux recouvrements

Une entente d’interruption de la prescription est une entente écrite, signée par les deux parties dans le cadre d’une procédure judiciaire, qui suspend le délai de prescription pendant une période de temps convenue. Le délai de prescription étant suspendu, les parties peuvent disposer du temps nécessaire pour répondre aux demandes de documents, négocier et régler les différends. Toutefois, à l’heure actuelle, la CVMO perd sa compétence d’entamer une procédure lorsque le délai de prescription de six ans prévu par la Loi sur les valeurs mobilières arrive à échéance.

Un problème en matière de recouvrement des sanctions pécuniaires peut être de déterminer les actifs en temps opportun. Cela est particulièrement difficile lorsque les intimés s’efforcent de dissimuler des actifs ou tentent de les protéger pour éviter le paiement de sommes ordonnées à la suite d’une poursuite (par exemple, les transferts à des membres de la famille en deçà de la valeur marchande auraient pu se produire avant le début de l’inconduite en cause dans l’enquête). II peut également s’écouler laps de temps important entre l’acte répréhensible, l’enquête, l’audience et les appels, et les mesures de recouvrement prises. La CVMO pourrait être confrontée à des contestations judiciaires quant à sa capacité de prendre des mesures relatives au recouvrement en fonction du temps écoulé. Cette situation à une incidence négative sur la capacité de la CVMO de recouvrer des sanctions pécuniaires et créer des échappatoires potentielles pour les intimés afin d’éviter de payer les sommes dues.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande de permettre à la CVMO et aux intimés de convenir mutuellement de prolonger le délai de prescription pour entamer les procédures. Cette modification préserverait le droit de la CVMO d’intenter des poursuites tout en permettant aux intimés d’avoir plus de temps pour communiquer avec le personnel d’application de la loi de la CVMO et explorer la possibilité d’un règlement.

De plus, le Groupe de travail recommande que le délai de prescription pour les mesures relatives au recouvrement soit étendu et clarifié de façon qu’il commence à la date de l’ordonnance de sanction. Dans le cas des recouvrements de biens immeubles, le délai de prescription continuerait d’être régi par la Loi sur la prescription des actions relatives aux biens immeubles (qui prévoit un délai de prescription de dix ans) à partir de la date à laquelle une ordonnance de sanction est imposée. Dans le cas des recouvrements liés à une somme d’argent et les biens personnels, le délai de prescription serait de dix ans à compter de la date à laquelle une ordonnance de sanction est imposée. Le recouvrement de sanctions pécuniaires est important tant du point de vue de la dissuasion que de la protection des investisseurs.

Le Groupe de travail reconnaît le laps de temps écoulé aux processus d’enquête et de litige, en plus des enjeux liés à la dissimulation intentionnelle de biens. Tous ces facteurs peuvent retarder les efforts de recouvrement des sommes dues dans le cadre des ordonnances de la CVMO. Il est important que les contestations judiciaires fondées sur des délais de prescription ne soient pas un moyen viable d’éviter ces obligations pécuniaires. Les commentaires appuyaient les mesures visant à tenir les intimés responsables de leurs actes. Cette recommandation aiderait la CVMO à intenter des poursuites civiles, comme des poursuites de transfert frauduleux.

De plus, pour simplifier l’échange d’information afin de faciliter les recouvrements, le Groupe de travail recommande de modifier les exigences en matière de confidentialité des lois sur les valeurs mobilières afin d’éviter les demandes inutiles d’échange de renseignements imposés (renseignements qui ont été exigés de la cible d’une enquête et qui ont été ultérieurement sanctionnés) pour toutes les questions liées aux recouvrements. La CVMO pourrait ainsi participer à des programmes facilitant le recouvrement, comme sa participation actuelle au programme de compensation de l’ARC.

64. Renforcer les outils d’enquête en habilitant la CVMO à obtenir des ordonnances pour bloquer ou supprimer des sites Web et des sites de médias sociaux

Internet et les médias sociaux changent rapidement la façon dont les produits financiers sont commercialisés et distribués. Bien que l’utilisation d’Internet ait engendré de nouvelles possibilités de distribution nationale et transfrontalière pour les produits financiers, elle a aussi entraîné une augmentation rapide des arnaques en ligne, qui risquent de nuire aux investisseurs ontariens. Certains sites Web et sites de médias sociaux diffusent de l’information pour inciter les investisseurs à investir dans des manœuvres frauduleuses. Les pouvoirs d’application de la loi traditionnels, dont la conception remonte à une époque antérieure à l’apparition d’Internet et des médias sociaux, limitent la capacité de la CVMO de bloquer ou de supprimer rapidement et efficacement les sites Web ou les publications sur les médias sociaux qui sont soupçonnés d’enfreindre la loi ontarienne sur les valeurs mobilières et de nuire aux investisseurs de l’Ontario. Dans certains cas, les outils actuels, comme les avertissements et les alertes aux investisseurs émis par la CVMO, ne rejoindront pas nécessairement le public cible et pourraient ne pas être efficaces pour prévenir les préjudices aux investisseurs.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande de donner à la CVMO des outils supplémentaires pour freiner les personnes ou les entités qui semblent enfreindre la Loi sur les valeurs mobilières, notamment en se livrant à des activités potentiellement frauduleuses en ligne. Plus précisément, à l’instar du processus actuel pour les ordonnances de gel, le Groupe de travail recommande une modification législative donnant au tribunal de la CVMO le pouvoir d’ordonner à une personne ou à une entreprise de supprimer ou de bloquer un site Web ou son contenu lorsqu’il y a des preuves de violation ou de non-respect de la loi sur les valeurs mobilières, ou d’une infraction à cette loi. Ces ordonnances devraient être poursuivies par la Cour supérieure de justice sur avis aux parties concernées. Une personne ou une entreprise visée par ces ordonnances aurait droit à une audience devant le tribunal de la CVMO pour demander une précision, une modification ou une révocation de ces ordonnances.

