Autres aspects

J’ai traité de questions structurelles plus larges concernant le modèle de prestation et certaines des modalités de la structure et du fonctionnement du nouvel organisme de réglementation, des fournisseurs de la garantie et de l’arbitrage indépendant, et comment les besoins en éducation des consommateurs pourraient être satisfaits. Le mandat de cet examen portait sur les aspects suivants : pertinence d’étendre le pouvoir  de surveillance d’Ombudsman Ontario, conformité avec la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée, divulgation de l’information sur les indemnisations,  politiques sur les données libres. J’ai recommandé qu’un nouvel organisme d’application soit mis sur pied, avec des pouvoirs et des responsabilités, et fasse l’objet d’une surveillance gouvernementale, comme c’est le cas pour les organismes d’application similaires. Par conséquent, les décisions concernant les quatre points ci-dessus devraient cadrer avec l’approche adoptée de façon générale dans les organismes d’application. Du côté de la garantie, puisque j’ai recommandé une approche à fournisseurs multiples qui devrait inclure des compagnies d’assurance du secteur privé, les décisions sur ces questions seront mieux prises en charge par l’autorité de réglementation des services financiers.

Je vais maintenant traiter d’autres questions soulevées lors des consultations. Elles m’apparaissent importantes et valent d’être commentées individuellement.

Couverture et durée de la garantie, et autres protections

Contenu de la garantie

Je ne formule pas de recommandations particulières sur la couverture en vertu de la garantie, ni sur sa durée, à une exception près. Devant les difficultés rencontrées par certains acheteurs de logements à la suite des problèmes financiers d’Urbancorp, je recommande un examen immédiat de la garantie des dépôts. Je vais aborder le tout en détail ci-dessous.

En ce qui concerne les détails de la couverture et de la durée de la garantie, j’ai recommandé une procédure plus inclusive et plus structurée pour l’établissement des règles. Les décisions particulières concernant la couverture en vertu de la garantie et sa durée seront mieux prises en charge dans ce contexte.

À l’heure actuelle, la Loi précise certaines dispositions de base concernant la couverture en vertu de la garantie et la garantie des dépôts. Tous les ajouts à la garantie et toutes les autres protections sont précisés dans les règlements pris en vertu de la Loi. La Loi donne à Tarion le pouvoir de formuler ces règlements. Les règlements ont été conçus de façon à prévoir une couverture supplémentaire et d’autres protections, comme la garantie des dépôts, qui iront au-delà de ce qui est prévu dans la Loi.

À titre de règle d’application générale, le contenu de cette garantie devrait être précisé dans la législation, que ce soit dans la Loi elle-même ou dans les règlements pris en vertu de la Loi. Il est nécessaire que l’envergure de la couverture de la garantie soit précisée dans la législation afin d’assurer une cohérence et une base minimale pour la couverture de garantie et les autres protections. Un nouveau mécanisme exigeant l’approbation gouvernementale des changements permettra la mise en place de la reddition de comptes nécessaire lors de changements aux règles.

La question des « vices cachés » a aussi été abordée. Les vices cachés sont des défauts qui peuvent être invisibles, camouflés ou simplement inactifs pendant une certaine période. Il peut s’agir de vices dans la conception, la construction ou les matériaux qui ne sont pas discernés rapidement, et peuvent mettre plusieurs années à être détectés ou le sont lorsqu’un problème exige un test destructif et que le problème devient apparent. Certaines personnes ont recommandé une disposition qui prolongerait la période d’effet de la garantie, qui s’étendrait du moment où une défectuosité est découverte ou l’on pourrait raisonnablement s’attendre à l’avoir découverte ‒ une clause du moment où le préjudice aurait pu être découvert. D’autres ont fait valoir que la question en est une de durée de la couverture – en quoi consiste la durée de vie prévue et à quel moment une défectuosité, si c’est le cas, va vraisemblablement se manifester. Les questions concernant les vices cachés et le moment où le préjudice aurait pu être découvert gagneraient à être prises en compte dans le cadre d’un examen détaillé de la couverture en vertu de la garantie, et de sa durée.

