Type de document : Directive sur les poursuites
Date d’entrée en vigueur : 14 novembre 2017

L’exploitation des enfants par Internet couvre un certain nombre d’infractions, y compris la pornographie juvénile, le voyeurisme, le leurre d’enfants, l’acceptation ou l’organisation d’une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant et la mise à la disposition d’un enfant de matériel sexuellement explicite. Cela peut inclure la distribution non consensuelle d’images intimes. La pornographie juvénile peut prendre diverses formes, y compris des documents écrits, des enregistrements audio, des photographies, des films, des vidéos ou d’autres représentations visuelles. Comme tous les crimes commis contre des enfants, les infractions relatives à l’exploitation d’enfants au moyen d’Internet représentent une grave menace pour les enfants, la famille et la communauté et doivent faire l’objet de poursuites vigoureuses.

Les poursuites relatives aux infractions d’exploitation d’un enfant par Internet soulèvent un certain nombre de préoccupations particulières concernant les victimes, la divulgation de documents de nature délicate ou illicite, la gestion de la salle d’audience et des pièces au procès, ainsi que les ordonnances accessoires de détermination de la peine et du bien-être des personnes exposées à cette preuve.

La sensibilité au point de vue des enfants victimes, à leurs intérêts personnels et à leur besoin d’être protégés contre la récidive doit être envisagée à chaque étape de la poursuite. C’est notamment le cas même lorsque l’identité ou les allées et venues des enfants victimes sont inconnues.

Si l’identité des victimes est connue, la poursuivante devrait veiller à ce que l’on informe les victimes ou, le cas échéant, ses parents ou tuteurs légaux des étapes importantes de l’instance avant que l’affaire ne soit entendue au tribunal, le cas échéant. Cette démarche comprend une rencontre avec les victimes avant l’audience préliminaire et le procès. Les poursuivantes devraient également veiller à ce que les victimes ou, le cas échéant, ses parents ou tuteurs légaux, soient informés des services spécialisés aux victimes disponibles, offerts par le Programme d’aide aux victimes et aux témoins (PAVT) ou par des services de soutien aux victimes similaires.

Les poursuivantes qui s'occupent des affaires liées à l’exploitation d’un enfant par Internet devraient aussi prendre en considération les instructions énoncées dans les directives intitulées Infractions contre les enfants et Victimes.

Poursuites

Filtrage des accusations

La poursuivante devrait décider, à l’étape du filtrage des accusations, si les infractions mixtes devraient faire l’objet de poursuites par acte d’accusation ou par procédure sommaire. La poursuivante doit prendre en considération les instructions énoncées dans la directive intitulée Infractions contre les enfants lorsqu’il s’agit de déterminer s’il convient de procéder par voie sommaire ou par acte d’accusation. En outre, il est généralement dans l’intérêt public de procéder par voie de mise en accusation lorsque l’infraction consiste à faire des enregistrements permanents ou à les distribuer sur Internet.

La poursuivante devrait également tenir compte des directives intitulées Système national de repérage des délinquants à risque élevé et Les délinquants dangereux et les délinquants à contrôler pour intenter des poursuites relativement à des infractions impliquant l’exploitation d’un enfant sur Internet.

Divulgation

Les poursuites en cas d’infractions de pornographie juvénile soulèvent des préoccupations uniques en matière de divulgation parce que l’accès à la pornographie juvénile est une infraction criminelle, qu’il existe un potentiel de traumatisme qui peut être causé par la consultation de ce matériel, et en raison de l’intérêt public marqué à protéger la vie privée et la dignité des enfants représentés dans le matériel d’abus sexuel des enfants.

Dans ces circonstances uniques, la divulgation peut être faite de deux façons :

  • en offrant à l’avocat de la défense une occasion de voir la pornographie juvénile dans un endroit sûr et privé
  • en fournissant des copies du matériel en vertu d’une ordonnance du tribunal assortie de conditions suffisantes pour répondre aux préoccupations selon lesquelles le matériel sera utilisé à des fins légitimes liées à l’administration de la justice, la divulgation ne constitue pas un risque indu de préjudice pour les enfants et les intérêts personnels des enfants représentés dans la pornographie juvénile seront protégés adéquatement.

Il faut se reporter à la directive intitulée Divulgation.

Protéger la vie privée des enfants victimes

Interdits de publication

La poursuivante doit appliquer les dispositions législatives pertinentes pour veiller à ce que les intérêts personnels de l’enfant victime et ceux des autres témoins soient protégés. La poursuivante devrait tenir compte de l’orientation donnée dans la directive intitulée Interdictions de publications et ordonnances de mise sous scellés.

Dans les cas d’infraction de pornographie juvénile, en vertu du Code criminel, le juge impose une ordonnance de non-publication, même en l’absence d’une demande de la poursuite. La poursuivante doit rappeler au tribunal son obligation de délivrer l’ordonnance.

