Type de document : Relance post-covid 19
Date d’entrée en vigueur :  7 octobre 2021

Relance post-covid 19

Les effets de la pandémie de covid 19, notamment la réduction nécessaire des activités des tribunaux, ont causé des difficultés sans précédent dans le système de justice pénale. Ces difficultés ont entraîné un arriéré important d’affaires criminelles au sein des tribunaux. Compte tenu de cet arriéré et des poursuites à venir, les poursuivantes doivent prendre des mesures pour réduire le nombre d’affaires dans le système de justice pénale, afin de s’assurer d’accorder la priorité aux poursuites intentées relativement à des infractions graves.

La poursuivante doit examiner chaque cas conformément à l’orientation générale du Manuel et rendre des décisions de principe qui tiennent également compte de l’arriéré d’affaires au sein des tribunaux, lequel est attribuable à la pandémie de covid 19. Dans le cadre de cet examen, la poursuivante doit :

  • déterminer si la poursuite est viable et appropriée, notamment en se penchant sur la question de savoir s’il est dans l’intérêt public d’engager la poursuite, vu l’incidence de la pandémie de covid 19 sur le système de justice pénale
  • étudier toutes les sanctions disponibles et appropriées, dans le respect de la sécurité publique, pour régler les affaires le plus rapidement possible
  • déployer tous les efforts possibles pour réduire au minimum les retards causés par la pandémie de covid 19 ainsi que leur impact sur les victimes, les témoins et les accusés, et pour réduire le risque que des affaires soient suspendues pour cause de retard déraisonnable. 

La population compte sur les poursuivantes pour donner suite à des accusations lorsque cela permet de renforcer la sécurité publique et la confiance du public en l’administration de la justice et en la primauté du droit.

Les poursuivantes doivent agir de manière objective, indépendante et équitable dans chaque cas pour que des décisions de principe soient rendues. Les décisions prises par les poursuivantes dans l’exercice diligent de leur pouvoir discrétionnaire seront soutenues par le procureur général.

Filtrage des accusations

Une accusation ne peut aboutir à un procès que s’il existe une perspective raisonnable de condamnation et si la poursuite est dans l’intérêt public. Cette norme doit être appliquée à tous les cas et à toutes les étapes. Lorsqu’il n’existe pas de perspective raisonnable de condamnation ou qu’une poursuite ne sert pas l’intérêt public, la poursuivante doit retirer l’accusation.

Il convient de consulter la directive sur le filtrage des accusations.

La perspective raisonnable de condamnation et les répercussions de la pandémie de covid 19

Conformément à son obligation constante d’évaluer la perspective raisonnable de condamnation à toutes les étapes de la poursuite, la poursuivante doit prendre en considération toutes les faiblesses de la poursuite susceptibles d’avoir été exacerbées par les restrictions imposées aux tribunaux en raison de la covid 19 ou toute autre répercussion de cette pandémie.

Ainsi, la poursuivante doit prendre en considération l’effet de l’allongement des délais, la capacité des témoins d’assister à une audience en personne ou à distance et l’accès aux technologies adaptées.

S’il existe une perspective raisonnable de condamnation, la poursuivante doit alors déterminer s’il est dans l’intérêt public de continuer la poursuite.

L’intérêt public et les répercussions de la pandémie de covid 19

Même s’il y a une perspective raisonnable de condamnation, il n’est pas toujours dans l’intérêt public de continuer la poursuite. Lorsqu’il s’agit d’évaluer l’intérêt public, aucun facteur n’est déterminant à lui seul, mais il faut prendre en considération tant la gravité de l’infraction, y compris le préjudice causé aux victimes et au public, que les pressions importantes auxquelles est soumis le système de justice pénale en raison de la pandémie de covid 19

La poursuivante doit aussi prendre en considération ce qui suit :