Le Groupe de travail estime que cette modification permettrait à la CVMO d’intervenir plus rapidement et plus efficacement afin d’éviter les préjudices pour les investisseurs de l’Ontario. Les ordonnances finalement imposées par le tribunal devraient aider les fournisseurs de sites Web et de sites de médias sociaux à démanteler ces sites problématiques tout en atténuant leur responsabilité potentielle.

65. Confirmer que les personnes ou les entreprises qui se conforment à une assignation à comparaître ne contreviendront à aucun contrat auquel elles sont parties et que le respect d’une assignation à comparaître de la CVMO ne constituera pas un fondement de responsabilité contractuelle à leur égard de la part de tierces parties

Les intervenants ont récemment fait valoir la nécessité d’une modification législative afin de préciser qu’un destinataire d’une assignation à comparaître peut se conformer à une assignation de la CVMO sans enfreindre une « entente de non-divulgation » contractuelle ou un autre engagement contractuel auquel il est assujetti. Cette modification serait conforme à la common law, selon laquelle un contrat qui prétend empêcher quelqu’un de se conformer à une obligation légale est nul. Elle confirmerait également les objectifs d’application de la loi propres à une assignation à comparaître ainsi que sa priorité sur les engagements contractuels privés qui pourraient autrement entraîner des risques juridiques pour les destinataires d’une assignation à comparaître s’ils se conforment à une assignation de la CVMO.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande de clarifier l’étendue de la protection accordée aux personnes qui se conforment à une assignation à comparaître. Plus précisément, le respect d’une assignation à comparaître de la CVMO ne constituerait pas un fondement de responsabilité contractuelle à leur égard de la part de tierces parties, y compris pour toute violation de contrat découlant de la conformité.

Cette disposition devrait profiter autant aux particuliers qu’aux entreprises qui font l’objet d’une assignation à comparaître, en leur donnant l’assurance qu’ils peuvent fournir librement des renseignements à la CVMO dans le cadre d’une enquête sans craindre d’enfreindre une entente contractuelle avec un tiers ou de s’exposer eux-mêmes à une potentielle responsabilité contractuelle pour s’être conformés à une assignation à comparaître. Cette modification devrait être tout aussi avantageuse pour la CVMO, car la certitude entourant cette disposition permettrait aux enquêtes de la CVMO de progresser plus efficacement sans que les destinataires des assignations à comparaître aient à tenir compte ou à traiter de potentielles obligations ou responsabilités contractuelles.

66. Créer des interdictions pour poursuivre efficacement ceux qui facilitent les infractions à la loi ontarienne sur les valeurs mobilières

Lorsque des personnes ou des entreprises sont autorisées à aider ou à assister d’autres personnes dans la violation de la loi ontarienne sur les valeurs mobilières, en toute impunité, cela nuit à la confiance dans les marchés financiers et à la protection des investisseurs. Par exemple, une personne qui s’est volontairement fermé les yeux en vendant des valeurs mobilières frauduleuses ou qui a fourni un soutien administratif à une entreprise de vente sous pression partage une part de responsabilité dans la perpétration de ces infractions.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande une modification législative conforme au libellé de l’avant-projet de loi proposé en vertu du RCRMRC et aux récentes modifications apportées à la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique, qui comprennent des interdictions en ce qui concerne le fait d’aider, d’être complice, de conseiller ou de conspirer en vue contrevenir à la loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario. Ces interdictions permettraient de poursuivre une personne qui conseille ou aide d’une autre manière une autre personne ou entreprise à contrevenir à la loi ontarienne sur les valeurs mobilières.

Ces interdictions harmoniseraient et moderniseraient les outils d’application de la loi de la CVMO et permettraient au personnel d’application de la loi de la CVMO de poursuivre un plus grand nombre d’inconduites concernant la loi sur les valeurs mobilières afin d’accroître la protection des investisseurs et d’inspirer confiance dans les marchés financiers de l’Ontario.

67. Créer une interdiction de poursuivre efficacement des opérations en avance sur le marché

Les règles de conduite du marché et la loi sur les valeurs mobilières de l’Ontario interdisent les pratiques abusives qui ont une incidence sur les marchés financiers, notamment la fraude, la manipulation du marché et les délits d’initiés (qui, dans ce dernier cas, reposent sur une relation spéciale avec un émetteur). Les RUIM de l’OCRCVM traitent des opérations en avance sur le marché effectuées par des courtiers membres de l’OCRCVM.

