Introduction

Vue d’ensemble

Les présentes normes établissent les exigences pertinentes pour toutes les étapes de la prestation des services de protection de l’enfance qui sont décrits dans ce document. Autrement dit, elles ne visent aucune étape particulière des services décrits aux normes 1 à 8 (c-à-d. de la réception du signalement jusqu’à la fermeture du dossier), et établissent plutôt les exigences liées aux points suivants :

  1. Consultation avec les Premières Nations
  2. Services en français
  3. Différences culturelles, religieuses et régionales
  4. Règlement extrajudiciaire des différends (RED)
  5. Planification de la permanence
  6. Consultation de supervision : dérogations aux normes, décisions liées au placement et RED
  7. Notes contemporaines versées au dossier

Objectif

Les présentes normes visent à souligner les exigences clés auxquelles les SAE doivent répondre pendant la prestation des services de protection de l’enfance. Certaines de ces exigences se rapportent aux objectifs de la Stratégie de renouvellement des services de bien-être de l’enfance (MSEJ, 2005), y compris les solutions de rechange au règlement devant le tribunal, la planification de la permanence et la responsabilisation, alors que d’autres concernent des exigences législatives liées à la prestation de services aux enfants indiens et autochtones, ainsi qu’aux familles francophones en Ontario.

*Aux fins du présent document, l’expression « Premières Nations » désigne dans la LSEF une bande indienne ou une communauté autochtone. Les termes « indien » et « autochtone » sont employés dans la LSEF. Dans le présent document, le terme « autochtone » désigne :

Normes associées à toutes les étapes de la prestation des services de protection de l’enfance

Norme

A. Consultation avec les Premières Nations

Conformément à la Loi sur les services à l’enfance et à la famille (LSEF), dans le cas d’un enfant indien ou autochtone, un certain nombre d’exigences législatives sont associées à la consultation ou à la notification de la bande de l’enfant ou d’un représentant choisi par la bande ou la communauté autochtone de l’enfant. En particulier, les points suivants sont des questions qui touchent les enfants indiens ou autochtones et pour lesquelles la SAE est tenue de consulter ou d’aviser la bande ou la communauté autochtone footnote 2

  • *à l’issue d’une enquête complète sur la protection de l’enfance en vertu de la LSEF, si l’on détermine qu’un enfant a besoin de protection et que la décision résultant de l’enquête consiste à fournir des services continus de protection de l’enfance;
  • Si l’on détermine qu’un enfant a besoin ou pourrait avoir besoin de protection en vertu de la LSEF, pour déterminer si un processus de RED contribuerait à résoudre le problème;
  • Si une SAE fait ou reooit une proposition voulant qu’une méthode prescrite de RED soit employée;
  • Dépôt d’une demande au tribunal pour déterminer si un enfant a besoin de protection;
  • *Appréhensions ou placements d’enfants en établissement ou en famille d’accueil;
  • Révisions de statut des demandes de nature judiciaire concernant la protection de l’enfance;
  • L’élaboration d’un plan par une SAE pour l’adoption d’un enfant.

*Si une SAE exerce ces deux pouvoirs, elle est tenue de notifier le représentant choisi par la bande ou la communauté autochtone de l’enfant avant la fin du jour suivant l’exercice du pouvoir pour demander qu’ait lieu une consultation sur le cas dès que possible mais au plus tard :

  • cinq (5) jours après la réception de l’avis si l’enfant est membre d’une bande ou d’une communauté autochtone qui se trouve sur le territoire de compétence de la SAE; ou
  • trente (30) jours après la réception de l’avis si l’enfant est membre d’une bande ou d’une communauté autochtone qui ne se trouve pas sur le territoire de compétence de la SAE.

Conseils pratiques

Consultation avec les Premières Nations

La consultation avec les Premières Nations dans le cas des enfants indiens et autochtones à divers moments de la prestation des services de protection de l’enfance est conforme aux autres objets suivants de la LSEF :

  • Reconnaître que les populations indiennes et autochtones devraient avoir le droit de fournir, dans la mesure du possible, leurs propres services à l’enfance et à la famille, et que tous les services fournis aux familles et aux enfants indiens et autochtones devraient l’être d’une façon qui tient compte de leur culture, de leur patrimoine, de leurs traditions et du concept de la famille élargie (disposition 5 du par. 1 (2)).

L’inclusion de la bande ou du représentant choisi par la bande aux moments clés de la prise de décision qui sont indiqués dans la LSEF renforce l’importance du rôle des Premières Nations dans les questions qui touchent le bien-être des enfants indiens et autochtones.