  1. la durée d’un procès et les délais et dépenses liés au procès, les restrictions et limites que la covid 19 impose et imposera aux activités des tribunaux, ainsi que la nécessité de réduire le nombre d’affaires dans le système de justice pénale, afin que des ressources soient disponibles pour les poursuites intentées relativement à des infractions graves
  2. l’impact de la pandémie de covid 19 sur un accusé, une victime ou un témoin ou sur un segment de la collectivité, eu égard à son âge, sa santé physique, sa santé mentale ou une vulnérabilité particulière (par ex. la fréquence de la violence de la part d’un partenaire intime durant la pandémie de covid 19)
  3. l’impact disproportionné de la pandémie de covid 19 sur les collectivités racialisées, marginalisées et autochtones (par ex. augmentation de la fréquence des délits de discrimination ou liés à la haine durant la pandémie de covid 19, ou accroissement des obstacles liés au fait de vivre dans une collectivité éloignée des Premières Nations ou une collectivité accessible par avion)
  4. l’impact disproportionné de la pandémie de covid 19 sur les accusés vulnérables, notamment les accusés racialisés, marginalisés et autochtones (par ex. aucun accès aux mesures d’adaptation ou de soutien normalement offertes)
  5. la question de savoir si l’infraction a été motivée par la pandémie de covid 19 (par ex. profiter de la fermeture des commerces ou exploiter la peur de la contamination)
  6. la question de savoir si l’accusation vise une infraction contre l’administration de la justice, comme une omission de se conformer, lorsque les restrictions imposées par la pandémie de covid 19 ont eu des effets sur la capacité d’un accusé de se conformer à l’ordonnance du tribunal
  7. la question de savoir si l’expérience d’avoir été arrêté et accusé d’un acte criminel (et peut-être détenu sous garde en attendant d’être mis en liberté) peut, en soi, dissuader l’accusé d’avoir d’autres démêlés avec le système de justice pénale
  8. les facteurs d’intérêt public énoncés dans la directive sur le filtrage des accusations, notamment la gravité ou la gravité relative de l’infraction, la prévalence du type d’infraction dans la collectivité, les antécédents criminels de l’accusé, de même que la situation et le point de vue de la victime, dont les préoccupations liées à la sécurité.

Il convient de consulter la directive sur le filtrage des accusations.

Facteurs d’intérêt public à prendre en considération en cas d’omission de se conformer

Pour déterminer s’il est dans l’intérêt public d’engager une poursuite relativement à une omission de se conformer, la poursuivante doit également prendre en considération les facteurs d’intérêt public suivants :

  1. la durée pendant laquelle l’accusé s’est conformé aux conditions de l’ordonnance de mise en liberté, avant et après son omission de se conformer à l’ordonnance, compte tenu surtout de l’impact de la pandémie de covid 19 sur l’accusé
  2. toute raison apparente de l’omission de se conformer à l’ordonnance, notamment la question de savoir si, en raison de sa situation personnelle, l’accusé a eu plus de difficulté à comprendre l’ordonnance du tribunal ou à s’y conformer
  3. la question de savoir s’il y a de nouvelles accusations criminelles et si le règlement de ces accusations permet de tenir l’accusé suffisamment responsable sans qu’il ne soit nécessaire d’engager une poursuite relativement à l’omission de se conformer
  4. la question de savoir si l’accusé a omis de se conformer à une condition de non-communication avec une victime, notamment s’il a des antécédents d’omission de se conformer à une condition de non-communication ou si l’ accusé a amorcé le contact
  5. la question de savoir si la nature de l’omission de se conformer a une incidence sur le caractère approprié du maintien de la mise en liberté de l’accusé dans la collectivité (par ex. omission de se conformer avec interdiction de port d’armes).

S’il est dans l’intérêt public d’engager une poursuite, la poursuivante doit étudier toutes les sanctions disponibles et appropriées, notamment en se penchant sur la question de savoir s’il est indiqué de renvoyer l’accusé à un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones.

Il convient de consulter la directive sur le filtrage des accusations et la directive sur les peuples autochtones.

