Le 8 mai 2013, Rowan Stringer est entrée sur un terrain de jeu près d’Ottawa, en Ontario, pour faire ce qu’elle aimait le plus au monde : jouer au rugby.

Rowan était capitaine de l’équipe de son école. C’était une jeune athlète ayant du talent, un bel esprit de compétition et de l’enthousiasme à revendre. Cependant, durant les quelques jours précédant le match qui lui serait fatidique, elle avait souffert de maux de tête. Elle ne semblait pas se sentir bien, puisque par deux fois au cours des six jours précédents, elle avait reçu des coups à la tête en jouant au rugby.

Rowan croyait qu’elle souffrait peut-être d’une commotion cérébrale. Elle savait que quelque chose n’allait pas et s’est confiée à quelques amis proches. Toutefois, les seules personnes qui auraient été en mesure d’empêcher cette jeune athlète déterminée et dynamique de jouer au rugby ce jour-là, à savoir, ses parents, ses enseignants ou ses entraîneurs, ne savaient même pas qu’elle avait un problème.

Le 8 mai, Rowan a joué au rugby pour la troisième fois en six jours. Et pour la troisième fois en six jours, elle s’est fait plaquer et a reçu un coup à la tête. Elle est tombée et s’est assise brièvement avant de s’évanouir. On l’a transportée au Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario, où elle est décédée quatre jours plus tard, le 12 mai 2013. Rowan Stringer avait 17 ans.

Enquête du coroner

Le décès de Rowan a été provoqué par ce que l’on appelle le syndrome du second impact; il s’agit d’un grave oedème du cerveau causé par une seconde blessure survenant avant que la première n’ait eu le temps de guérir. En termes simples, comme elle souffrait d’une commotion cérébrale, mais qu’elle ne savait pas que son cerveau avait besoin de temps pour s’en remettre, elle est allée jouer et s’est fait frapper de nouveau. C’est ultime impact fut la cause de son décès. Plusieurs questions furent immédiatement posées à la suite de cette tragédie : Comment une telle chose a-telle pu se produire? Comment aurions-nous pu l’empêcher?

Il serait injuste de dire que le système n’a pas été à la hauteur, car il n’existait en 2013 aucun système de prise en charge des commotions cérébrales régissant le sport chez les jeunes en Ontario, ni dans le reste du pays. Ce qui s’en rapprochait le plus était la stratégie pluriministérielle sur les commotions cérébrales annoncée par le gouvernement de l’Ontario, ainsi que le Projet de loi 39, Loi de 2012 modifiant la Loi sur l’éducation (commotions cérébrales) présenté par celui-ci, en 2012. Toutefois, le projet de loi est mort au Feuilleton lorsque le Parlement fut prorogé et qu’une élection provinciale fut déclenchée. Il n’a pas été présenté de nouveau à la session parlementaire suivante. À l’opposé, les 50 États des États-Unis disposent de lois régissant la prise en charge des commotions cérébrales subies par les jeunes, et certaines d’entre elles remontent même à 2009.

L’absence de lois sur les commotions cérébrales et d’un système cohérent de prise en charge des commotions cérébrales dans les activités sportives pratiquées par les jeunes a été signalée lors de l’enquête du coroner sur le décès de Rowan, en 2015. Pendant neuf jours, le jury du coroner a entendu 19 témoins et examiné 36 pièces. Après trois jours de délibérations, les membres du jury ont rendu un verdict contenant 49 recommandations destinées, entre autres, au gouvernement fédéral ainsi qu’aux ministères, aux conseils scolaires et aux organismes de sport de l’Ontario. Ces recommandations figurent à l’annexe A du présent rapport. Le texte intégral du verdict est accessible en ligne.

Comité consultatif de la Loi Rowan

La toute première recommandation du jury voulait que le gouvernement de l’Ontario adopte une loi, appelée la « Loi Rowan », qui régirait toutes les activités sportives pratiquées par les jeunes en Ontario. Cette loi établirait une norme de pratique en ce qui a trait à la reconnaissance et à la prise en charge des commotions cérébrales, dans la province.

L’enquête du coroner a mené à l’établissement d’un objectif clair et louable, qui a été adopté immédiatement par le gouvernement de l’Ontario. À la fin de 2015, un projet de loi d’initiative parlementaire présenté à l’Assemblée législative de l’Ontario a établi le Comité consultatif de la Loi Rowan. Le projet de loi, appuyé par tous les partis, a reçu la sanction royale en juin 2016, et le Comité a été mis sur pied en septembre 2016. On nous a accordé un an pour effectuer nos travaux et produire le présent rapport.

Le cadre de référence du Comité et les biographies des membres de ce dernier figurent respectivement à l'annexe B et à l'annexe C du présent rapport. Le mandat du Comité consiste à :

  • examiner les recommandations formulées par le jury à la suite de l’enquête du coroner sur le décès de Rowan Stringer
  • examiner la législation, les politiques et les pratiques exemplaires d’autres territoires de compétence en ce qui concerne les traumatismes crâniens, dont les commotions cérébrales
  • formuler des recommandations sur la façon de mettre en oeuvre les recommandations du jury, de prévenir et de réduire les traumatismes crâniens subis pendant la pratique d’activités sportives en Ontario et de favoriser la sensibilisation à ces blessures
  • formuler toute autre recommandation pertinente en ce qui concerne la prévention ou le traitement des traumatismes crâniens
  • présenter des recommandations dans un rapport à la ministre du Tourisme, de la Culture et du Sport dans l’année suivant le début de ses travaux

Le Comité consultatif de la Loi Rowan s’est mis au travail presque immédiatement. En neuf mois, il s’est réuni à huit reprises. D’innombrables conversations téléphoniques et échanges de courriels ont également eu lieu. Dans le cadre de nos travaux, nous avons été appuyés par les ministères provinciaux les plus actifs à l’égard de la question des commotions cérébrales : le ministère du Tourisme, de la Culture et du Sport, le ministère de l’Éducation, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, le ministère des Services à l’enfance et à la jeunesse et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Formation professionnelle. De plus, un groupe de travail composé de hauts dirigeants de ces ministères a été mis sur pied afin de nous offrir le soutien dont nous avions besoin dans le cadre de nos travaux de recherche, notamment.

Nous avons procédé à un examen par administration de la législation et des cadres politiques existants en matière de commotions cérébrales au Canada ainsi que dans d’autres pays afin de veiller à bien les comprendre. Nous nous sommes également tenus au fait des initiatives fédérales et avons veillé à maintenir les liens avec le groupe de travail fédéral, provincial et territorial (FPT) sur les commotions cérébrales. De plus, nous avons rencontré divers intervenants, dont Santé publique Ontario, Sport Canada et l’Institut canadien d’information sur la santé. Parallèlement, nous avons travaillé à sensibiliser le public et à solliciter ses commentaires sur les commotions cérébrales en général et, plus particulièrement, au sujet de l’histoire de Rowan. Par-dessus tout, nous n’avons jamais perdu de vue le fait que nous cherchons à changer la culture associée aux traumatismes crâniens dans le sport par la mise en place de lignes directrices et de pratiques exemplaires et la création d’une loi — nommée en l’honneur d’une jeune femme qui aurait pu être sauvée si elle avait existé en 2013.