Toutefois, ces règles ne sont pas assez larges et ne traitent pas directement de la pratique des opérations en avance sur le marché dans les cas où une personne ou une entreprise, autre qu’un courtier de l’OCRCVM, utilise à mauvais escient des renseignements qu’elle détient en raison de sa relation avec un client ou un investisseur avec lequel elle a par ailleurs un lien (un investisseur lié).

L’interdiction des opérations en avance sur le marché renforcerait encore plus la confiance envers l’intégrité des marchés financiers et réduirait le risque de préjudice pour les clients, les investisseurs liés, les autres participants au marché et les marchés financiers dans leur ensemble. Les opérations en avance sur le marché comprennent deux éléments. Le premier consiste à avoir connaissance d’une ordonnance d’un client ou d’un investisseur lié qui, si elle était rendue publique, aurait une incidence sur le prix du marché, au détriment de ce client ou de cet investisseur lié. Le deuxième consiste à agir en fonction de cette connaissance autrement que dans l’intérêt du client ou de l’investisseur lié par l’ordonnance.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande une modification législative conforme au libellé de l’avant-projet de loi proposé en vertu du RCRMRC et des RUIM de l’OCRCVM (ainsi que d’autres législations canadiennes sur les valeurs mobilières), qui comprend des interdictions concernant les opérations en avance sur le marché (et les défenses connexes). Ces interdictions permettraient de poursuivre une personne ou une entreprise qui achète ou échange des valeurs mobilières ou des produits dérivés avant son client ou un investisseur lié en sachant que l’exécution, le placement ou la divulgation de l’achat ou de l’échange envisagés par le client ou l’investisseur lié pourrait vraisemblablement avoir une incidence sur le prix du marché de la valeur mobilière ou du produit dérivé.

Cette interdiction harmoniserait et moderniserait les outils d’application de la loi de la CVMO et permettrait au personnel d’application de la loi de la CVMO de poursuivre un plus grand nombre d’inconduites concernant la loi sur les valeurs mobilières afin d’accroître la protection des investisseurs et d’inspirer confiance dans les marchés financiers de l’Ontario.

68. Droits accrus pour les personnes ou entreprises directement visées par une enquête ou un examen de la CVMO et assurance de la proportionnalité des réponses aux enquêtes de la CVMO

Les intervenants ont informé le Groupe de travail qu’il n’y a pas de processus clair pour régler les désaccords découlant des enquêtes et des examens de la CVMO et que les personnes ou les entreprises visées par une assignation à comparaître de la CVMO bénéficieraient d’une plus grande transparence sur l’ensemble du processus d’enquête. De plus, les intervenants ont indiqué qu’il est important que certaines limites s’appliquent aux réponses qui sont faites aux demandes de renseignements présentées au cours des enquêtes et des examens de la CVMO, étant donné le fardeau potentiel imposé par une enquête de la CVMO.

Plusieurs commentateurs ont appuyé ces propositions, y compris une modification qui permettrait aux personnes ou aux entreprises directement touchées par une enquête ou une assignation à comparaître de demander des précisions à la Commission.

Toutefois, d’autres commentateurs ont souligné que ces propositions pourraient avoir une incidence négative sur l’efficacité et l’intégrité des enquêtes, ainsi que sur la capacité de la Direction de l’application de la loi de la CVMO de prendre des mesures d’application de la loi en temps opportun et d’échanger des renseignements avec d’autres organismes de réglementation des valeurs mobilières.

Le Groupe de travail a formulé les recommandations suivantes dans le but de trouver un équilibre entre les préoccupations concernant la nécessité de ne pas compromettre ou retarder indûment les enquêtes en cours et confidentielles sur l’application de la loi, et la nécessité de prévoir des processus supplémentaires pour permettre aux parties concernées de soulever des questions légitimes sur la portée et l’étendue d’une enquête en cours. À cet égard, le Groupe de travail encourage la CVMO à évaluer régulièrement l’efficacité et la véracité de ces mesures supplémentaires.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande que la transparence et l’accroissement des droits des personnes ou des entreprises directement touchées par une enquête de la CVMO soient réalisés principalement par la publication de directives préparées par le personnel d’application de la loi de la CVMO en collaboration avec certaines parties prenantes (qui a commencé en mai 2019), sur le processus (c.-à-d. « Directives pour les enquêtes d’application de la loi » et « Directives sur les normes de livraison des documents »).

L’objectif des Directives pour les enquêtes d’application de la loi est d’assurer une plus grande transparence en ce qui concerne le processus d’enquête et l’uniformité de l’approche. Les Directives pour les enquêtes d’application de la loi donneraient un aperçu des pratiques du personnel d’application de la loi de la CVMO pendant une enquête et traiteraient des mesures visant à faciliter la coopération et l’efficacité des enquêtes, notamment :

  • aviser les personnes et les entreprises qui ont fait l’objet d’une enquête lorsque celle-ci est terminée et qu’aucune mesure supplémentaire ne sera prise;
  • faciliter un examen en fournissant certains documents à l’avance aux personnes auxquelles une assignation à comparaître a été signifiée, le cas échéant;
  • communiquer avec les destinataires d’une assignation à comparaître ou leur avocat avant d’envoyer l’assignation à comparaître afin de discuter de délais réalistes, de préoccupations en matière de production et d’examiner les options de production pour les demandes volumineuses, complexes ou nouvelles;
  • fournir un préavis aux intimés avant le début d’une instance publique en les invitant à répondre aux allégations que la CVMO entend faire.