Dans la mesure du possible, la pratique exemplaire consiste à entrer directement en rapport avec la bande ou le représentant choisi par la bande (p. ex., par téléphone ou en personne) lorsqu’une consultation est requise. En Ontario, les membres des Premières Nations vivent dans une réserve ou hors réserve (p. ex., dans des centres urbains). La majorité vit hors réserve (gouvernement du Canada, 2011); cependant, cette situation ne diminue en rien l’importance de faire participer la bande à la planification des services. Le préposé devra peut-être aussi s’adresser à des agences autochtones des territoires de compétence voisins afin d’obtenir des services appropriés sur le plan culturel pour les familles si de tels services n’existe pas dans la communauté.

Lorsqu’un enfant est admissible à devenir membre ou est membre d’une Première Nation, et qu’il est considéré comme ayant besoin d’être protégé et d’être placé auprès d’une personne responsable, les soins conformes aux traditions sont une option qui devrait être envisagée. Cette solution de rechange qui évite les processus judiciaires et les ordonnances de la cour permet aux enfants indiens et autochtones de demeurer en contact avec leur culture et leur communauté. Pour en savoir davantage, lire : Soins structurés conformes aux traditions : Guide des principes, méthodes et meilleures pratiques, ministère des Services à l’enfance et à la jeunesse (2013).

L’élaboration et l’observation de protocoles locaux entre les SAE et les Premières Nations peut favoriser la collaboration et des relations de travail positives avec les communautés des Premières Nations, en plus de clarifier les méthodes et les procédés relatifs à la consultation et à la notification dans les questions qui touchent à des enfants indiens et autochtones. Les protocoles facilitent également la compréhension des rôles et responsabilités du personnel des SAE et des Premières Nations afin de soutenir les enfants des Premières Nations et leurs familles. Entre autres pratiques exemplaires, on peut aussi encourager la famille à travailler avec la bande, faire appel à la bande dès le début de l’intervention de la SAE auprès de la famille, et diriger la famille vers des services adaptés sur le plan culturel. La bande et les représentants communautaires sont bien placés pour aider à planifier les soins aux enfants des Premières Nations et à trouver des soutiens culturellement adaptés pour l’enfant et sa famille.

Services respectueux de la culture

Il importe que les préposés à la protection de l’enfance se comportent de manière respectueuse de la culture dans tous leurs rapports avec les communautés autochtones (Premières Nations, Métis et Inuits). Dans ce but, il faut notamment posséder des connaissances pertinentes sur les différentes cultures et sur l’histoire des peuples autochtones en Ontario, et respecter la diversité au sein des populations autochtones. Le préposé doit aussi comprendre ses propres points de vue du monde et ses propres préjugés éventuels, et s’interroger continuellement sur la façon dont ils peuvent modifier ses relations avec les clients.

Norme

B. Services en français

Conformément à la LSEF, les SAE sont tenues, le cas échéant, d’offrir des services en français aux enfants et aux familles.

En outre, selon la Loi sur les services en français (LSF), certaines SAE désignées sont tenues de fournir des services en français aux clients francophones.

Conseils pratiques

Il importe que les SAE offrent des services en français aux francophones parce que la loi l’exige, mais aussi parce que cette mesure constitue une bonne pratique pour répondre aux besoins des enfants et des familles francophones vulnérables. Quelques facteurs importants à prendre en considération :

  • Dans le cadre des services de protection de l’enfance, il est souvent nécessaire de tenir des discussions sur des questions délicates et personnelles, et les clients de la SAE se trouvent parfois dans des situations de crise. Ces situations peuvent poser des difficultés supplémentaires pour les enfants et les familles obligés de raconter leur histoire dans une langue qui n’est pas leur langue maternelle;
  • Il est possible que les clients hésitent à demander des services en français, étant donné l’autorisation légale que détiennent les SAE et la perception des clients à l’égard des pouvoirs qui sont attribués aux SAE.

La pratique exemplaire consiste pour la SAE à offrir des services dans les deux langues officielles dès le début des rapports avec les membres du public/clients, et tout au long de la prestation des services de protection de l’enfance.

Norme

C. Différences culturelles, religieuses et régionales

Conformément à la LSEF, dans la mesure où il est compatible avec l’intérêt véritable de l’enfant, sa protection et son bien-être, l’un des objets additionnels de la loi est de :

  • Reconnaître que, dans la mesure du possible, les services fournis à l’enfance et à la famille devraient l’être d’une faoon qui respecte les différences culturelles, religieuses et régionales.

