Comme nous pouvons « entraîner » accidentellement nos corps à éprouver des difficultés à s'endormir, il est très important de pratiquer une saine hygiène de sommeil pour prévenir ce « mauvais » apprentissage involontaire. Les enfants qui ont des « freins fuyants » peuvent avoir des corps qui sont plus sujets à ce type d'apprentissage. Dans le cas des enfants qui sont biologiquement prédisposés à des troubles du sommeil, une saine hygiène de sommeil les aide à s'adapter à des horaires de sommeil réguliers. Un certain nombre de façons d'améliorer l'hygiène de sommeil sont expliquées ci-dessous. À la fin de ce document, on trouvera une liste de vérification proposant d'autres idées pour vous aider.

Donc, Munissons-les de freins!

Tenez un horaire de sommeil régulier. Ne variez pas les heures du coucher/lever de plus d'une heure, même les fins de semaine, et tenez-vous-en à une routine établie. Faites les mêmes choses dans le même ordre chaque fois — vous pourriez peut-être même créer un « scénario » ensemble, de sorte que les mots que vous échangez lorsque votre enfant est au lit soient les mêmes chaque nuit. En règle générale, une structure est toujours très utile pour les enfants qui ont des « freins fuyants » — elle favorise une prévisibilité dans leur vie (et, par conséquent, un sentiment de contrôle) qui, autrement, leur ferait défaut, compte tenu du peu de contrôle qu'ils exercent sur leurs propres corps, attention, émotions, et pensées. Cet horaire devrait être tel que l'enfant est au lit avant 23 heures, et se lève avant 8 heures.

Pas de siestes durant la journée. Épuisez plutôt l’enfant durant la journée. Des exercices réguliers sont une bonne façon d'y parvenir. L'activité physique, à n’importe quel moment de la journée, est bénéfique (même en  soirée), pourvu qu'elle n'ait pas lieu immédiatement avant le coucher, ce qui élèverait la température du corps  et le  réveillerait. Pour  nous  endormir,  nous avons  plutôt besoin que la température de notre corps s'abaisse. Une chose que nous savons au sujet du corps est qu'il abaisse automatiquement sa température (ce qui nous rend somnolent), de quatre à six heures après les exercices. Par conséquent, en faisant pomper le sang au moyen d'un certain genre d'activité, de quatre à six heures avant le coucher, nous pouvons faire en sorte que nos corps nous préparent de façon naturelle  à dormir exactement au moment où nous le voulons!

Les lits sont faits pour y dormir! Le lit devrait être utilisé uniquement pour dormir — en fait, cela enseignera au corps de l'enfant à se préparer pour le sommeil dès qu'il est allongé à cet endroit et à ce moment-là. Rester allongé au lit pendant des heures à lire ou à manger sème la confusion dans le corps de l'enfant, parce que diverses activités (dont certaines ont pour effet de démarrer le corps, tandis que d'autres ont pour effet de le freiner) sont maintenant liées au lit. Si l'enfant joue souvent dans son lit, cela peut même entraîner son corps à lier l'activité au lit, ce qui signifie que l'enfant deviendra plus stimulé, plutôt que détendu, lorsqu'il s'allonge!

La stimulation est néfaste! Afin de permettre au corps de s'arrêter, les sources de stimulation doivent être évitées en préparation pour le coucher. Évitez les affrontements peu avant d'éteindre les lumières. La caféine est un stimulant, de même que les colas, Mountain Dew, les thés, les cafés ou le chocolat consommés tard dans l'après-midi ou en soirée et devraient être interdits. En règle générale, éliminez ces produits du régime alimentaire de l'enfant six heures avant le coucher; il ne faut pas manger, non plus, de gros repas immédiatement avant le coucher. Enfin, la chambre est-elle trop bruyante ou trop éclairée pour que l'enfant puisse s'endormir? Rappelez-vous que votre enfant a peut-être des « freins fuyants » sur ses sens, et que des sons et/ou de la lumière dans la chambre qui ne vous dérangeraient pas empêcheront votre enfant de s'endormir. Enfin, diminuer l'intensité des lumières une heure avant le coucher est une bonne stratégie, peu importe que vous ayez des « freins fuyants » sur vos sens ou non — la réduction de la lumière a un effet direct sur la glande pinéale, qui sécrète une hormone favorable au sommeil!

« Extinction graduelle ». Décidez pendant combien de temps vous allez attendre avant d'aller voir pourquoi votre enfant pleure, et tenez-vous-en à cette décision. Ne prenez pas l'enfant dans vos bras et ne le récompensez pas d'autre manière pour ces comportements — allez simplement « jeter un coup d'œil » juste le temps de vous assurer que tout va bien. Attendez plus longtemps chaque nuit, sur plusieurs nuits. Comme ce plan a pour effet que personne ne dorme bien pendant quelques nuits, vous pourriez choisir une fin de semaine/un jour férié pour commencer à procéder  à
« l’extinction graduelle ».

Réduction du délai d’endormissement par conditionnement.  Mettez en pratique une certaine psychologie inversée. « Tu veux veiller? Parfait — Veille vraiaiai….ment tard! » Gardez les activités ennuyeuses (« c'est ce que font les adultes lorsqu'ils veillent tard ») et gardez l'enfant éveillé jusqu'à ce qu'il ait suivi la routine du coucher et qu'il ait été mis au lit 30 minutes après le moment où l'enfant se serait endormi naturellement. L'enfant est assez fatigué pour que vous n'ayez pas à vous battre avec lui pour le mettre au lit, et s’il n’y a pas de luttes, il n’y a pas d’intensification de la stimulation! Avec le temps, cette mesure « rééduque » le corps de votre enfant de façon à ce qu'il apprenne que le coucher est un temps de détente et que le lit est une source de soulagement de son épuisement. Une fois cela établi, l'heure du coucher peut être reculée lentement (15 minutes à la fois), et, finalement, fixée à l'heure souhaitée (ou, du moins, à une heure qui permet quand même àl'enfant de sembler bien reposé le matin). Il importe de signaler qu'il ne s'agit pas de « leurrer » l'enfant, mais plutôt son corps!