Ces directives rendraient les pratiques d’enquête de la CVMO plus transparentes, codifieraient les pratiques exemplaires et donneraient lieu à des communications plus claires et plus rapides entre la CVMO et les participants au marché sur les questions d’application de la loi.

En ce qui concerne le personnel d’application de la loi de la CVMO qui communique avec les destinataires d’une assignation à comparaître avant de délivrer l’assignation, les résultats de ces discussions peuvent comprendre la fourniture d’un sous-ensemble de documents, l’acceptation de productions en continu, l’établissement d’un ordre de priorité pour les documents, envisager un format de production différent, repousser la date limite de production et explorer la possibilité de créer un plan de production de documents pour les demandes de production complexes ou nouvelles.

Fait important, les Directives pour les enquêtes d’application de la loi comprendraient également un cadre pour la transmission des questions liées aux assignations au premier dirigeant de la CVMO dans le cadre de la nouvelle structure (le président dans la structure actuelle), lorsque ces questions ne peuvent être résolues autrement au sein de la Direction générale de l’application de la loi de la CVMO. Le Groupe de travail appuie le chef de la direction de la CVMO dans le cadre de la nouvelle structure (le président en vertu de la structure actuelle) exigeant que la Direction de l’application de la loi de la CVMO publie des directives supplémentaires au besoin pour assurer la transparence concernant l’utilisation de ce processus de recours hiérarchique et l’expérience connexe.

De plus, à la suite de la création du nouveau tribunal d’arbitrage distinct (voir la recommandation 4 ci-dessus), le Groupe de travail recommande que le ministère des Finances, la CVMO et le comité consultatif sur le contentieux des valeurs mobilières de la CVMO déterminent s’il y a lieu de mettre en place un mécanisme permettant aux parties de transmettre des questions liées aux assignations au-delà du chef de la direction et au nouveau tribunal d’arbitrage distinct. Ce processus pourrait être semblable à une conférence de gestion de cas en instance ou se dérouler au moyen d’une demande de conseils et d’orientation. Si un tel mécanisme de recours hiérarchique est mis en œuvre, le Groupe de travail recommande que le processus soit assujetti à des dépenses et à des délais serrés afin de réduire au minimum la possible utilisation abusive du processus et les retards concomitants dans les enquêtes.

De plus, le Groupe de travail appuie également la CVMO dans l’élaboration de« Directives sur les normes de livraison des documents » afin de codifier les pratiques exemplaires, y compris la façon et les formats de production des documents (bien que les décisions finales en matière de production incomberaient toujours au destinataire de l’assignation à comparaître). Ces directives reconnaîtraient que plusieurs défis peuvent justifier un examen nuancé des demandes de production (en particulier ceux qui concernent le calendrier, les coûts et la complexité), et intégreraient donc la flexibilité nécessaire pour adapter l’approche à la production de documents.

La CVMO fournit actuellement un avis d’exécution (qui énonce les renseignements pertinents sur les contraventions que la CVMO a l’intention d’alléguer et le fondement de ces allégations) avant la publication de l’exposé des allégations et de l’avis d’audience. (qui, ensemble, engagent des procédures publiques). Le Groupe de travail recommande que cet avis d’exécution de la loi soit envoyé au moins trois semaines avant le début des instances publiques et que les procédures relatives aux avis d’exécution (qui seront énoncées dans les Directives pour les enquêtes d’application de la loi) incluent une invitation aux intimés à répondre aux allégations que la CVMO a l’intention de faire (comme c’est le cas actuellement). À la réception d’un avis d’exécution, un intimé pourrait fournir des précisions atténuantes qui n’auraient pas été découvertes au cours de l’enquête de la CVMO ou pourrait vouloir entamer des discussions de règlement.

69. Élargir les exceptions de confidentialité en vigueur en matière de divulgation d’une ordonnance d’enquête ou d’examen ou d’une assignation à comparaître

À l’heure actuelle, conformément à la Loi sur les valeurs mobilières, une personne ou une entreprise est tenue de ne pas divulguer la nature ou le contenu d’une enquête, d’une ordonnance d’examen ou l’information relative à une assignation à comparaître, sauf si la divulgation est faite :

  • aux conseillers de la personne ou de l’entreprise;
  • à l’assureur ou au courtier d’assurance de la personne ou de l’entreprise après avoir satisfait aux critères énoncés dans la Loi sur les valeurs mobilières.

Certaines parties prenantes ont indiqué que des exemptions supplémentaires en matière de divulgation devraient être autorisées afin de réduire le fardeau réglementaire et le temps consacré au dépôt d’une demande officielle et à la participation au processus d’audience lorsque l’on demande une autorisation de divulgation. La majorité des commentateurs ont indiqué qu’ils appuyaient cette recommandation et plusieurs ont indiqué qu’il devrait y avoir un mécanisme pour limiter la divulgation dans des circonstances appropriées.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande d’ajouter dans les lois sur les valeurs mobilières des exceptions au principe de confidentialité afin de permettre la divulgation dans plus de circonstances. Cela devrait se faire en préservant l’équilibre approprié entre le fait de ne pas intervenir dans les enquêtes de la CVMO et le fait de permettre la notification ou la participation précoce de toutes les parties concernées par une enquête.