Conseils pratiques

Diversité

L’Ontario offre une grande diversité de cultures et de religions, et présente également d’importantes différences régionales. Il importe que les professionnels du bien-être de l’enfance possèdent des connaissances générales sur les divers milieux des familles de chaque communauté et en particulier, qu’ils dialoguent avec les familles au sujet de leurs origines. Le vécu des familles peut influer sur leurs points de vue du monde et surtout, sur leur façon d’élever leurs enfants.

La collaboration et l’établissement de partenariats avec des organismes communautaires qui travaillent auprès de groupes culturels ou religieux particuliers peuvent aussi permettre de mieux comprendre le milieu dont proviennent les clients des SAE dans les communautés. De plus, cette coopération peut aider les SAE à fournir une aide appropriée sur le plan culturel.

Approche de lutte contre l’oppression

Une approche de lutte contre l’oppression comprend une analyse du déséquilibre des pouvoirs selon la race, l’ethnicité, le sexe, l’orientation et l’identité sexuelles, la capacité, l’âge, la classe, la situation géographique et d’autres facteurs sociaux. Ces facteurs peuvent influer sur la situation sociale de la personne, et en particulier sur l’accès au pouvoir, aux privilèges et aux ressources. Les personnes issues de milieux sociaux marginalisés n’ont peut-être pas le même accès au pouvoir et aux ressources que les groupes plus dominants, et on constate souvent que leur groupe est surreprésenté dans les réseaux du bien-être de l’enfance et d’autres services sociaux (AOSAE, août 2010).

Afin de corriger ce déséquilibre des pouvoirs, les professionnels du bien-être de l’enfance devraient continuellement réfléchir à leur propre situation sociale afin d’éviter de reproduire par mégarde tout comportement pouvant perpétuer des modèles d’oppression générale au cours des interactions avec les familles. Parmi les stratégies clés qui permettent de travailler conformément à une approche anti-oppression, il est conseillé de prendre en considération les conséquences de l’oppression historique et générale qui est exercée à l’endroit des groupes marginalisés, d’être à l’écoute des besoins exprimés par les familles et de ne pas se poser en « expert » lorsqu’on travaille auprès des familles (ibid.). De plus, « dans une approche anti-oppression, les personnes qui bénéficient de privilèges deviennent les alliées de celles qui n’en bénéficient pas en partageant le pouvoir et en créant une collaboration authentique » (ibid., p. 9).

Norme

D. Règlement extrajudiciaire des différends (RED)

Si, à un moment quelconque de la prestation des services de protection de l’enfance, il devient apparent que l’enfant a besoin ou pourrait avoir besoin de protection en vertu de la LSEF, la SAE doit déterminer si une méthode prescrite de règlement extrajudiciaire des différends (RED) pourrait aider à résoudre tout problème relatif à l’enfant ou à concevoir un plan de soins pour l’enfant.

Conseils pratiques

Le RED est une stratégie permettant de rationaliser les processus judiciaires et de favoriser des solutions de rechange. Axé sur une méthode inclusive et fondée sur la collaboration et les points forts pour résoudre les différends en matière de protection de l’enfance, il encourage la famille, et peut-être même la famille élargie et la communauté, à participer à la planification et à la prise de décision. Bien que la SAE soit tenue d’envisager le RED (art. 20.2 de la LSEF), cette méthode est volontaire et doit être entreprise avec le consentement de tous les participants (pour en savoir davantage, veuillez consulter la directive du MSEJ sur le RED).

Norme

E. Planification de la permanence

Pendant la prestation des services de protection de l’enfance, la SAE déploie des efforts pour faire participer à la planification tous les parents ou tous les membres intéressés de la famille élargie ou de la communauté de l’enfant, y compris un représentant choisi par la bande (si l’enfant est Indien ou Autochtone), le cas échéant. La SAE demeure continuellement à la recherche de personnes qui sont disposées à s’engager dans la planification et le soutien relatifs à l’enfant, et s’efforce de les faire participer au processus de prestation des services, selon les besoins.

Conseils pratiques

Planification de la permanence

Cette approche de planification de la permanence est conforme aux objets additionnels suivants de la LSEF, qui sont de reconnaître que les services à l’enfance devraient être fournis d’une façon qui, à la fois :

  • respecte les besoins de l’enfant en ce qui concerne la continuité des soins et des relations stables au sein d’une famille et d’un environnement culturel;
  • prévoit une évaluation, une planification et une prise de décision précoces en vue d’arriver à des plans permanents pour les enfants qui soient dans leur intérêt véritable;
  • inclut la participation de l’enfant, de son père, de sa mère, de ses parents et des membres de sa famille élargie et de sa communauté, si cela est approprié.