Garantie des dépôts

Depuis le 1er février 2003, le montant maximal de dépôt garanti par le fonds de garantie pour les habitations en propriété absolue est de 40 000 $ et de 20 000 $ pour une partie privative de condominium footnote 1. La Loi garantit les montants « correspondant au montant [que l’acheteur] a payé au vendeur à titre de dépôt qui devait être appliqué au prix d’achat aux termes du contrat au moment de la conclusion footnote 2 . » Ces montants sont inchangés depuis 13 ans. Le prix moyen provincial de tous les logements vendus en octobre 2016 a atteint la somme record de 561 896 $, en hausse de 19 % par rapport à l’année précédente footnote 3 . En comparaison, la moyenne provinciale pour les logements vendus en janvier 2007 était de moins de 300 000 $ footnote 4. À elle seule, la région du Grand Toronto a connu une augmentation de 21,1 % d’une année sur l’autre en octobre 2016, avec un prix de vente moyen, tous types de logements confondus, de 762 975 $ footnote 5. On présume que le montant de dépôt qu’un acheteur doit verser a connu une augmentation correspondante.

Dans le domaine des condominiums, les sommes versées en acompte avant la conclusion de la vente, y compris les fonds versés en supplément pour certaines améliorations, doivent être détenues en fiducie conformément à la Loi sur les condominiumsfootnote 6 . Advenant un défaut du constructeur, en l’absence de fraude ou d’autre activité criminelle, les fonds sont disponibles pour rembourser les acheteurs de logements neufs. Cette obligation de détenir les fonds en fiducie s’applique aux dépôts pour le prix d’achat initial, y compris les fonds versés pour les améliorations aux accessoires fixes comme les revêtements de comptoir. Contrairement aux dépôts versés pour l’achat d’une partie privative, les dépôts versés pour l’achat d’un logement en propriété absolue n’ont pas à être détenus en fiducie.

De même, pour les habitations en propriété absolue, les fonds payés pour les améliorations ne font pas partie des dépôts garantis. On ne m’a pas fourni d’arguments raisonnables pour le justifier. Pour l’acheteur, toute somme payée avant la conclusion de la vente constitue un dépôt dans les faits.

Je recommande qu’une évaluation de la garantie des dépôts soit réalisée immédiatement et que cette évaluation se penche sur les éléments suivants :

  • si le montant actuel des dépôts est raisonnable, compte tenu du prix croissant des logements;
  • si les montants doivent être ajustés ou établis en fonction du prix d’achat du logement;
  • si l’obligation liée à la fiducie pourrait être étendue aux habitations en propriété absolue sans que cela ait des répercussions négatives sur les plus petits constructeurs;
  • si la distinction entre les sommes versées pour des améliorations et les autres montants versés dans le cadre d’une convention achat-vente doit être retirée et que toutes les sommes payées à l’avance sont considérées comme un dépôt admissible à la garantie des dépôts.

Constructions illégales et logements construits par leur propriétaire

Constructeurs-propriétaires

À l’heure actuelle, toute personne qui construit un logement destiné à son usage personnel n’a pas, selon la Loi, à s’inscrire à la garantie des logements neufs. La personne qui construit n’a pas à s’inscrire comme constructeur et le logement n’a pas à être inscrit à la garantie de protection. Cette exemption pour le constructeur-propriétaire a toutefois entraîné des problèmes.

Même si un logement neuf peut être prévu au départ pour un usage personnel, rien ne garantit que cette situation ne va pas changer. Le logement peut être remis sur le marché au cours de la période de garantie de sept ans qui se serait appliquée si le logement n’avait pas été construit par celui qui l’habite. Il est important que les efforts soient déployés pour assurer la qualité de la construction de tous les logements. Un mécanisme d’inscription obligatoire pour tous les constructeurs pourrait être une avenue qui y contribuerait.

Il importe aussi de se pencher sur la nature obligatoire de la garantie pour tous les logements neufs, y compris ceux qui sont construits par leur propriétaire aux fins d’usage personnel. Je recommande que la garantie soit obligatoire pour tous les logements neufs, y compris ceux qui sont construits par leur propriétaire aux fins d’usage personnel.

En principe, quiconque achète un logement neuf au cours de la période où la garantie s’applique ne devrait pas être désavantagé parce que le propriétaire-constructeur n’avait pas besoin d’avoir de garantie lorsqu’il a procédé aux travaux de construction. Il s’agit quand même de logements vendus sur le libre marché au cours de la période de garantie et les consommateurs qui acquièrent de tels logements devraient pouvoir bénéficier de toutes les protections qui s’offrent à eux.

Bien que j’aie recommandé que tous les logements neufs soient couverts par une garantie, il existe divers moyens de s’assurer que la garantie soit en vigueur si le logement est vendu au cours de la période de garantie. On devrait par exemple se demander si l’inscription obligatoire des logements à la garantie doit se faire au moment de la construction ou lors de la vente, si celle-ci a lieu au cours de la période de la garantie.  