Le Groupe de travail recommande d’ajouter des exceptions aux lois sur les valeurs mobilières afin de permettre la divulgation d’une ordonnance d’enquête ou d’une assignation à comparaître signifiée par la CVMO à un organisme de réglementation financière prudentielle, comme le Bureau du surintendant des institutions financières et aux organismes de réglementation équivalents, ainsi qu’à une liste étendue de conseillers comprenant des conseillers pour l’employeur de la personne, lorsque cela faciliterait la réponse aux demandes d’enquête et aux assignations à comparaître.

Dans le cadre de la nouvelle structure de gouvernance de la CVMO, le Groupe de travail recommande également que le chef de la direction ou son délégué ait le pouvoir de prendre des décisions pour permettre la divulgation dans les cas où une exception ne s’applique pas, puisque la plupart de ces décisions sont de nature courante. Cela permettrait au personnel de la CVMO de prendre des décisions efficaces, le cas échéant, permettant la divulgation au moyen d’un processus simplifié amélioré, y compris un processus accéléré pour modifier les ordonnances d’enquête ou les assignations afin de permettre une telle divulgation. Le personnel de la CVMO pourrait ainsi autoriser la divulgation, par exemple, lorsque celle-ci est nécessaire pour se conformer aux demandes de la CVMO ou pour assurer une saine gouvernance d’entreprise, comme la divulgation aux agents de la gouvernance et de la conformité internes d’une entreprise, au conseil d’administration ou au conseil d’administration ou à la haute direction de l’entreprise lorsque cette divulgation ne compromettrait pas l’enquête.

70. Préciser qu’il est interdit d’exiger la production de documents privilégiés

En common law, les intimés ont toujours le droit de refuser de ne pas produire des documents protégés et la Cour suprême du Canada a fait de cette question un droit quasi constitutionnel. Dans la pratique, la CVMO ne recueille pas de renseignements privilégiés. Néanmoins, certaines parties prenantes ont fait remarquer qu’il est nécessaire d’apporter des précisions supplémentaires indiquant que les documents protégés ne doivent en aucun cas être exigés au cours des enquêtes et des examens de la CVMO.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande une modification législative conforme au libellé de l’avant-projet de loi proposé dans la Loi sur la stabilité des marchés des capitaux qui précise que rien dans cette loi ne doit être interprété comme ayant une incidence sur le privilège existant entre un avocat et son client en ce qui concerne les renseignements ou les dossiers qui sont assujettis à ce privilège. Le Groupe de travail souligne que les intimés peuvent choisir de partager volontairement des renseignements privilégiés avec la CVMO.

Lorsqu’une demande de privilège est contestée, le Groupe de travail recommande que les Directives sur les normes de livraison proposées par la CVMO définissent ses attentes en matière de production d’un registre des privilèges lorsqu’une allégation de privilège est faite. La date, l’auteur, le destinataire et la nature du document, ainsi que le fondement précis de la demande de privilège, pourraient figurer dans ce registre.

Améliorer la protection des investisseurs

71. Permettre à la CVMO d’être en mesure de désigner un organisme de services de règlement des différends (SRD) qui aurait le pouvoir de rendre des décisions exécutoires

À l’heure actuelle, les entreprises inscrites en Ontario sont tenues de prendre des mesures raisonnables pour veiller à ce que l’Ombudsman des services bancaires et d’investissement (OSBI) puisse servir de SRD auprès de leurs clients. Après avoir enquêté sur une plainte d’un investisseur lésé, l’OSBI effectue les analyses nécessaires conformément à sa méthode de calcul des pertes et, le cas échéant, recommande une indemnisation.

Toutefois, comme les recommandations de l’OSBI ne sont pas contraignantes, les entreprises inscrites qui ont causé du tort aux petits investisseurs refusent parfois de suivre les recommandations de l’OSBI ou offrent des règlements qui sont inférieurs aux recommandations. En outre, les investisseurs lésés pourraient être amenés à accepter des règlements moindres en raison de la probabilité qu’ils ne reçoivent rien si les recommandations de l’OSBI sont ignorées. Dans ces circonstances, la seule solution de rechange pour les investisseurs lésés consiste à recourir aux tribunaux, ce qui n’est pas toujours possible compte tenu des frais juridiques en cause et du temps qu’il faut pour obtenir réparation.

Selon le rapport annuel 2019 du Comité mixte des organismes de réglementation de l’OSBI, les clients ont reçu environ 1,04 million de dollars de moins que ce que l’OSBI a recommandé en 2018 et 2019; sur les 316 cas qui se sont terminés avec une compensation monétaire, 23 cas (environ 7 %), concernant 15 entreprises, ont été réglés en deçà des recommandations de l’OSBI.

Dans le Programme canadien d’évaluation du secteur financier : Note technique – Surveillance des intermédiaires du marché des valeurs mobilières et des produits dérivés (2019), le Fonds monétaire international a indiqué que le fait d’accorder un pouvoir exécutoire à l’OSBI permettrait d’améliorer la protection des investisseurs. Plusieurs pays offrent déjà un cadre de recours pour les investisseurs sous la forme d’un mécanisme d’ombudsman exécutoire, notamment au Royaume-Uni et en Australie. D’autres pays, comme les États-Unis, prévoient l’arbitrage comme mécanisme de recours pour les investisseurs.