La planification précoce de la permanence présente notamment les avantages suivants :

  • Obtenir l’aide du réseau de soutien de l’enfant pour atténuer, dès le début du processus d’intervention, les risques de mauvais traitements futurs à l’endroit de l’enfant. Par exemple, le réseau de soutien de l’enfant peut être en mesure de fournir une aide précieuse à l’enfant et à sa famille afin de permettre à l’enfant de continuer de vivre en toute sécurité à l’intérieur du foyer;
  • Travailler à établir des rapports étroits qui favoriseront la stabilité et la permanence de l’enfant;
  • Maintenir l’intégrité des liens de l’enfant avec la communauté autochtone et d’autres groupes culturels;
  • évaluer la volonté des personnes d’entretenir une relation étroite avec l’enfant et de devenir sa famille permanente, advenant le cas où l’enfant ne serait plus en sécurité chez lui;
  • Encourager et favoriser la participation des parents et de l’enfant dans la prise de décision et la planification liées à l’enfant.

Norme

F. Consultation de supervision : dérogations aux normes, décisions liées au placement et RED

Le superviseur doit autoriser toute dérogation aux Normes de la protection de l’enfance pour toute question qui n’est pas laissée à la discrétion du préposé dans les normes 1 à 8.

Si, à un moment quelconque de la prestation des services de protection de l’enfance, on envisage le placement d’un enfant en soins hors domicile auprès de membres de la famille élargie ou de la communauté (avec ou sans soins de la société) ou auprès d’une société d’aide à l’enfance, le préposé doit consulter le superviseur concernant la situation. De même, le préposé devrait consulter le superviseur s’il envisage l’emploi du RED dans un dossier particulier.

Conseils pratiques

Le superviseur joue un rôle important pour faire en sorte que toute dérogation aux normes permette d’accroître la sécurité de l’enfant et/ou de mieux répondre aux besoins particuliers de l’enfant et de la famille. Le but principal des services de protection de l’enfance reste toujours la sécurité et le bien-être de l’enfant. Il faut toutefois reconnaître que les normes ne peuvent pas prévoir tous les besoins uniques et souvent complexes de chaque enfant en Ontario. Les normes devraient toujours être appliquées de manière à protéger chaque enfant qui reçoit des services d’une SAE, même s’il se révèle nécessaire de déroger à une norme pour arriver au résultat désiré. Les dérogations aux normes qui surviennent pour des raisons indépendantes de la volonté du préposé (p. ex.., l’enfant et la famille ne sont pas disponibles pour des entrevues) sont également acceptables si elles sont examinées et approuvées par un superviseur.

La participation du superviseur aux décisions clés touchant la sécurité et la permanence des enfants contribue à rehausser l’objectivité des décisions liées aux dossiers de protection de l’enfance, ainsi que la qualité des services fournis aux enfants et à leurs familles.

Norme

G. Notes contemporaines versées au dossier

Le préposé à la protection de l’enfance réunit, au sujet de l’enfant et de sa famille, des renseignements détaillés qui sont pertinents pour la prestation des services de protection en faisant appel à tout contact à l’intérieur ou à l’extérieur de la SAE. Ces renseignements constituent les notes contemporaines versées au dossier et doivent comprendre au moins les éléments suivants :

  • la date et l’heure du contact, la méthode de contact, et les noms des personnes concernées;
  • les discussions, les observations et les événements importants liés à un contact particulier;
  • le nom de l’auteur et la date des notes.

En outre, tout le contenu important qui est propre au dossier et dont il est discuté avec un superviseur est consigné dans les notes contemporaines versées au dossier (par le préposé ou par le superviseur).

Conseils pratiques

Il est prévu que les renseignements détaillés sur les contacts avec les enfants, leurs familles et d’autres intervenants qui ont lieu pendant la prestation des services de protection de l’enfance doivent figurer dans les notes contemporaines versées au dossier. Les notes doivent être consignées rapidement (moins de 24 heures) après que le contact a lieu pour garantir leur exactitude, étant donné que le temps écoulé pourrait modifier les souvenirs que le professionnel du bien-être de l’enfance conservera de tout événement important.


Notes en bas de page

  • note de bas de page[2] Retour au paragraphe Il est à noter que cette liste n’est pas une liste exhaustive des exigences qui se trouvent dans la LSEF concernant la consultation ou la notification des bandes des Premières Nations, mais plutôt une liste des exigences qui peuvent être liées à un cas particulier pendant les étapes de service décrites aux normes 1 à 8. L’article 213 de la LSEF stipule des exigences additionnelles selon lesquelles les SAE doivent régulièrement consulter les bandes ou les communautés autochtones en ce qui concerne certaines questions touchant les enfants indiens et autochtones. Pour en savoir davantage, se reporter à la LSEF et à son Règlement.