On devrait aussi se pencher sur la possibilité de mettre sur pied un registre obligatoire public des constructeurs, comme cela s’est fait en Alberta. Dans le registre de cette province, il est possible d’effectuer des recherches à partir des adresses municipales pour chaque nouveau logement construit en date du 1er février 2014footnote 7.

Constructions illégales

On m’a également beaucoup parlé des « constructions illégales ». Ce terme englobe les constructeurs non inscrits (c’est-à-dire les personnes ayant construit un logement en vue de sa revente en sachant qu’elles devaient être inscrites auprès de Tarion, mais qui ne le sont pas) et les « constructeurs déguisés » (les personnes qui construisent un logement en prétendant qu’il est destiné à leur usage personnel pour profiter de l’exemption des constructeurs-propriétaires, mais qui, dans les faits, ont l’intention de revendre le logement). Bien que la garantie soit disponible pour les logements construits par des constructeurs non inscrits qui devraient être inscrits mais ne le sont pas, la garantie n’est pas disponible pour les constructeurs qui profitent de l’exemption des constructeurs-propriétaires et qui vendent le logement par la suite. Tarion a travaillé avec les municipalités en vue de répondre de manière proactive au problème que posent les constructeurs non inscrits ou déguisés, mais le tout continue de poser problème. Dans les deux cas, si la maison est vendue ultérieurement durant la période de garantie, il appartiendra à l’acheteur d’établir s’il y a ou non une garantie.

Tarion a mis sur pied un projet pilote pour contrer certains des problèmes liés à la construction illégale. Avant que le permis de construire soit délivré, Tarion doit confirmer que le logement n’a pas obligatoirement à être inscrit au régime de garanties. Cela permet à Tarion d’établir si l’exemption d’inscription et de participation du constructeur-propriétaire s’applique avant le début de la construction du logement. Nonobstant ces efforts, je crois que l’on doit faire plus pour protéger les acheteurs de logements neufs contre la construction illégale. 

En Alberta, la législation a mis en place une règle stipulant qu’aucun permis de construire ne peut être délivré à moins que son demandeur fournisse la preuve que le nouveau logement a été inscrit et dispose de l’assurance nécessaire, ou en est autrement exemptéfootnote 8. Il pourrait être avantageux de se pencher sur la possibilité d’utiliser une approche similaire en Ontario.

Modifications aux principales définitions et à d’autres dispositions législatives

Plusieurs des changements que je recommande, s’ils sont acceptés, nécessiteront des modifications à la législation. Ce sera l’occasion de mettre à jour les principales définitions et les principaux termes qui ont posé problème au fil des ans, notamment les définitions d’un constructeur et d’un vendeur, en quoi consiste un logement aux fins de la couverture en vertu de la garantie et ce que l’on entend par « occupé auparavant ».

Définitions de constructeur et de vendeur

La Loi semble tenir pour acquis qu’il n’y aura qu’un seul constructeur et qu’un seul vendeur associés à toute construction d’un nouveau logement. Toutefois, la structure des entreprises d’aujourd’hui dans le domaine de la construction de logements neufs peut prendre la forme d’un groupe (qui porte un nom, sans être nécessairement constitué en personne morale) qui chapeaute plusieurs sociétés actives. Dans un seul projet d’ensemble résidentiel, il peut ainsi y avoir une ou plusieurs sociétés actives. Certaines d’entre elles peuvent réaliser des tâches spécialisées comme le marketing ou le service après-vente. Sans égard au nombre de sociétés participantes, une seule sera inscrite comme constructeur/vendeur en vertu de la Loi pour une maison inscrite au régime de garanties. Une société de portefeuille pourrait participer au financement du constructeur/vendeur inscrit. Dans certains cas, la société du constructeur/vendeur sera dissoute ou abandonnée une fois le projet d’ensemble résidentiel finalisé, et cela peut se produire alors que la garantie est toujours en vigueur. Pendant ce temps, le propriétaire du logement neuf n’est pas au fait des structures juridiques complexes en présence et, alors qu’il croit faire affaire avec « son » constructeur pour l’ensemble de la durée de la garantie, il traite dans les faits avec une société ou une personne complètement différente. Plus de clarté et plus de transparence sont nécessaires.