Le plafond d’indemnisation recommandé par l’OSBI, qui est actuellement de 350 000 $, n’a pas été augmenté depuis la création de l’OSBI en 1996.

Dans le cadre des consultations publiques du Groupe de travail, les intervenants ont manifesté leur appui à des mécanismes efficaces de règlement des différends qui permettent aux investisseurs d’obtenir des résultats favorables, équitables et rentables. Si l’OSBI avait le pouvoir de rendre des décisions exécutoires, les besoins exprimés par les intervenants devraient être pris en compte : améliorer la responsabilisation, élaborer un processus d’appel interne efficace et renforcer la capacité de l’OSBI de traiter des questions complexes liées aux marchés financiers.

Recommandation :

La démocratisation de l’accès aux capitaux constitue l’une des pierres angulaires des marchés de capitaux sains, tout en permettant de protéger les petits investisseurs. Établir un cadre de SRD contraignant, fiable et efficace en Ontario représenterait une amélioration notable du cadre de protection des petits investisseurs.

1. Donner à la CVMO le pouvoir de désigner un SRD doté de pouvoirs décisionnels exécutoires

Le Groupe de travail recommande la création d’une autorisation législative qui permettrait à la CVMO de désigner un SRD ayant le pouvoir de rendre des décisions exécutoires et qui autoriserait la CVMO à établir le cadre qui régirait le SRD. Ce cadre offrirait un recours aux investisseurs lésés, en particulier aux petits investisseurs qui ont été lésés, mais dont les pertes sont trop faibles pour envisager des poursuites, augmenterait la confiance des investisseurs dans les marchés financiers en garantissant que ceux-ci soient indemnisés, lorsque cela est justifié, pour les pertes financières subies par suite des transactions ou activités inappropriées du conseil d’une entreprise inscrite.

Le cadre exigerait également que le SRD se dote de processus pour assurer l’équité procédurale aux entreprises inscrites ainsi qu’aux investisseurs et qu’il prévoie un droit d’appel devant le tribunal de la CVMO. Pour veiller à ce que le cadre ne devienne indûment trop lourd, le Groupe de travail recommande qu’un appel d’une décision du SRD soit autorisé dans certaines circonstances seulement, comme lorsqu’il y a une question de droit, ou lorsque le SRD n’a pas agi conformément à ses politiques et procédures, à son mandat ou aux modalités imposées dans le cadre du régime de surveillance (voir ci-dessous). Les parties à un appel d’une décision du SRD seraient l’appelant et le SRD.

2. Choisir la meilleure approche pour le SRD de l’Ontario

L’Ontario doit disposer d’un cadre exécutoire fiable et efficace pour le règlement des différends, qui soit accessible aux petits investisseurs et accepté par les personnes ou compagnies inscrites. Pour ce faire, la CVMO devrait choisir l’une des deux options suivantes conformément à l’autorisation législative accordée à la CVMO :

  • créer un nouveau SRD, c’est-à-dire un système qui serait conçu en Ontario et aurait le pouvoir de rendre des décisions exécutoires;
  • améliorer l’OSBI par l’imposition d’exigences visant à renforcer davantage la structure de gouvernance de l’OSBI, la transparence publique et le professionnalisme, comme condition pour obtenir le pouvoir de rendre des décisions exécutoires.

Le Groupe de travail recommande que la CVMO reçoive le mandat de présenter au ministre, dans les six mois suivant la publication du présent rapport, un plan pour réaliser l’une de ces deux options, dans le but de mettre en place toute mesure de gouvernance améliorée requise d’ici le 1er janvier 2022, et pour désigner le pouvoir exécutoire à accorder par la suite.

Quelle que soit l’option choisie, la CVMO s’efforcerait de mettre en œuvre un régime complet de surveillance du SRD. Entre autres composantes, le régime de surveillance comprendrait notamment :

  • un pouvoir de veto sur la nomination des administrateurs et de l’ombudsman;
  • une obligation à obtenir l’approbation de toute modification importante aux règlements administratifs, au mandat, aux frais, ou aux politiques et aux procédures du SRD qui pourrait avoir des répercussions sur l’équité procédurale pour les entreprises inscrites ou les investisseurs.

Il est également essentiel que le SRD dispose de l’expertise et de la crédibilité appropriées auprès de tous les intervenants concernés. Par exemple, pour renforcer davantage l’expertise et la crédibilité du SRD désigné quant aux questions relatives au marché dispensé, la désignation du SRD serait conditionnelle au fait que le SRD :

  • dispose d’une méthode de calcul des pertes adaptée aux cas de marché dispensé;
  • embauche des enquêteurs possédant une expérience en matière de marché dispensé;
  • travaille avec la ou les association(s) industrielle(s) concernée(s) à l’élaboration d’un programme de formation sur les questions relatives au marché dispensé à l’intention de ses enquêteurs;
  • ajoute une représentation du marché dispensé sur son conseil, compte tenu de la composition globale et de la taille du conseil.
3. Limites des ordonnances d’indemnisation du SRD

Quelle que soit l’option retenue pour établir un SRD en Ontario, le Groupe de travail recommande que le plafond pour les ordonnances d’indemnisation du SRD désigné soit de 500 000 $ initialement, avec des augmentations subséquentes tous les deux ans en fonction du coût de la vie.

