Notre vision 

  • L'équipe de direction stimule les changements au sein de l'organisation et incarne les comportements souhaités.
  • Les perspectives et expériences diversifiées des membres, des familles et des experts contribuent aux pratiques exemplaires.
  • L'organisation est structurée de manière à favoriser un milieu de travail sain et il existe des ressources en matière de mieux-être pour aider les membres là où ils se trouvent.
  • Les membres ont davantage confiance que leurs supérieurs les soutiendront.

Changer la culture grâce au leadership

La Police provinciale en est à un moment crucial en ce qui concerne sa culture organisationnelle. Certaines préoccupations importantes nécessitent une attention immédiate — et cette attention, du gouvernement et du public, n'a jamais été aussi élevée. C'est le moment idéal d'apporter des changements à la culture au sein de la Police provinciale, pour le bien de ses membres et du public qu'ils servent. 

Cependant, la culture organisationnelle de la police est rigide, fondée sur le rang et hiérarchique. Les communications ont tendance à circuler d'une certaine façon, c.-à-d. l'information monte vers le haut et les ordres descendent vers le bas. Les organisations policières ne changent pas aisément ni rapidement.footnote 1

Les suites du Rapport de l'ombudsman publié en 2012 illustrent le pouvoir de la culture. Bien que la Police provinciale ait bel et bien mis en œuvre les recommandations formulées dans ce Rapport, cela n'a pas généré les résultats escomptés en raison de la culture bien ancrée du silence, de la stigmatisation et du manque de confiance entre les membres de première ligne des régions et le Grand quartier général.

Par conséquent, il n'est pas surprenant que les membres, les leaders, les experts et les partenaires aient dit au Comité que, tant que cette culture dominante n'aura pas changé de façon significative, aucun effort pour améliorer le mieux-être ne sera vraiment efficace.

La direction doit jouer le rôle principal pour que ce changement se produise. Il faut que la culture au sommet change afin de réduire les stéréotypes profondément ancrés et encourager le personnel à se prévaloir de l'aide disponible.footnote 2 La direction doit donner l'exemple, communiquer les attentes et récompenser ou punir les autres pour leur comportement.footnote 3 Nous discuterons des rôles et des responsabilités de tous les cadres de l'organisation de diverses façons tout au long du présent rapport. 

Incarner les changements souhaités aux échelons supérieurs

Le premier endroit où la direction devrait focaliser son attention est sur les échelons supérieurs de l'organisation. Les transformations nécessitent un leadership audacieux, courageux et visionnaire. Le commissaire et son équipe de direction doivent montrer l'exemple dans la façon dont ils dirigent l'organisation et doivent engager des conversations, mobiliser les gens, incarner les changements souhaités et confronter les gens tout au long de ce processus de longue haleine.

« Il faut que ça parte du haut. Si les actions ne parlent aussi fort que les mots, rien ne va changer! » Membre de la Police provinciale

« La seule façon de changer la culture dans un détachement local est que le quartier général change sa culture. » Membre de la Police provinciale

Pour que ce processus soit couronné de succès, le commissaire et son équipe doivent reconnaître les problèmes et démontrer la nécessité d'apporter des changements, utiliser un nouveau langage et incarner eux-mêmes le comportement attendu de tous les membres, affecter les ressources de façon utile et accessible pour les membres de première ligne, et engager un dialogue et collaborer de façon directe et continue avec un échantillon représentatif de membres individuels, de familles, d'organismes et d'experts. L'utilisation d'un nouveau langage par l'équipe de direction est une bonne façon de signaler aux membres que les anciens comportements ne seront plus garants de succès.footnote 4

Le Comité a été très encouragé de constater le dévouement et l'expertise manifeste du commissaire Carrique et des membres de son équipe de direction. De toute évidence, le mieux-être et la résilience des membres sont importants pour le commissaire. Le commissaire et son équipe de direction amènent une vaste expérience et beaucoup de compassion et de compréhension à cette tâche.

Soutenir l'équipe de direction

Afin de concrétiser la vision du commissaire aspirant à un personnel en santé, l'équipe de direction doit avoir les outils requis pour susciter des changements à la culture. Le Mental Health Review et l'OPP Suicide Review contiennent des renseignements utiles sur les défis relatifs à la culture organisationnelle, spécialement en ce qui concerne la stigmatisation qui entoure la santé mentale. L'équipe de direction doit également continuer de se tenir au courant des efforts déployés dans d'autres organisations policières et dans le domaine militaire, par l'entremise du Bureau du coroner en chef, en consultant les nouvelles études et en allant au-delà de la communauté des services policiers afin de contribuer aux efforts déployés au sein de la Police provinciale.