Présentation de preuve de pornographie juvénile

Dans les poursuites liées à l’exploitation des enfants sur Internet, les pièces produites contiennent souvent des documents considérés comme de la pornographie juvénile. Les poursuivantes doivent chercher à protéger la vie privée et la dignité des enfants qui peuvent être représentés dans le matériel illustrant des abus sexuels d’enfants, ainsi que d’autres personnes susceptibles d’être touchées par une exposition accidentelle à ce matériel.

Compte tenu de ces préoccupations, il doit prendre toutes les précautions nécessaires pour veiller à ce que la preuve de pornographie juvénile soit présentée au tribunal de manière à ce que seules les personnes qui sont tenues de consulter le matériel puissent le faire. En fin de compte, c’est le tribunal qui déterminera le mode de consultation de ces documents.

Ordonnances de mise sous scellés

Les poursuivantes doivent demander une ordonnance de mise sous scellés à l’égard d’une pièce qui renferme du matériel considéré comme de la pornographie juvénile. En appel, les poursuivants doivent demander une ordonnance de mise sous scellés des cahiers d’appel ou des pièces renfermant de la pornographie juvénile et des conditions restrictives concernant l’utilisation et la destruction éventuelle des cahiers d’appel.

Pourparlers de règlement et détermination de la peine

Les poursuivantes devraient tenir compte des directives précises énoncées dans Infractions contre les enfants lorsqu’ils entreprennent des pourparlers de règlement. Dès que possible, la poursuivante doit prendre des mesures raisonnables pour veiller à ce que les victimes ou, le cas échéant, ses parents ou tuteurs légaux soient informés d’un règlement proposé (p. ex. un plaidoyer de culpabilité ou une peine proposée) ou à ce que les accusations soient retirées.

à moins de circonstances exceptionnelles, et seulement avec l’approbation préalable du procureur de la Couronne ou de la personne désignée, la poursuivante ne doit pas :

  • alléger ou retirer une accusation relative à l’exploitation d’un enfant par Internet
  • accepter un plaidoyer pour une autre infraction, uniquement pour éviter une peine minimale obligatoire
  • accepter un plaidoyer pour une autre infraction, uniquement pour éviter une ordonnance de prélèvement pour analyse génétique ou une ordonnance en vertu de la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels (LERDS).

Déclaration de la victime

Le Code criminel ordonne au tribunal de demander à la poursuivante si des mesures raisonnables ont été prises pour permettre à la victime de préparer une déclaration de la victime. Dès que possible après une déclaration de culpabilité, la poursuivante doit prendre des mesures raisonnables pour donner à la victime ou, le cas échéant, ses parents ou tuteurs légaux l’occasion de préparer une déclaration de la victime, et pour informer la victime de son droit de la présenter au tribunal et de ses autres options.

Ordonnances accessoires

Toutes les infractions d’exploitation d’un enfant par Internet sont des « infractions primaires », à l’exception du voyeurisme. La poursuivante doit rappeler au tribunal que l’ordonnance de prélèvement d’analyse génétique est obligatoire et doit demander une telle ordonnance, peu importe que le profil du délinquant soit déjà inclus dans la banque de données génétiques ou non. Il faut se reporter à la directive intitulée Ordonnances relatives à la Banque nationale de données génétiques.

Toutes les infractions d’exploitation des enfants sont des infractions désignées pour lesquelles une ordonnance rendue en vertu de la LERDS est obligatoire, à l’exception du voyeurisme. La poursuivante doit rappeler au tribunal cette ordonnance obligatoire et la durée appropriée de l’ordonnance.

Dans les cas de voyeurisme, la poursuivante devrait présenter une demande d’ordonnance de prélèvement d’analyse génétique et une ordonnance en vertu de la LERDS si la poursuivante estime que l’infraction de voyeurisme a été commise dans le but de perpétrer une infraction d’ordre sexuel désignée (p. ex. la fabrication de pornographie juvénile) ou qu’il y a des preuves étayant une préoccupation légitime selon laquelle le comportement du délinquant peut dégénérer ou que le délinquant a des antécédents de comportement antisocial.

Le cas échéant, les poursuivantes devraient demander une ordonnance d’interdiction restreignant la capacité du délinquant d’interagir avec des enfants de moins de 16 ans, en personne ou sur Internet.

Dans tous les cas où un délinquant a été reconnu coupable d’une infraction concernant l’exploitation d’un enfant par Internet, les poursuivantes devraient demander la confiscation des éléments utilisés dans la pornographie juvénile ou le leurre sur Internet, y compris les ordinateurs. Les poursuivantes doivent demander la confiscation de toute pornographie juvénile dont la possession est illégale et de tous les biens infractionnels.