72. Exiger, dans les cas où il y a suffisamment de preuves pour établir que les investisseurs ont subi des pertes financières directes, que les montants perçus par la CVMO en vertu d’ordonnances de redressement soient distribués aux investisseurs lésés au moyen d’un processus supervisé par les tribunaux

Un processus législatif permettant la distribution des fonds récupérés aux investisseurs lésés est essentiel pour la protection des investisseurs en Ontario. Il est important que les gains mal acquis récupérés grâce aux efforts de recouvrement de la CVMO soient redistribués aux investisseurs qui ont subi un préjudice, car il est possible que les investisseurs ne puissent recouvrer indépendamment ces sommes auprès de l’intimé. Récemment, bien qu’elle ne soit pas tenue de le faire en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, la CVMO a eu recours à un séquestre nommé par la Cour supérieure pour distribuer des fonds remis à la CVMO dans deux causes. Ces causes ont permis à la CVMO de bénéficier de l’expertise d’un séquestre dans le cadre d’un processus supervisé par les tribunaux afin de remettre plus de 6 millions de dollars à des investisseurs qui avaient été lésés par l’inconduite des intimés.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande d’exiger que les montants perçus par la CVMO dans le cadre d’ordonnances de redressement soient distribués aux investisseurs lésés au moyen d’un processus supervisé par les tribunaux, si les preuves sont suffisantes pour établir que les investisseurs ont subi des pertes financières directes.

1. Description du processus

Le processus serait supervisé par un séquestre nommé par la Cour supérieure dans le cas où des fonds importants sont disponibles pour distribution. Si les investisseurs sont peu nombreux et que les sommes mises en cause sont moindres, la Cour supérieure pourrait nommer un employé de la CVMO pour agir à titre d’administrateur. Il y aurait une exigence de publication afin que l’information relative aux distributions potentielles soit communiquée au public.

Ce modèle s’appliquerait uniquement aux montants prélevés par la CVMO. Il ne prévoit pas la distribution des pénalités administratives et des paiements volontaires aux investisseurs. Ces pénalités et paiements continueraient d’être attribués à des tiers ou utilisés à d’autres fins autorisées par la législation sur les valeurs mobilières.

Lors de la mise en œuvre de cette recommandation, la CVMO devrait établir des critères permettant de déterminer le moment où la désignation d’un séquestre serait requise ainsi que la façon de communiquer au public l’information relative aux distributions potentielles. Il sera important de veiller à ce que le processus de mise sous séquestre soit utilisé dans des circonstances où il est efficace d’y avoir recours (p. ex., pas pour des montants trop faibles ou si la preuve est insuffisante).

2. Simplifier l’échange de renseignements

Le Groupe de travail recommande de modifier les exigences en matière de confidentialité dans la législation sur les valeurs mobilières afin d’éviter les demandes inutiles d’échange de renseignements imposés (renseignements qui ont été exigés au cours d’une enquête) pour les renseignements qui sont nécessaires à la simplification du remboursement des investisseurs lésés. Cela permettrait à la CVMO d’échanger des renseignements avec le séquestre, comme des listes d’investisseurs, afin de permettre un processus de notification et de traitement des demandes plus efficace. Ce service vise à simplifier l’échange d’information afin de faciliter le retour de l’argent aux investisseurs lésés.

73. Rendre automatiquement réciproques les ordonnances de sanction, les interdictions d’opérations sur valeurs et les règlements provenant d’autres organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières et accorder à la CVMO un pouvoir simplifié de rendre des ordonnances de réciprocité en réponse aux décisions d’un tribunal pénal, d’un organisme de réglementation étranger, d’un OAR et des ordres de bourse

La plupart des administrations canadiennes, à l’exception de l’Ontario, disposent de régimes en vertu desquels les ordonnances de sanction ou les ententes de règlement d’un autre organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières s’appliquent automatiquement dans la province ou le territoire local plutôt qu’elles fassent l’objet d’une audience pour la réciprocité de l’ordonnance (réciprocité automatique). Le temps et les ressources consacrés à la « réciprocité » des ordonnances et des ententes des autres autorités canadiennes sont perçus comme un gaspillage de ressources qui entraîne des coûts supplémentaires inutiles pour la CVMO.

De même, des dispositions de réciprocité simplifiée ont été adoptées dans la plupart des administrations canadiennes autres que l’Ontario afin de permettre aux organismes de réglementation des valeurs mobilières, dans les limites de leur pouvoir discrétionnaire et sans tenir d’audience, de réciproquer des ordonnances rendues par les tribunaux, les organismes de réglementation étrangers, les OAR et les bourses (réciprocité simplifiée).

Dans le cadre des consultations publiques, le Groupe de travail a appris que cette proposition avait reçu un large appui de la part des commentateurs parce qu’elle vise une approche unifiée, simplifiée et uniforme de l’application des ordonnances et des règlements dans l’ensemble du pays et qu’elle améliore la protection des investisseurs.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande de prévoir à la fois la réciprocité automatique et la réciprocité simplifiée pour contribuer à garantir que les intimés qui ont été sanctionnés dans d’autres administrations soient tenus à l’écart des marchés financiers de l’Ontario plus rapidement et plus efficacement qu’ils ne le sont actuellement.