On a suggéré que les obligations au titre de la garantie soient étendues aux fournisseurs et aux sous-traitants. Certains sous-traitants ont leurs propres exigences pour l’octroi de permis et leurs propres organismes de surveillance. Imposer une obligation au titre de la garantie par l’intermédiaire d’un organisme de réglementation séparé pourrait entrer en conflit avec la fonction de ces organismes de réglementation et risquerait de compliquer sérieusement les procédures du point de vue du consommateur. Les constructeurs et les vendeurs peuvent prendre en charge les problèmes de responsabilité dans le cadre des contrats conclus avec ces sous-traitants. Il s’agit là d’ententes de nature commerciale, et non de contrats de consommation, et je ne recommande pas que les fournisseurs et les sous-traitants soient visés par le nouvel organisme de réglementation.

Définition de « logement » aux fins de la garantie

Tous les immeubles pouvant être utilisés comme habitation ne sont pas nécessairement couverts par la garantie de protection. Les maisons préfabriquées, par exemple, ne sont pas couvertes puisque le constructeur ne fournit pas tous les matériaux et n’effectue pas tous les travaux. Sont également exclues les unités d’habitation prévues aux fins « d’occupation saisonnière », comme les chalets. Pourtant, selon le lieu où elles se trouvent, ces unités d’habitation peuvent être occupées durant des périodes de temps considérables au cours d’une année. On devrait se demander si de telles exceptions ont encore leur pertinence dans le marché de l’immobilier tel qu’il est aujourd’hui.

Les logements auparavant occupés sont aussi exclus de la définition d’un logement aux fins de la couverture en vertu de la garantie. Il pourrait s’agir, par exemple, d’une maison modèle située sur un lotissement résidentiel et qui a servi de bureau. La Loi devrait préciser clairement dans quelle mesure une occupation antérieure peut faire en sorte que la garantie ne puisse s’appliquer et définir avec précision ce que l’on entend par « occupé auparavant » afin d’éviter toute incohérence dans l’application d’une telle règle.

Certains logements nouvellement construits comportent des éléments préexistants. Dans certains cas, un logement neuf va donc être considéré par Tarion comme un logement rénové et ne sera donc pas couvert par la garantie; dans d’autres cas, il sera considéré comme une construction neuve et sera couvert par la garantie. Un constructeur pourrait, par exemple, avoir démoli un logement et en avoir conservé les fondations ou l’un des murs extérieurs. Le nombre d’éléments préexistants permettant à un logement d’être couvert ou non par la garantie n’est pas clair. Cet aspect doit être clarifié. Il serait également utile de se demander si la garantie pourrait être étendue aux rénovations d’un logement et, si oui, dans quelles circonstances.  

Enjeux propres aux condominiums

La construction de condominiums a connu une croissance considérable en Ontario ces dernières années. Aujourd’hui, plus de 50 % des logements neufs construits sont des appartements en copropriétéfootnote 9.

La copropriété a entraîné l’émergence de problèmes particuliers qui ne s’appliquent pas nécessairement au contexte des logements en propriété absolue. Dans certains condominiums, par exemple, un acheteur peut occuper sa partie privative avant que les travaux aux espaces communs aient été finalisés et, de ce fait, la période où s’applique la couverture en vertu de la garantie commence dès que cette occupation est effective.

Les propriétaires d’une partie privative jouissent de l’usage exclusif de certaines parties communes ‒ c’est le cas, par exemple, des balcons. Puisqu’il s’agit de parties communes, la responsabilité d’y détecter les vices de construction n’est peut-être pas claire pour le propriétaire d’une partie privative. Le rôle de l’association condominiale dans le processus de réclamation au titre de la garantie pour des parties communes n’est pas toujours bien compris par les propriétaires de parties privatives.

Les associations condominiales doivent faire effectuer une vérification du rendement des parties communes dans l’année suivant l’enregistrement de la déclaration. Le rapport de cette vérification du rendement est remis directement à Tarion et une copie est remise à l’association condominiale. La vérification du rendement permet d’identifier les défectuosités dans les parties communes et constitue une réclamation au titre de la garantie. Une vérification en bonne et due forme exige un accès en temps opportun à tous les documents justificatifs, y compris les dessins et les plans. Des mesures doivent avoir été prises pour donner accès à ces documents.

Le contexte particulier du secteur des condominiums et les complexités qui le distinguent font en sorte qu’il soit peut-être avantageux de traiter des questions liées aux condominiums séparément dans la législation.


Notes en bas de page