L'un des outils essentiels pour accroître la crédibilité et le caractère opportun des efforts du commissaire est l'accès direct à des experts et aux perspectives diversifiées des membres et des familles à l'échelle de la province. Le Comité recommande la mise sur pied d'une table de concertation pour engager le dialogue et obtenir des conseils sur les questions difficiles liées au mieux-être et à la résilience.

En d'autres mots, bien qu'il revienne au commissaire et à son équipe de direction de diriger l'organisation de sorte à susciter des changements dans la culture le plus rapidement possible, le Comité estime que l'approche la plus efficace doit se fonder sur la collaboration, le dialogue et la responsabilité.

Recommandation 1 : Afin de concrétiser la priorité du commissaire en matière de mieux-être, il faut s'adjoindre des experts

  1. Mettre sur pied un groupe consultatif provincial pour le mieux-être présidé par le commissaire et composé de membres en uniformes et de membres civils, d'agents de négociation, de membres retraités, de familles, de cliniciens en santé mentale et d'un représentant de chaque groupe consultatif régional pour le mieux-être (voir 1 b.). Ce groupe fournira des recommandations et des conseils sur les politiques et les programmes en matière de santé mentale.
  2. Mettre sur pied un groupe consultatif régional pour le mieux-être dans chaque région. Ce groupe consultatif se penchera sur la santé mentale et le mieux-être dans la région et sera présidé par le commandant régional et fera rapport au groupe consultatif provincial. Ce groupe devrait se composer de représentants des membres civils et en uniforme, d'agents négociateurs, de membres retraités, de membres de la famille et de cliniciens en santé mentale locaux ou régionaux.
  3. En plus des recommandations formulées dans le présent Rapport et de celles présentées dans l'OPP Suicide Review et le Mental Health Review, les sujets suivants sont des sujets prioritaires pour les groupes consultatifs pour le mieux‑être :
    • Réduire la stigmatisation entourant la santé mentale.
    • Explorer le rôle que joue le recours à la force dans l'identité personnelle des agents de police.
    • Élaborer un modèle efficace pour le retour au travail, y compris des mesures d'adaptation utiles.
    • S'associer avec l'Association de la Police provinciale de l'Ontario (APPO) pour déterminer comment offrir des services de soutien complets de façon concertée.
  4. Le Comité appuie le concept des tables rondes avec les membres utilisé dans le cadre du Mental Health Review et encourage le commissaire à tenir de telles tables rondes sur une base régulière, possiblement tous les trois ans.
  5. Le Comité encourage l'équipe de direction à tenir compte des recommandations formulées dans le Mental Health Review, l'OPP Suicide Review et le Rapport du comité d’experts du coroner en chef.
  6. Le commissaire et la Police provinciale devraient continuer d'engager le dialogue et d'élaborer des pratiques exemplaires avec les leaders d'autres communautés et d'autres leaders autochtones, provinciaux, nationaux et ailleurs dans le monde qui s'intéressent au mieux-être et à la résilience dans le milieu policier.

Incorporer des changements audacieux

Afin de susciter des changements dans la culture, particulièrement dans une organisation comme la Police provinciale, il faut recourir à des approches novatrices pour mettre l'accent sur les nouvelles priorités et perturber les conventions. Le mieux‑être nécessite une approche qui crée une nouvelle culture plus inclusive qui offre davantage de soutien.

Pour aspirer au mieux-être, l'organisation doit être en mesure de donner suite aux directives et aux attentes du commissaire et de l'équipe de direction. La structure actuelle de la Police provinciale pour favoriser le mieux-être n'a pas les ressources appropriées, des relations et une expertise suffisantes, et n'est pas suffisamment accessible dans les régions pour être crédible et conserver la confiance des membres.

Le Comité estime que, pour revigorer l'approche en vue d'établir une structure organisationnelle favorisant le mieux-être, la Police provinciale doit se doter d'une définition holistique et intégrée du mieux-être ainsi que d'une entité organisationnelle spécialisée et décentralisée pour offrir ces services.

Le mieux-être nécessite une définition qui va au-delà de la santé physique ou mentale. Le York Regional Police Wellness Project se fonde sur la prémisse que le mieux-être global comporte quatre dimensions :footnote 5

  • Dimension biologique — santé physique, forme physique, régime alimentaire, sommeil, soins médicaux.
  • Dimension psychologique — résilience, humeur, concentration, vigilance.
  • Dimension sociale — famille, amis, collègues de travail, voisins, communauté.
  • Dimension spirituelle — la raison d'être, le but, le « pourquoi », la religion.