Encore de la psychologie inversée. Souvent, c'est le stress entourant le fait de VOULOIR s'endormir qui, ironiquement, fait en sorte que des gens aient des difficultés à s'endormir. Ils essaient trop fort! Une façon de supprimer le stress de l'équation est de placer plutôt l'accent sur le fait de rester éveillé. Faites en sorte que l'enfant se prépare pour le coucher et s'installe, puis dites-lui à quel point il est important qu'il NE s'endorme PAS. Cela élimine la pression et, parfois, c'est suffisant!

Qu'en est-il si mon enfant a le syndrome de la Tourette? Si votre enfant a des tics douloureux, un massage ou une douche/un bain chaud peut aider à détendre son corps. Si ses muscles sont chroniquement tendus en raison de tics présents depuis longtemps, des soins chiropratiques pourraient être nécessaires pour corriger toute subluxation et permettre au corps d'être « ré-entraîné » à se détendre.

Qu'en est-il si mon enfant est obsessif/compulsif? Votre enfant se plaint-il que son cerveau n'arrête pas assez longtemps pour qu'il puisse s'endormir? Une technique dont vous pourriez faire l'expérience est l'utilisation d'un appareil de télévision dans la chambre à coucher. Parfois, une émission télévisée peut servir de facteur de distraction pendant assez longtemps pour que le corps de l'enfant se détende et glisse vers le sommeil. Pour que cette stratégie soit efficace, les composantes suivantes sont très importantes.

  • Utilisez un téléviseur doté d'une minuterie qui peut être programmée pour éteindre l'appareil après une période précise (p. ex. une heure). Ainsi, l'enfant n'est pas réveillé plus tard dans la nuit par le bruit. Si cette technique donne de bons résultats pour votre enfant, la longueur de temps durant laquelle le téléviseur est allumé peut être réduite.
  • Le choix de l'émission est crucial : il devrait s'agir d'une émission qui produit peu de stimulation (c.-à-d. sans qu'il y ait beaucoup d'explosions et d'excitation). L'émission devrait également être très prévisible, soit parce que sa structure est toujours la même (comme la façon dont l’émission La Loi et l’Ordre suit toujours la même formule), soit parce que son contexte est familier à la personne (une émission ou un épisode qu’elle a  regardé à maintes reprises). En soi, le simple fait de savoir ce qui se passera ensuite au cours de l'émission est réconfortant et contribue à détendre l'enfant.

Qu'en est-il si mon enfant est aux prises avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité (TDAH)? Faites place à la nécessité de routines plus longues que la normale. Compte tenu des problèmes qu'ont les  enfants souffrant du TDAH en ce qui concerne la régularisation de leurs niveaux d'énergie, il est plus important de surfer sur leurs « vagues » (lorsque leur niveau d’énergie est faible et qu'ils s’assoupissent, NE les réveillez PAS pour leur faire exécuter une routine). Si votre enfant prend un médicament stimulant, sachez que certaines doses prises plus tard au cours de la journée peuvent nuire au sommeil. Assurez-vous de parler à votre médecin et/ou votre pharmacien au sujet de l'administration appropriée de ce médicament.

Primes additionnelles — meilleurs freins, moins de maux de tête! Une façon d'éviter les luttes pour le pouvoir concernant l'utilisation de ces techniques est d’expliquer aux enfants « ce qu'ils ont à gagner ». Les arguments concernant  l'heure à laquelle les lumières sont éteintes peuvent facilement sembler aux enfants comme simplement une autre façon dont un adulte leur dit quoi faire. Assurez-vous que ce n'est pas le cas — non seulement les freins de ces enfants fonctionneront-ils mieux le lendemain s'ils dorment plus longtemps (comme une batterie qui est en train de se recharger), mais des recherches récentes donnent à entendre qu'une saine hygiène du sommeil peut réduire la fréquence et la durée des accès de migraine (Bruni, Galli, et Guidetti, 1999).

Un dernier point : Dans le cas d’un enfant qui est génétiquement prédisposé à des troubles du sommeil, ces techniques ne sont pas un « remède » au problème. Elles créent plutôt un environnement qui permet à l'enfant de dormir selon un horaire régulier en dépit de ses tendances naturelles. Les ampoules électriques brillent fortement jusqu'à ce qu'elles brûlent, ce qu'elles sont conçues pour faire — ce n'est qu'en les reliant à une minuterie qu'elles suivront l'horaire que nous établissons, sans qu'il soit nécessaire d'intervenir. Pour cette raison, vous ne devriez pas être étonné si des problèmes refont surface après une certaine perturbation de l'horaire (attribuable, par exemple, à une maladie ou à des vacances). Considérez cette perturbation comme une panne de courant sur la minuterie — de la même manière qu'une ampoule retournerait à ses tendances naturelles, ainsi font les enfants. Nous devons simplement réinitialiser la minuterie avant de pouvoir nous attendre à ce que l'ampoule électrique (ou l'enfant!) suive à nouveau l'horaire que nous souhaitons.

Si vous désirez plus de détails que ceux qui sont fournis ici, un excellent livre à lire est Sleep Better! A Guide to Improving Sleep for Children with Special Needs, de M. V. Mark Durand, psychologue.