1. Réciprocité automatique

La recommandation de rendre automatiquement réciproques les ordonnances de sanction découlant des audiences de contestation et des règlements d’autres organismes canadiens de réglementation des marchés financiers signifie que ces ordonnances s’appliqueraient en Ontario comme si elles avaient été prises par la CVMO, sans que la CVMO doive émettre une ordonnance distincte. Le Groupe de travail ne recommande pas de faire la distinction entre les ordonnances découlant de violations des lois sur les valeurs mobilières de l’Ontario et les comportements contraires à l’intérêt public. Les ordonnances réciproques pourraient, entre autres choses, imposer des restrictions ou la suspension de l’inscription, ou encore restreindre la capacité d’occuper le poste de dirigeant ou d’administrateur d’un émetteur. Les interdictions d’opérations sur valeurs d’autres organismes canadiens de réglementation des marchés financiers seraient également automatiquement réciproques.

2. Réciprocité simplifiée

En ce qui concerne les ordonnances rendues par les tribunaux concernant les marchés financiers, les organismes de réglementation des marchés financiers étrangers, les OAR et les bourses, le tribunal de la CVMO dans la nouvelle structure (ou la Commission dans la structure actuelle) serait en mesure de les rendre réciproques dans le cadre d’un mode simplifié et de son pouvoir discrétionnaire, sans que les intimés soient entendus. Lorsqu’il envisagerait de rendre une telle ordonnance en vue de la réciprocité d’une décision rendue à l’extérieur du Canada, le tribunal de la CVMO dans la nouvelle structure (ou la Commission dans la structure actuelle) procéderait à une évaluation au moment de rendre une ordonnance simplifiée et, si les circonstances le justifient, accorderait à un intimé la possibilité de se faire entendre.

3. Généralités

Cette recommandation repose sur l’idée qu’une audience équitable a déjà été accordée, ce qui rend inutile l’audience de la CVMO ou la possibilité d’être entendu. Les ordonnances ou règlements réciproques n’auraient pas d’effet automatique en Ontario à moins que la CVMO ne puisse rendre une ordonnance ou un règlement semblable. Les sanctions pécuniaires et les paiements volontaires convenus dans le cadre d’un règlement ne seraient pas soumis au principe de réciprocité. Si une ordonnance ayant automatiquement fait l’objet de la règle de réciprocité est renversée, annulée, révoquée ou autrement considérée comme étant sans effet dans la juridiction canadienne d’origine, cette ordonnance cessera de s’appliquer en Ontario.

Cette modification éliminerait la nécessité pour les entreprises ou les personnes sanctionnées dans un autre territoire de compétence de participer à une audience supplémentaire en Ontario qui impose régulièrement les mêmes sanctions ou des sanctions semblables.

4. Préserver les droits des participants au marché

Dans le cadre des changements recommandés à la réciprocité, le Groupe de travail recommande également de mettre en œuvre les exigences suivantes pour aider à préserver les droits des participants au marché. La CVMO devrait :

  • publier toutes les ordonnances rendues réciproques par la CVMO;
  • fournir un droit de clarification (au lieu d’un droit d’appel) devant le tribunal de la CVMO (dans la nouvelle structure, ou à la Commission dans la structure actuelle) pour les ordonnances ayant automatiquement fait l’objet de la règle de réciprocité.

74. Exemption explicite de l’accès à l’information pour les renseignements dont la divulgation permettrait d’identifier un dénonciateur

En 2016, la CVMO a mis en œuvre un programme de dénonciation afin d’encourager les particuliers à signaler d’éventuelles infractions à la loi ontarienne sur les valeurs mobilières. Dans le cadre du programme, des centaines de signalements ont été effectués, permettant ainsi à la CVMO de traiter plus rapidement les cas d’inconduite grave et de mieux protéger les investisseurs.

La protection de l’identité des dénonciateurs est essentielle pour encourager les signalements à la CVMO. À l’heure actuelle, les renseignements qui permettraient d’identifier un dénonciateur peuvent être protégés en vertu des exemptions prévues dans la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (LAIPVP), mais ce n’est pas garanti. De plus, les protections existantes qui peuvent être offertes en vertu de la LAIPVP pourraient ne pas être évidentes pour un dénonciateur potentiel.

Recommandation :

Le Groupe de travail recommande une modification législative pour offrir une protection explicite contre la divulgation de renseignements faisant l’objet d’une demande d’accès à l’information qui permettrait d’identifier un dénonciateur. Cette disposition législative permettrait d’améliorer la protection des investisseurs en assurant la pleine efficacité du programme de dénonciation de la CVMO, car les dénonciateurs auraient la certitude que leur identité en tant que dénonciateur ne sera pas divulguée à la suite d’une demande en vertu de la LAIPVP. Cette recommandation est fondée sur des modifications législatives semblables récemment adoptées en Alberta. Elle est également conforme à la protection accordée en vertu de la loi fédérale américaine aux dénonciateurs qui font des divulgations à la Securities and Exchange Commission.


Notes en bas de page