« Certains membres ont expressément déclaré à d'autres qu'ils se sentaient dépassés, submergés et incapables de faire face à quoi que ce soit d'autre; ces commentaires faisaient parfois référence à des événements traumatisants et englobaient également tous les événements de leur vie (p. ex. relations, préoccupations organisationnelles, santé physique et mentale). » OPP Suicide Review, p. 22.

Le Comité estime que cette façon de voir le mieux-être devrait représenter une pratique exemplaire. L'intégration des quatre dimensions du mieux-être favorise le dialogue, réduit la stigmatisation entourant la santé mentale, tient compte de l'intersectionnalité entre les événements de la vie et les problèmes de santé dans le cas des membres et reconnaît que les membres peuvent avoir des besoins qui touchent aux quatre dimensions.footnote 6

Un bureau séparé pour le mieux-être

Partout dans la province, le Comité s'est fait dire que le modèle actuel en ce qui concerne le mieux-être, bien qu'il découle du Rapport de l'ombudsman et qu'il repose sur de bonnes intentions, est insuffisant. La majorité des membres qui ont participé à nos discussions ont indiqué qu'ils ne sont pas au courant des services offerts ou qu'ils n'ont pas confiance dans les services offerts parce qu'ils sont centralisés au GQG, ne sont pas offerts dans les régions, ont une portée limitée, ne sont pas adaptés aux réalités du travail policier, ne sont pas fournis par des experts et/ou sont associés aux Ressources humaines. On a mentionné au Comité le manque de confiance et la ferme conviction que le modèle actuel est conçu pour répondre aux besoins de l'organisation plutôt qu'aux intérêts véritables des membres.

Le sondage a brossé un tableau similaire. Environ la moitié des répondants ont indiqué qu'ils ne sont pas au courant des programmes de mieux-être, y compris le programme d'aumônerie, le clinicien spécialisé dans le traitement des traumatismes, la liste de ressources communautaires en santé mentale, l'Équipe de ressources et de soutien par les pairs (ERSP) et le programme « Safeguard ». Certains autres programmes ont en grande partie été jugés peu utiles, y compris ceux vers lesquels les membres sont souvent dirigés en tant que programmes de premier recours.footnote 7

Le Comité a conclu qu'une restructuration organisationnelle majeure est nécessaire pour harmoniser la prestation des services relatifs au mieux-être au mandat du commissaire et aux besoins des membres. La création d'un bureau qui se consacre au mieux-être holistique et intégré au sein de l'organisation est nécessaire et ce bureau doit bénéficier d'un financement permanent. Bien qu'il ne soit peut-être pas nécessaire d'augmenter les fonds ou de réaffecter des fonds pour répondre à tous les enjeux liés au mieux-être et à la culture au sein de la Police provinciale, l'affectation spécifique de ressources à certains volets clés pourrait avoir un impact important et de longue durée. L'organisation doit faire du mieux-être une priorité et y consacrer des fonds afin d'assurer l'efficacité à long terme et la stabilité des programmes et des services.

De l'avis du Comité, il est clair que ce bureau doit être une entité distincte des Ressources humaines et des autres fonctions du Bureau de l'avancement professionnel et des Services internes. D'autres examens et études sur le mieux-être dans les corps de police ont souligné l'importance et les avantages de cette séparation.footnote 8

Le Comité estime que, pour réduire la stigmatisation et le décalage, tout en augmentant l'accès au soutien, la Police provinciale doit adopter un modèle de « carrefour » décentralisé. Ce modèle combinerait une approche stratégique commune au sein du GQG avec des carrefours régionaux de prestation des services afin que les membres puissent accéder plus directement à l'information et aux ressources. Les communications de la direction sur le mieux-être peuvent être transmises et renforcées par les cadres à tous les échelons.

Ce nouveau modèle permettrait une approche coordonnée et centralisée, réduirait l'approche « disparate » en ce qui concerne les services et renforcerait les relations avec d'importantes entités externes, comme la CSPAAT. Le Comité salue les progrès réalisés par la CSPAAT qui a décidé de reconnaître le trouble de stress post-traumatique (TSPT) et nous encourageons la Police provinciale et la CSPAAT à continuer d'améliorer l'aide offerte aux membres qui ont subi des blessures physiques ou psychologiques au travail.

Parallèlement, les carrefours régionaux pourraient mettre l'accent sur les ressources locales et régionales fournies par des experts, la collaboration avec les professionnels de la santé, l'aiguillage des membres vers les options et le maintien d'un dialogue régulier sur la santé qui répond aux besoins des membres dans la région.