Programmes de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones

Dans certains cas, l’intérêt public est mieux servi par l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la poursuite de retirer ou de suspendre des accusations criminelles après l’achèvement d’un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones. De tels programmes permettent à l’accusé d’assumer la responsabilité de ses actes, s’attaquent aux causes profondes du problème et assurent la réinsertion sociale de l’accusé d’une manière constructive. Un renvoi à l’un de ces programmes peut être indiqué même dans le cas d’un accusé qui a déjà achevé l’un des programmes ou été déclaré coupable d’un acte criminel.

Les directives suivantes désignent les infractions non admissibles aux programmes de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones et énoncent les facteurs que la poursuivante doit prendre en considération pour évaluer le caractère approprié de ces programmes pour les infractions admissibles : Programmes de justice communautaire pour les adultes, Peuples autochtones, Accusé atteint d’une maladie mentale – solutions de rechange aux poursuites et Justice pénale pour les adolescents – sanctions extrajudiciaires.

Infractions réputées admissibles à un renvoi

Vu l’impact de la covid 19 sur le système de justice pénale, ainsi que la nécessité de réduire le nombre d’affaires au sein des tribunaux pour s’assurer d’accorder la priorité aux poursuites intentées relativement à des infractions graves, les infractions suivantes sont réputées admissibles à un renvoi à un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones :

  • vol et possession de biens de moins de 5 000 $
  • méfait de moins de 5 000 $
  • fraude de moins de 5 000 $
  • obtention frauduleuse de vivres ou d’un logement ou fraude en matière de voyages
  • prise de véhicule à moteur sans consentement
  • emploi d’un document contrefait
  • possession d’une pièce d’identité
  • tapage.

Autres infractions admissibles

Lorsqu’il s’agit de déterminer si le renvoi à un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones pour d’autres infractions admissibles est une solution de rechange efficace à une poursuite formelle, la poursuivante doit prendre en considération l’impact de la covid 19 sur le système de justice pénale et la nécessité de réduire le nombre d’affaires au sein des tribunaux pour s’assurer que les ressources sont affectées aux poursuites intentées relativement à des infractions graves.

La poursuivante doit aussi prendre en considération les facteurs suivants :

  1. l’impact de la pandémie de covid 19 sur l’accusé, comme la perte de son emploi, les conséquences sur sa santé, l’alourdissement de ses responsabilités en matière de garde d’enfants et d’éducation, le télétravail ou des contraintes pécuniaires importantes
  2. l’impact disproportionné de la pandémie de covid 19 sur les accusés vulnérables, notamment les accusés racialisés, marginalisés et autochtones (par ex. aucun accès aux mesures d’adaptation ou de soutien normalement offertes, ou accroissement des obstacles liés au fait de vivre dans une collectivité éloignée des Premières Nations ou une collectivité accessible par avion)
  3. la question de savoir si l’infraction a été motivée par la pandémie de covid 19 (par ex. profiter de la fermeture des commerces ou exploiter la peur de la contamination)
  4. les faiblesses dans la poursuite (par ex. le temps écoulé depuis le début de l’affaire, la disponibilité des témoins, ou la capacité des témoins de participer en personne à une audience en personne ou à distance)
  5. la question de savoir si le renvoi à un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones permet d’obtenir un résultat juste plus rapidement, compte tenu en particulier des retards causés par la pandémie de covid 19.

Thèse sur la peine dans les pourparlers de règlement

Pour établir une thèse sur la peine dans les pourparlers de règlement, la poursuivante doit prendre en considération tous les facteurs pertinents, dont la situation de l’accusé et l’infraction présumée, les principes et objectifs de la détermination de la peine, ainsi que la sécurité de la victime ou du public. La poursuivante doit également prendre en considération l’impact de la covid 19 sur le système de justice pénale et la nécessité de réduire le nombre d’affaires au sein des tribunaux pour s’assurer que les ressources sont affectées aux poursuites intentées relativement à des infractions graves.

La poursuivante doit étudier toutes les sanctions disponibles et appropriées, dans le respect de la sécurité publique, pour régler les affaires le plus rapidement possible. Dans certains cas, l’intérêt public est mieux servi par une sentence qui ne mènera pas à une condamnation au criminel ou à une peine d’emprisonnement. Même dans le cas d’un accusé qui a déjà été déclaré coupable d’un acte criminel ou reçu une peine d’emprisonnement, une sentence qui ne mènera pas à une condamnation au criminel ou à une peine d’emprisonnement peut quand même être appropriée.