La recommandation du Comité concorde avec les recommandations formulées dans le Mental Health Reviewfootnote 9, et constitue une pratique exemplaire.

Recueillir, analyser et mettre en commun les données sur le mieux-être

Le récent Rapport du comité d’experts du coroner en chef fournit d'excellentes recommandations quant à la nécessité de recueillir et d'analyser des données à l'échelle du secteur. Le Comité estime que la Police provinciale devrait contribuer à ces efforts et qu'une approche plus stratégique devrait effectivement être adoptée en ce qui concerne la collecte de données au sein de l'organisation. Nous soulignons que cela ne signifie pas que nous recommandons que davantage de données soient recueillies. Le Comité préconise plutôt l'adoption d'une approche stratégique en ce qui concerne la collecte de données afin d'obtenir un meilleur portrait des besoins des membres et de mieux comprendre l’utilité et l'impact des services offerts.

Le Comité recommande à la Police provinciale d'envisager la préparation d'un « Rapport sur le mieux-être » tous les ans. Ce rapport tiendrait compte des recommandations du Comité, présenterait les constatations découlant des données recueillies, fournirait une évaluation des programmes et des engagements ainsi que des renseignements et des connaissances sur la santé mentale.

Recommandation 2 : Se doter de ressources spécialisées pour soutenir le mieux-être en tant que priorité organisationnelle

  1. La santé et le bien-être devraient être considérés comme faisant partie d’un tout intégré et holistique qui englobe la santé physique, psychologique, sociale et spirituelle des membres. Le Comité préconise l'établissement d'un nouveau bureau pour la santé en milieu de travail (BSMT) qui sera chargé de veiller au mieux-être et à la résilience de l'organisation et de ses membres. Tous les services liés à la santé et au mieux-être, les services d'aumônerie, et les initiatives relatives à la diversité et à l'inclusion devraient relever du bureau pour la santé en milieu de travail. Bien qu'il revienne au commissaire de décider de qui relèvera le BSMT, ce bureau devrait être séparé des Ressources humaines.
  2. La direction du BSMT devrait être crédible et composée d'experts, et le BSMT devrait être dirigé par un membre de l'équipe de direction du commissaire. Le personnel du BSMT devrait se composer d'un nombre important de membres civils et en uniforme qui ont une « expérience vécue » du travail policier de première ligne, de cliniciens en santé mentale qui pourront fournir une aide directe aux membres ainsi que des recommandations pour les programmes, et d'un nombre suffisant de membres du personnel qualifiés pour aider les membres et les cadres à s'y retrouver dans les divers services liés au mieux-être offerts aux membres, et pour gérer les relations importantes telles que celles avec la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) et celles avec les compagnies d'assurance qui offrent une protection du revenu à long terme (PRLT).
  3. L'actuelle Unité des services pour le mieux-être devrait être incorporée au BSMT et le mandat de cette Unité ainsi que son modèle de dotation devraient être ajustés afin de tenir compte des recommandations formulées dans le présent Rapport, l'OPP Suicide Review et le Mental Health Review ainsi que les autres pratiques exemplaires.
  4. Le BSMT doit avoir une présence dans chaque région au moyen d'employés qui travaillent dans le carrefour du BSMT dans chaque région afin de fournir aux membres et aux cadres de l'aide, des conseils et des services rapides d'intervention et de résolution des problèmes.
  5. Le BSMT doit se doter d'une stratégie de communication active qui est appliquée en étroite collaboration avec le bureau du commissaire et qui prévoit la communication directe de renseignements aux membres, une communication continue avec les membres qui sont en congé et les membres retraités, une communication régulière avec les cadres de première ligne et la mise en œuvre, à l’échelle locale, d’un programme de dialogue actif avec les membres de la famille.
  6. Des ressources suffisantes devraient être affectées au BSMT pour permettre une administration centrale efficace et une mise en œuvre régionale et locale. Le ministère du Solliciteur général et le Secrétariat du Conseil du Trésor devraient travailler directement avec le commissaire pour préparer une analyse de rentabilisation adaptée aux besoins et prévoyant un nouveau financement permanent pour le mieux-être et la résilience.
  7. En tenant compte de l'analyse découlant du Rapport du comité d’experts du coroner en chef et d'autres pratiques exemplaires, le BSMT devrait établir un modèle d'analyse des données et de collecte de données utiles, comprenant des données quantitatives et qualitatives, pour aider le commissaire et le BSMT à remplir leurs mandats et à respecter leurs engagements. Un rapport annuel sur la santé et le mieux-être de l'organisation et de ses membres devrait être préparé et diffusé à l'échelle de la Police provinciale.

Notes en bas de page