Vu l’impact de la pandémie de covid 19 sur le système de justice pénale :

  1. Lorsque la fourchette de peines établie favoriserait habituellement l’imposition d’une peine avec sursis, la poursuivante doit songer à régler l’affaire par une absolution ou à renvoyer l’accusé à un programme de justice communautaire ou de justice réparatrice pour les Autochtones, sauf si la sanction proposée ne permet pas d’assurer la sécurité de la victime ou du public ou ne tiendrait pas suffisamment compte des circonstances de l’infraction ou de la situation du délinquant.
  2. Lorsque la fourchette de peines établie favoriserait habituellement l’imposition d’une peine d’emprisonnement de six mois ou moins, la poursuivante doit songer à régler l’affaire en imposant une peine non privative de liberté ou une peine d’emprisonnement à purger dans la collectivité, sauf si la peine proposée ne permet pas d’assurer la sécurité de la victime ou du public, n’est pas disponible en vertu de la loi ou ne tiendrait pas suffisamment compte des circonstances de l’infraction ou de la situation du délinquant.

Il faut se reporter aux directives intitulées Peuples autochtones , La violence entre partenaires intimes , Infractions contre les enfants , Infractions d’ordre sexuel contre les adultes  et Victimes .

Règlement des infractions de conduite en état d’ivresse

Dans l’examen des cas de conduite en état d’ivresse, les poursuivantes doivent considérer les effets de la pandémie de covid 19 comme une circonstance exceptionnelle justifiant le retrait d’une accusation d’infraction au Code criminel relative à la conduite d’un véhicule en échange d’un plaidoyer de culpabilité à une infraction au Code de la route relative à la conduite imprudente d’un véhicule.

Lorsque la pandémie de covid 19 constitue la circonstance exceptionnelle justifiant un règlement d’infraction de conduite imprudente, l’accusé n’y est pas admis si une des circonstances aggravantes suivantes prévues par le Code criminel et d’autres circonstances sont présentes :

  • l’infraction a causé des lésions corporelles ou la mort
  • l’accusé avait un taux d’alcoolémie égal ou supérieur à 120 mg dans les deux heures suivant la conduite d’un véhicule
  • l’accusé a un casier judiciaire ou un dossier relatif au Code de la route pour des infractions du même ordre
  • l’accusé fait l’objet d’une interdiction de conduire ou d’une suspension aux termes d’une loi fédérale ou provinciale
  • une collision ou de la mauvaise conduite ont été signalées
  • l’accusé a déjà fait l’objet d’une suspension de permis après une indication « Warn » (attention) ou d’une suspension administrative du permis de conduire (SAPC) aux termes du Code de la route
  • l’accusé était payé pour conduire à l’époque
  • un passager du véhicule était une personne de moins de 16 ans
  • l’accusé a refusé de fournir un échantillon d’haleine ou de sang
  • l’accusé conduisait un gros véhicule à moteur
  • les facultés de l’accusé étaient affaiblies par la drogue ou par l’effet combiné de la drogue et de l’alcool.

La décision d’accepter un règlement d’infraction de conduite imprudente doit être approuvée par l’avocat de la Couronne ou la personne désignée. La protection du public est la première préoccupation à chaque étape d’une poursuite relative à des infractions de conduite avec facultés affaiblies.

Lorsqu’un règlement d’infraction de conduite imprudente a été approuvé, la poursuivante devrait demander l’imposition d’une amende de 1 000 $ et, en vertu de la Loi sur les infractions provinciales, une ordonnance de probation prévoyant notamment l’installation d’un antidémarreur dans le véhicule du délinquant ou d’autres restrictions à la conduite. Il convient également que la poursuivante envisage de demander une ordonnance de probation obligeant l’accusé à suivre le programme de mesures correctives Bonne Conduite.

Il convient de se reporter à la directive sur la conduite avec facultés affaiblies.